[AVANT-PREMIERE]
A l’été 2006, sortait Brick, un polar alambiqué sauce teenage movie porté par la star naissante Joseph Gordon-Levitt. Déjà, le cinéaste marquait les esprits. Ici, avec plus de moyens, plus d’ambitions, et plus de stars (Gordon-Levitt a depuis monté les échelons), Rian Johnson livre ce qui se fait de mieux en matière de SF actuellement. Lorgnant du côté de Niccol pour sa charge sociale (ambiance et schéma à la Time out, sorti l’année dernière), et son ambiance glaçante (Bienvenue à Gattaca), il réussit tout de même à imposer son style : récit morcelé et à tiroirs, anti-héros masculin, confusion des sentiments. Et, quoi de mieux que le voyage temporel pour réunir ces ingrédients ? En la matière, Looper est un instantané qui a la classe, alliant plaisir des yeux et des neurones. L’histoire, simple en apparence, est celle d’un jeune tueur, le looper-titre, engagé pour tuer des personnes envoyées du futur. Le jour où il doit « boucler sa boucle » (comprendre : tuer son double du futur, lui-même avec trente ans de plus au compteur), les choses se compliquent.
Sans rien dévoiler à une intrigue qui opère un virage radical, mais intéressant, en cours de route, disons plutôt que Looper a de quoi séduire les plus réfractaires au cinéma d’action. Il réussit là où le Total Recall de Wiseman a échoué : emphase sur les seconds rôles (Emily Blunt, dans la peau d’une mère prête à tout pour protéger son gamin, tire encore une fois son épingle du jeu), étude psychologique du héros plus fouillée qu’à l’accoutumée, mariage équilibré entre action et émotion. Tout en gardant intact à l’esprit sa mission première : divertir. Malgré un visage défiguré par les effets spéciaux pour mieux ressembler à son homologue du futur (joué par Bruce Willis), Joseph Gordon-Levitt, lui, s’en sort admirablement bien et porte le film sur ses épaules. Il est clair qu’il faudra désormais compter avec lui.