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Taipan – Court-Circuit

Publié le 03 octobre 2012 par Wtfru @romain_wtfru

Bien loin des crêpages de chignons entre Booba et Rohff/TLF (coucou B2O, t’es trop loin devant), loin de la médiatisation de la sortie des disques de la Sexion d’Assaut ou de 1995, Taipan débarque ce lundi 1er octobre avec son premier véritable opus nommé Court-Circuit. Focus sur l’oeuvre du protégé de Bomayé Musik, le label de Youssoupha.

Taipan – Court-Circuit

Première partie: « Court-circuit »

 Après Punchliner en 2009 et Je vous aime en 2010, Taipan, aka le seul rappeur venu de l’Est, vient truster les bacs de tous les bons disquaires avec un double album. Double oui car en plus de Court-Circuit, on peut également y trouver son EP « Dans le Circuit », sorti en début d’année mais seulement sur les plateformes de téléchargement (légales bien sûr, personne n’oserait choper du Taipan sur Limewire). Épaulé par son cousin de beatmaker Céhashi -ou CHI pour les intimes-, celui qui a été dévoilé par le Rap Contenders notamment nous livre vingt-deux sons qui le font rentrer un peu plus dans les meilleurs rappeurs français de sa génération. Pour ceux qui le connaisse déjà, on retrouve ici tout son flow Ali-G, c’est à dire une pluie de grossièretés, une diffusion ininterrompue de punchlines et des blagues potaches tout cela mêlés à trois thèmes récurrents: les bites, les chattes et les femmes. Taipan choque mais c’est ce Taipan que l’on aime. Sa voix grave et éraillée -oui, le rappeur-serpent est un GROS fumeur- fait des merveilles sur ses égotrips (Court-Circuit, Mi-queue mi-tête), sur ses chansons « d’amour ».

 Lâchez votre comme, premier clip de Dans le Circuit, et comme tout le reste, le clip est parfait

Parlons d’amour justement. Dans cet album, le protégé de Bomayé Musik se permet d’évoquer l’amour sous toutes les coutures mais surtout sous des coutures encore inconnues dans le rap français. Effectivement, dans Bas les pattes, le rappeur chante ses fantasmes, ou plutôt des relations impossibles. Tout y passe, de la femme policière à la mère de son meilleur pote (« laisse moi kiffer la vibe avec ta mère ») en passant par sa cousine « je voudrais bien te voir au lit…putain si t’étais pas ma cousine »). Puis dans Il fallait que ça sorte, on suit le récit d’une rupture avec une fille un peu chiante. Dans ce morceau, pas de « cochonne », « bonne », « chienne », « couilles », ou de « quéquette » comme dans Bas les pattes, mais plutôt une mélodie plus douce, plus mélancolique et surtout où le rappeur-reptile se livre davantage en chantant un peu un plus. Enfin, et c’est sans doute le meilleur titre de l’album, Cash Cash nous offre un duel lyrical entre un Taipan en mode dragueur et une Déborah Lehnen dans le rôle de la poupée qui dit non. Déborah Lehnen, qui n’a aucun lien de parenté avec John Lenhen, est la bonne surprise de l’album grâce à une voix Soul et funk à la fois. En un refrain et un couplet, la jeune artiste montre plus de talent que Shéryfa Luna et Kenza Farah en six albums. Elle revient aussi, en anglais cette fois-ci, mais toujours pour un refrain dans Quel monde meilleur, sans que l’on ne se lasse d’elle. On ne se lasse pas de l’artiste principal non plus dans ses autres titres extravagants. On nommera 22/12 où il se moque des prédictions de fin du Monde et de ceux qui « y croivent » comme on dit dans le Nord et dans Le chien où il n’hésite pas à comparer l’homme à son meilleur ami. Ces titres sont osés mais réussis, sur des sujets pas forcément faits pour être rappés, Taipan s’en sort parfaitement bien, on en redemande même.

Le premier disque se termine par une Outro quelconque, qui n’apporte pas vraiment quelque chose sachant qu’il n’y a pas de parole mais juste une instru plutôt Rock. On n’en tiendra cependant pas rigueur tellement le reste est exquis.

Dans cette rentrée rapologiquement riche, Taipan sait se démarquer des autres rappeurs en nous proposant un album complet, diversifié et hétéroclite. Les productions de C.H.I sont caustiques et entraînantes bref, elles sont réussies même si, finalement elles se ressemblent un peu toutes. Il faut dire que Cehashi est une pointure dans son genre et qu’il est quand même le beatmaker de Youssoupha. Dans Court-Circuit, Taipan fait du Taipan, maniant la punchline à la perfection. On voit bien ici la patte Rap Contenders même s’il ne faut pas réduire le jeune rappeur à cette expérience. Depuis son premier groupe TaiChi (avec C.H.I d’ailleurs), jusqu’à ce disque en passant par Punchliner, La Rentrée des Clashs ou encore la première partie du Lyriciste Bantu à l‘Olympia en mai dernier, Taipan a pris du galon en évoluant dans le bon sens du rap et en évitant de faire du rap commercial pour jeunes boutonneux. Pour finir, des morceaux incisifs comme ceux-ci, on en demande plein d’autres. Ainsi, Taipan rentre un peu plus dans la cours des grands et on parie qu’il deviendra bientôt un incontournable.

Taipan – Cash Cash

« je voulais changer la planète mais ça fait trois jours que j’ai pas changé de caleçon »

Deuxième Partie: « Dans le circuit », imprimé dans nos têtes.

En chroniquant Court-Circuit, nous nous devions de dire un petit mot sur le deuxième disque du projet de Taipan. On connaissait le dentifrice 2en1, on connaissait moins les albums 2en1. Taipan nous en propose un ultra-efficace. Disponible sur ITunes le 21 mai, Dans le Circuit, sort enfin en physique, en ‘face B’ de Court-Circuit. Les moins avertis penseraient à des titres de seconde main à du rap fait à la hâte vu qu’au départ c’était un EP, mais force est de constater que c’est tout le contraire. Dès le premier morceau Rien à prouver, on rentre dans le vif du sujet avec un refrain simple mais ultra-efficace, qui rentre dans la tête très rapidement. D’ailleurs, c’est le même topo dans presque toutes les chansons: des refrains courts, répétitifs, simples mais extraordinairement tourné de sorte qu’ils ne sortent plus jamais de notre tête. Nous vous étonnez pas si, après une seule écoute, vous vous surprenez à chantonner du Taipan. Les refrains sont donc une réussite mais les couplets en sont aussi une puisque les punchlines sont encore plus nombreuses que le prénom « Kévin » dans le Nord (  » t’as pas moyen d’être polygame alors tu prends une femme schyzophrène » ).

Insérer Rien à prouver

De plus, et c’est cela qui pourra faire de cet EP un EP mémorable, ce sont la qualité des featurings. On retrouve Alino, le frère du 50 Cent çais-fran Alibi Montana (on parle de carrure et de rien d’autre hein) sur Rien à Prouver et On rentre pas, de Deen Burbigo de L’Entourage sur Les Gens Parlent, des casseurs-flowteurs Orelsan et Gringe sur C’est beau de rêver et surtout de son collègue de Bomayé Musik Youssoupha sur le chantant T’es parfait. Bref, dans la forme tout est parfait. Et dans le fond nous allons voir que c’est la même chose car Taipan n’a pas de limites. Ou en tout cas, il se permet tout.  La liste est non-exhaustive mais nous mettrons en relief:

- son hymne à la fumette dans Crame un gramme, titre qu’il a chanté (en partie) sur la scène de l’Olympia, scène où est passée des gens comme Brel ou Piaf.

- son feat avec le groupe de rap le moins productif Orelsan et Gringe accouche de paroles dignes de Clowny du SAV  mais en bien plus trash, se permettant ainsi de casser toutes pensées positives qu’un gamin peut avoir.

- son clip de Plus rien à foutre, où il montre bien qu’il n’en a que faire des rumeurs et autres paroles dénuées de sens. Ce clip est juste épique, épicé et audacieux. Bizarre même qu’il n’ait pas été censuré. Les images seront d’une bien meilleure aide qu’un long discours explicatif, à vous de vous faire votre idée:

- ses attaques à la superficialité des gens d’aujourd’hui dans T’es Parfait.

Bref, Taipan est accro à la came, mais bizarrement, l’auditeur va vite devenir addictif à ses sons tellement ils sont prenants, fumants et enivrants.

Taipan – C’est beau de rêver

Avec un talent plus important qu’un steack gros comme la Croatie, le MC de l’Est gagne haut la main le duel virtuel qui l’oppose à un autre basketteur-rappeur : Tony Parker. Mais ce n’est pas tout, Taipan se classe aussi très haut dans la hiérarchie du rap français avec Dans le Circuit grâce à des featurings réussis, des thèmes jusqu’alors jamais évoqués, des refrains entêtants, des punchlines inédites et surtout grâce à une continuelle provocation. le tout entouré de productions merveilleuses de Cehashi et d’une jaquette, il faut le dire, hilarante et aboutie. On t’aime Taipan, reviens vite.

PS: pour les intéressés, Taipan sera en concert à La Boule Noire le 9 octobre en compagnie de Sam’s, autre rejeton de Bomayé Musik.

Taipan – Court-Circuit


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