Le carton rouge (comédie affligeante ou navet de l’année ?)

Par Borokoff

A propos de Les Seigneurs d’Olivier Dahan 

Patrick Orbera (José Garcia) est ce qu’on appelle un loser. Ancienne gloire du football, il accumule les déboires et les déconvenues depuis des années. Tombé dans l’alcoolisme, interdit par une juge de voir sa fille Laura, il erre, au fond du trou. Lorsque la juge lui propose de partir entraîner une (très) modeste équipe de foot sur l’île de Molène, en Bretagne, Orbera n’a pas d’autre choix que d’accepter. Mais une fois sur place, l’ex-star du ballon rond se voit confier une mission bien plus importante par le Président du club (Jean-Pierre Marielle). Pour sauver la conserverie de Molène de la faillite, Orbera doit passer au moins deux tours de la Coupe de France. Il décide alors de « renforcer » l’équipe  en faisant appel à d’anciens joueurs qu’il a fréquenté mais qui ont connu des fortunes diverses. Et pas toujours reluisantes, à l’image de celle de la sienne…

Sur le papier, l’idée comme les ingrédients de la recette étaient beaux : soit réunir une pléiade de stars (Franck Dubosc, Omar Sy, Ramzy Bedia, Joey Starr, Gad Elmaleh, etc…) pour composer une équipe d’anciennes légendes du football devenues pseudo-acteur (Dubosc), dépressif à temps complet (Gad Elmaleh), « taulards » (Joey Starr) ou glandeurs professionnels (Sy, Bédia). Une équipe censée sauver une société au bord du gouffre financier. En ces temps de crise, où les entreprises ferment à tour de bras, le propos comme la toile de fond sociale du film étaient assez généreux (sans être démagogique) et cette équipe de « bras cassés » faisait assez rêver sur le papier.

La réalité du film est hélas bien éloignée de toutes ces projections d’avant-match. N’allons pas par quatre chemins, Les Seigneurs est une catastrophe. Et une catastrophe qui ne fait pas rire, ce qui est le point le plus ennuyeux pour une comédie, même quand il s’agit d’une première pour Olivier Dahan. Succession de sketchs éculés, Les Seigneurs souffre en premier lieu de son absence quasi-totale de scénario. Les comédiens, livrés à eux-mêmes, s’en remettent à une improvisation qui ne fait pas tellement rire, à l’image des gesticulations de Gad Elmaleh. Rarement, on aura vu l’humoriste franco-marocain aussi peu drôle dans un registre où il sur-joue les clichés du dépressif jusqu’à en friser l’agacement…

Fidèle à lui-même, Dubosc s’adonne quant à lui à ses facéties habituelles et à son personnage de loser pédant et prétentieux qui se prend cette fois pour un grand comédien. L’allusion à la reconversion de Franck Lebœuf n’est sans doute pas loin comme celle d’Orbera à la vie tumultueuse pour ne pas dire chaotique de Maradona l’était juste avant lui. Le piège tendu par Orbera et le président de Molène pour l’attirer sur l’île (ils lui ont fait croire qu’ils montaient Cyrano De Bergerac à Molène) est une bonne idée et une farce qui auraient mérité d’être davantage développés, tant la piste était bonne. Hélas, le film préfère faire s’alterner extraits de matchs sans grand intérêt et scènes d’orgies nocturnes pas très passionnantes non plus dans la maison où les « recrues » se sont réunies.

Que dire sinon, au-delà des clichés sur les Bretons qui abondent, à l’image de ce biniou omniprésent ? Que les péripéties de cette bande de pieds-nickelés sont assez rapidement éprouvantes. D’autant qu’on ne sent pas la sauce prendre entre les acteurs, encore une fois très desservis par le scénario.

Ramzy et Joey Starr restent fidèles à eux-mêmes, en fêtards accrocs au rhum, mais tous ces personnages comme celui d’Omar Sy (clin d’œil appuyé à Thuram) auraient mérité d’être davantage étoffés. Le film souffre d’une sérieuse indigence d’ensemble, à l’image de cette chute bâclée que rattrape à peine un générique de fin certes assez drôle, avec le sketch de Gad Elmaleh et de la « boite à sardines ». mais qui ne suffit pas à rattraper les dégâts causés par la tempête (bretonne ou pas)…

http://www.youtube.com/watch?v=wyVbuy2Cryo

Film français d’Olivier Dahan avec José Garcia, Jean-Pierre Marielle, Franck Dubosc, Gad Elmaleh, Joey Starr, Ramzy, Omar Sy… (01 h 37)

Scénario de Philippe et Marc de Chauveron (adaptation Olivier Dahan et Isaac Sharry)  : 

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