Cette liste est faite des très bons - à mon goût. Et contrairement à l'année précédente, le cru de 2011 est plutôt d'une très bonne qualité.
Je n'en attendais rien. La bande-annonce se cantonnait à vendre aux enfants et à leurs parents crédules un "grand film de Noël en 3D". Faux. Rien de cela. Je ne sais pas ce que comprend un enfant devant HUGO CABRET. Mon moi de 8 ans n'aurait sûrement rien compris. Mon moi de 33 ans a, par contre, passé la moitié de la projection la bouche grande ouverte et les yeux écarquillés. Devant mes pupilles, cette après-midi de décembre, est en effet repassée ma vie de spectateurs rêvant d'aventures et de cinéma. Le film de Martin Scorsese explique de la plus belle des façons pourquoi j'aime le cinéma, pourquoi je continue de voir autant de films tous les ans, pourquoi je me déplace - peu importe le temps - dans une salle de cinéma, pourquoi je passe la plupart de mon temps libre à écrire des histoires. Pour éveiller mon imagination. Pour continuer d'être émerveillé. Pour continuer de rêver. Je suis suis sorti de HUGO CABRET les larmes aux yeux, les joues humides, la tête pleine d'inspiration et les yeux grand ouvert.
Darren Aronofsky fait partie de ces réalisateurs dont j'aime tous les films sans exception. Certains plus que d'autres évidemment mais je pense que plus il est dans l'excès plus j'aime. Par exemple, THE FOUNTAIN est, pour moi, une des expériences cinématographiques les plus intenses et viscérales que j'ai vécu en tant que spectateur. Comme une synthèse de tous ses films précédents, BLACK SWAN m'a alors fait passer par toutes les étapes par lesquelles REQUIEM FOR A DREAM, PI, THE WRESTLER ou THE FOUNTAIN m'avait fait passer auparavant, de la peur à l'émotion pure. Avec un sens de l'esthétisme, du baroque et de l'exaltation que je ne reconnaissais avant qu'à Brian De Palma, BLACK SWAN a relevé du grand-huit émotionnel - évidemment porté par l'incroyable interprétation de Natalie Portman.
Sur le papier, il y avait dans DRIVE tous les ingrédients pour le hisser dans les hautes sphères de ce top. Ceux qui lisent ce blog régulièrement le savent : un scénario de film d'action de série B, Los Angeles, de la violence, des hommages/références à la pelle, une bande originale 80's, une metteur en scène connu pour sa capacité à jouer avec les genres, un acteur ultra charismatique, ce sont des choses dont je parle très régulièrement ici. Au deuxième semestre 2011, DRIVE était le film que j'attendais le plus et, dans ces cas là, vous savez comment ça se passe : vos attentes sont toujours réduites en miettes. Pas ici. Tout ce que j'attendais du film, Nicolas Winding Refn me l'a offert sur un plateau en or. C'est une sensation rare. Je ne suis pas sûr que ça me soit jamais arrivé. De la première à la dernière image, c'est le film que j'imaginais : les images de Los Angeles magnifié, l'utilisation de la musique, Ryan Gosling magnétique, la poésie macabre, la réflexion sur le (super)héros de cinéma. Hypnotisant.
Je suis un énorme fan du Woody Allen des années 70, de ses films burlesques à ses dramedy en passant même par ses tragédies bergmaniennes. Mais à chaque film un peu plaisant de ces dernières années, il y en avait toujours un pour me refroidir brutalement (Ouais, j'ai detesté Vicky Cristina Barcelona au point de non-retour). Mais que dire de Minuit à Paris ? La ville que j'habite depuis dix ans m'a à nouveau fait fantasmer. J'avoue que je pourrais copier-coller le paragraphe préalablement écrit sur HUGO CABRET. Les sensations furent exactement les mêmes - mais avec plus de rires côté Woody. Avec son premier film parisien, Woody me rappelait, avec toute sa verve et grâce habituelle, toutes les raisons pour lesquelles je passe tant de temps sur mes scénarios, pourquoi je continue d'aimer Paris d'Amour, pourquoi je passe tant de temps dans les salles de cinéma, pourquoi il faut continuer coute-que-coute de rêver, d'écrire et d'imaginer des histoires. C'est là que la sagesse des anciens est précieuse...
Il y a des films improbables. Quand on m'a dit, un jour, que quelqu'un faisait un film sur un site Internet, j'ai eu du mal à y croire, en tous les cas croire en son potentiel. Mais on connaît tous le résultat et la réussite artistique de THE SOCIAL NETWORK. C'était encore pire avec le livre qui inspira LE STRATÈGE : faire un film sur des calculs statistiques capables de déterminer "l'équipe de baseball" idéale. Et pourtant. Le film de Bennett Miller est le film le plus passionnant, le plus divertissant que j'ai vu cette année. Plus divertissant qu'une histoire de robots qui se transforment en voitures. Plus divertissant que Tom Cruise escaladant le plus haut building du monde. Plus divertissant qu'un alien faisant des blagues de cul. Par la seule force de ses dialogues, de sa mise en scène et du jeu inspiré de ses comédiens, le sujet le moins intéressant du monde est devenu une histoire palpitante, humaniste et profondément inspirante.
Cette année, ils ont été nombreux ceux qui ont été voir un mec prendre soin d'un handicapé dans la joie et la bonne humeur. C'était censé être drôle et triste mais ça finissait surtout par être drôle (si on veut), la tristesse étant relayé à deux-trois scènes. Cette année, il ont été moins nombreux ceux qui ont été voir un mec prendre soin d'un malade du cancer dans la joie et la bonne humeur. C'était censé être drôle et triste et ça finissait par être les deux à la fois. Oui, INTOUCHABLES et 50/50 partageait un genre commun, la dramedy, et avaient des thèmes très semblables. Sauf que faire une "dramedy", une comédie dramatique, c'est pas faire une comédie avec deux-trois scènes tristes, c'est faire un drame avec de la comédie et vice-versa. Tout doit se mélanger - y compris dans une même scène. L'art de la "dramedy", c'est savoir passer du rire au larme en une seconde. Et c'est ce que fait 50/50. Un claquement de doigt et vous passez du drame pur capable de vous vous tirer les larmes des yeux au rire le plus gras. 50/50, c'est une des plus belles réussites du genre depuis la grande époque de James L. Brooks (POUR LE PIRE ET LE MEILLEUR, TENDRES PASSIONS etc.)
Se souvenir de soi quand on est enfant est une chose qui me paraît difficile. Je peux me rappeler d'évènements, de mon caractère mais les sentiments, j'ai du mal. j'ai du mal à me souvenir de mes souffrances, de mes peurs, de mes joies, de mes peines. Sonder l'âme d'un enfant est un exercice périlleux car on y met toujours une part de sa vie d'adulte, de la perspective, du recul. Visiblement pas pour Céline Siamma. Avec une délicatesse, une grâce solaire, une douceur, elle sonde l'âme de l'enfance. Peu importe le sujet du film, ce mensonge, l'identité sexuelle. J'ai l'impression que c'est secondaire dans TOMBOY. C'est juste un pretexte. Un pretexte pour parler de ce qu'il se passe dans la tête d'un enfant, pour parler d'un mystère insondable, d'une chose que, même l'intéressé, ne sait pas reconnaître et saura plus jamais reconnaître avec les années qui passent. Merveilleux. 82 minutes en apesanteur.
Je ne suis pas sûr d'avoir jamais vu un film aussi triste, triste dans son essence même. Pas triste comme LOVE STORY ou THE NOTEBOOK qui n'ont de triste qu'une petite partie de leur intrigue. Le film de Mark Romanek porte la tristesse en son sein. C'est son thème central. Malgré l'amour, l'amitié que ressentent les personnages entre eux. Malgré les pointes d'humour, tout est triste - au sens propre du terme - dans NEVER LET ME GO. Pendant des semaines après, j'ai continué de penser à ce film, à ce qu'il voulait dire, à ce qu'il impliquait. Quand le film s'est terminé, je n'avais pas les larmes aux yeux mais un truc s'est installé en moi. C'est très difficile à décrire : voir ces adolescents, ces jeunes gens découvrir les sentiments humains, l'amour, l'amitié, la jalousie, la peur, tout en sachant qu'ils sont condamnés, que leur existence est condamnée à prendre fin avant même leur 30 ans, c'est très passionnant et émouvant. Mais c'est voir ces jeunes gens acceptés leur sort sans rébellion, sans lutte qui devient réellement perturbant, glaçant et d'une tristesse infinie. Les questions philosophiques posées par NEVER LET ME GO ne laissent pas indemne. Le fait de ne pas avoir les réponses encore plus.
Il est agréable de sortir d'une salle de cinéma bouleversé, chamboulé par une expérience qui vous a fait réfléchir, rire ou pleurer. Mais il est également agréable de sortir d'une salle de cinéma l'esprit léger, vide de tous soucis car, pendant 2 heures, ce dernier a replongé en enfance. REAL STEEL, avec ses matchs de boxe entre robots, donne cette sensation : avoir 11 ans à nouveau. Ressortir d'une salle de cinéma avec, dans les yeux et dans la tête, ce même type d'images que lorsque vous découvriez sur grand écran des films comme ROGER RABBIT, HOOK ou MAMAN J'AI RATE L'AVION. Car cette année, on a tenté de nous faire croire que le vrai divertissement familial hérité du Spielberg des années 80 était SUPER 8. Faux. Ceci était de la désinformation. Ce divertissement "à la Amblin" (GOONIES, L'AVENTURE INTERIEURE, RETOUR VERS LE FUTUR etc.) qui vous replongeait en enfance, c'était REEL STEAL. Un film comme ça n'a pas de prix...
Est-ce qu'il faut être un garçon pour savoir apprécier "à sa juste valeur" des films comme SUPERBAD ou 40 ANS TOUJOURS PUCEAU ? Pas forcément. C'est la force de ces films. Aller au delà des blagues de vomi et de caca pour dire autre chose sur la virilité et la psyché masculine dans les années 2000. Et bien BRIDESMAIDS fait exactement la même chose avec la psyché féminine. Il y a forcément des énormes éclats de rire quant arrive le fameux caca en pleine rue dans une robe de mariée immaculée de blanc. Mais il y a surtout le reste, tout ce que ça dit sur la féminité des années 2000. Alors évidemment, les garçons peuvent être largués de la même manière que les filles l'étaient devant certaines vannes de 40 ANS TOUJOURS PUCEAU. Mais pour être ami avec beaucoup plus de filles que de garçons, il faut bien avouer qu'en à peine deux heures, Kristen Wiig dit presque autant de choses sur la psyché féminine contemporaine que l'intégrale de SEX & THE CITY. Et c'est riche d'enseignements. Très riche.