Intervenant la semaine dernière aux mercredis de l'INET (l'Institut National des Etudes Territoriales) afin de partager l'expérience de la Région Auvergne sur le bon usage des réseaux sociaux ; durant le débat sur l'avenir de la communication publique s'est posée la question de la nécessité pour une collectivité de céder à ce qui peut paraître encore pour beaucoup un effet de mode et qui, à mon sens, est pourtant une révolution.
Il est certes évident que la radio n'a pas remplacé le papier, que la TV n'a pas remplacé la radio, et que le web n'a pas achevé la TV.. alors que faire lorsqu'on doit gérer un budget de communication restreint et que l'on dispose, aujourd'hui, de tant d'outils ? Trop de choix tue-t-il le choix ? Doit-on faire, comme le jargonnent les publicitaires qui veulent avant tout vendre des outils sans réfléchir à des objectifs stratégiques porteurs de sens, du "crossmédia", de la com "360", ou encore (presque en français), du "multicanal" ? Pas forcément.. Car le web n'est pas un média comme les autres. Parce qu'il accumule les fonctionnalités de tous les autres, il est le média des médias, non un de plus.
Durant mon intervention, afin de rendre ma démonstration convaincante, je me suis efforcé de rappeler le rôle des nouveaux outils web dans les révolutions arabes, d'humoriser sur la puissance d'un tweet lorsqu'il est asséné depuis le compte d'une première dame ; j'ai fait état de la migration des jeunes vers twitter par exemple maintenant qu'ils constatent que les e-séniors (i.e leurs parents et grands-parents) arrivent sur facebook, je me suis attaché à mettre en avant le fait qu'en 2030, la génération Z, celle qui n'a pas connu le monde sans internet formera, avec la fameuse génération Y, la majorité de la population hexagonale..
Mais au delà des faits et des chiffres, il m'a semblé nécessaire d'insister sur la véritable nature de la révolution ouverte par les réseaux sociaux, à savoir l'ère de la recommandation. Alors que toute la communication classique, qu'elle soit publique ou privée est bâtie sur un mode intrusif (envoi de plaquettes, de magazines, de SMS, de newsletters, etc.. sur un mode descendant), la force de facebook, la densité de twitter, le génie de dailymotion, etc.. résident dans le fait que les contenus (audios, photos, vidéos, textes), sont poussés par vos amis ou les personnes en qui vous faîtes suffisamment confiance pour les "suivre".
Avant-hier encore, cet article serait resté sur le blog, dans l'attente de lecteurs. Aujourd'hui, s'il est lu et recommandé, son déploiement peut atteindre des scores impressionnants grâce aux outils de partage. C'est le cas d'un article récent qu'un bloggueur a réalisé sur l'action de l'Auvergne sur les réseaux sociaux. Paru lundi, il a suffit d'un tweet, lui-même "retweeté" 9 fois pour qu'il passe d'un diffusion destinée à 441 personnes à une diffusion qui peut toucher potentiellement 12955 personnes.. (30 fois plus !). Et il ne s'agit là que du second degré de partage.. imaginons le 3ème degré, le 4ème..
Il est donc urgent de ne pas attendre. A condition d'avoir quelque chose à dire, car la communication est avant tout la forme au service du fond, les acteurs publics gagneront à explorer les potentialités de ces nouveaux outils de relation qui leur permettra de toucher leurs administrés qui, pour les plus jeunes, demeurent imperméables aux outils de communication traditionnels.
Or comme le disait PIerre Mendés France, "le plus grand péril que courent toujours une démocratie et le gouvernement du peuple par le peuple, c'est dans la négligence des citoyens qu'il réside". Visionnaire, il fut un homme de son temps grâce à la radio et ses "causeries au coin du feu", à nous d'être visionnaires pour répondre aux défis de la citoyenneté de demain, et ne pas négliger, sous couvert de frilosité ou de peine à se défaire des idées anciennes, l'homo numericus.