Les économistes qu’on nous cache

Publié le 30 septembre 2012 par Eldon

Ce sont toujours les mêmes qu’on entend. Les plateaux télé et les ondes radio leur sont largement ouverts, afin que les messages d’austérité, de diminution de dépenses à tout va, de baisses de salaire, de diminution des aides sociales et voire même de « sacrifice » (terme à maintes fois répété) soient diffusés à des heures de grande écoute et constamment ressassés.  Bien plus, beaucoup d’entre-eux disposent de  séquences éditoriales quotidiennes sur des grandes chaînes de télé ou de radio.

Ces économistes ne sont pas seuls au front heureusement. Journalistes, grandes figures médiatiques , grands patrons de presse passent les plats quitte à s’ériger eux-mêmes en spécialistes patentés du « comment doit fonctionner le Monde » et économistes de fonction. « Économistes de garde » et leurs « chiens de garde » au garde à vous de la pensée unique, la leur bien évidemment.

Comme l’a dit Sylvie Pierre-Brossolette (actuellement directrice adjointe de la rédaction et chef du service politique du Point) un jour sur une onde radio, « «Est-ce qu’il faut pas violer des fois les peuples un tout petit peu pour leur bien ?» (France-Info 16.1.08, au sujet de l’adoption du traité de Lisbonne). Le peuple n’aimant pas se faire violer, il faut le convaincre, lui extorquer sa résignation ou mieux, son consentement. C’est ainsi que se met en place fabrication du consentement dénoncée par Noam Chomsky.

Mais attention, et c’est aussi l’une des valeurs fondamentales des économistes orthodoxes,  tout le monde ne doit pas être sacrifié. Augmenter les contributions des plus aisés risque de faire partir les plus « méritants », « talentueux » et « responsables »  qui bien entendu ne pourraient tolérer de voir davantage de leurs rémunérations diverses  (provenant de salaires, stock-option, indemnités, jetons de présence, frais, retraites-chapeaux, niches fiscales, paradis fiscaux,…)  réduites, peu importe si le pillage d’entreprise et les petits arrangements entre amis  sont  les raisons principales de ces rémunérations. Comme chacun sait, la compétitivité exige que l’on baisse les salaires des employés et la concurrence que l’on augmente ceux des « grands », afin qu’ils ne soient pas débauchés ailleurs.

Messages officiels mais  mensonges officieux aussi. « Ne pas signer le signer le Traité de pacte budgétaire, c’est la fin de l’euro », « ‘L’Europe doit signer ce traité, sinon elle disparaît ». « Ce traité va permettre de mettre fin à la crise », « La France n’a pas le choix », « Il n’y a pas d’autre choix possible » , « Ceux qui ne voteront pas le texte auront une responsabilté historique ».

Même les habituels détracteurs du libéralisme sauvage en perdent leur latin tant l’uniformisation des esprits s’opère à la longue. La palme revenant sans doute à Roland Joffrin, directeur Nouvel Observateur: « Le Traité européen n’a rien d’enthousiasmant… Il ne parle que de rigueur financière, orthodoxie budgétaire et discipline de fer. Rien sur le social, rien sur la relance, rien sur la croissance, sans lesquels le chômage perdurera. » Mais reprend-il plus loin: « Quoiqu’on pense de ce texte, il est clair que le rejet de ce traité (le TSCG) risque de détruire l’Europe. » (cité dans « Marianne » n°806).

Pour connaître ces « économistes de garde », nous vous conseillons d’écouter les deux émissions que Daniel Mermet leur a consacré dans son émission « Là-bas si j’y suis » en janvier de cette année. Partie 1, Partie 2.

Les « chiens de garde » ont fait l’objet d’un retentissant ouvrage de Serge Halimi, où l’auteur démontre la collusion entre presse, pouvoir et système financier ( Les nouveaux chiens de garde)

C’est ainsi que s’est forgée l’idée que la crise et le résultat de la dette alors que d’autres économistes et non des moindres déclarent le contraire et proposent bien d’autres solutions que l’austérité (sans nier le fait qu’il faille faire des économies). On citera la suppression indispensable de la disposition de la loi de 1973 qui interdit à la Banque Centrale de financer directement l’Etat et sur laquelle il y a unanimité, voire même la suppression de l’euro pour et/ou la sortie de L’union européenne pour certains, une nouvelle gouvernance de L’Europe,  …

Mais peu importe. Le propos ici est de présenter des économistes et autres acteurs du monde économique afin que l’opinion de chacun résulte d’un choix éclairé et non le résultat d’un lavage de cerveau.

Maurice Allais

Saviez-vous que la France comptait dans ses rangs un prix Nobel d’Economie en 1988, décédé il y a peu de temps? Non? Normal. Bien que plutôt catalogué à droite de l’échiquier politique,  il dénonçait l’aveuglement de la logique  néo-libérale et la libéralisation totale du commerce international. Il s’agit de Maurice Allais.

Deux sites vous proposent de connaître sa pensée boycottée par l’intelligentsia politico-médiatique.

- Osons Maurice Allais

- Maurice Allais

Deux ouvrages de Maurice Allais permettent de connaître ses solutions pour sortir l’Europe de l’impasse et comprendre la mondialisation:

L’Europe en crise, que faire ? : Réponses à quelques questions, pour une autre europeation: La destruction des emplois et de la croissance : l’évidence empirique

On vous propose également en téléchargement son dernier entretien, qu’il avait accordée au site Fakir:« Règle d’Or » inscrite dans le TSCG qui impose aux Etats d’inscrire dans leur loi voire leur constitution l’obligation de limiter à 0,5% du PIB leur déficit structurel, sous peine d’amende allant jusqu’à 0,1% du PIB (sic!).

Selon lui , cette règle est une renonciation pure et simple à la démocratie (un Etat souverain devra soumettre son budget aux fonctionnaires nommés de la Commission Européenne), une hérésie économique car des déficits d’investissement sont inévitables et nécessaires et surtout cette règle a une raison politique car ses partisans ne veulent pas d’un Etat qui persiste à investir dans l’éducation, la santé, la recherche, le logement, les transports collectifs, la sécurité,… et considèrent que cela doit être confié au privé et au profit. Pour Jacques Généreux,  La « Règle d’Or » ne peut conduire qu’à une dépression durable et générale. Son blog.

Voici un extrait une émission sur France-Info où il évoque le plan de sauvetage de l’euro et la gouvernance de l’Europe.

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Jacques Sapir

Directeur d’études à l’école des hautes études en sciences sociales, Jacques Sapir, sans idéologie partisane mais sur la base de ses analyses économiques, prône entre autres, une sortie de l’euro qui de toute façon est condamné depuis sa création, sans remettre pour autant en cause l’Union Européenne  dont il rappelle que seul 17 membres sur les 27 ont adopté l’euro.

Jacques Sapir a le mérite de prendre en compte des clignotants économiques délaissés par la plupart des analystes et ses prévisions se révèlent souvent exactes. Malheureusement pour nous, elles ne sont pas très optimistes.

Deux ouvrages à lire de Jacques Sapir:

- Faut-il sortir de l’euro ? et La démondialisationEmbedded Video

A connaître également

 Les Économistes atterrés est un collectif d’économistes de renom qui comme le nom de leur site l’indique sont atterrés par les politiques économiques menées au nom de L’Europe et les denis de démocratie qui se font jour.

Nous vous invitons à écouter une émission qui leur a été consacrée par Daniel Mermet.

Téléchargez leur dernière publication: Les économistes attérrés mettent en garde contre le Traité Budgétaire

 Cac 40 est un site collaboratif et participatif dont l’objectif est de s’interroger sur les réelles causes de l’endettement des Etats et d’exiger un audit public sur la dette.

Dans Les Crises.fr, Olivier Berroyer analyse toutes les crises actuelles (économiques, sociales, de l’Europe, bancaires,…) et propose des solutions bien loin des mesures d’austérité qu’on prétend inévitables. Berroyer sous ses airs de premier de la classe n’a pas sa langue dans sa poche et bouscule la médiacratie actuelle. Nous lui avons récemment consacré un article.

Son dernier article est consacré à  James K. Galbraith, fils de John Kenneth Galbraith, le célèbre économiste américain recruté en 1934 par Roosevelt pour mettre en place le New Deal, puis conseiller des présidents Kennedy et Johnson. « En 1967, dans Le Nouvel Etat industriel, Galbraith père faisait l’éloge du capitalisme réglementé de l’après-guerre. Aujourd’hui, son fils, professeur à l’université du Texas et chroniqueur régulier du Washington Monthly, dénonce sans relâche un Etat prédateur dont les mécanismes d’intervention ont été détournés de leur mission pour servir des intérêts privés. Il presse surtout l’Amérique post-Lehman Brothers à refermer pour de bon l’ère néolibérale ouverte sous Ronald Reagan. Ce démocrate keynésien pur jus, qui est loin d’être tendre avec l’administration Obama, réclame une intensification de la relance budgétaire et une hausse substantielle du salaire minimal. Rencontre avec l’un des économistes américains les plus hétérodoxes du moment« .

Espérons que cet article vous aura donné de nouveaux outils d’analyse et de réflexion sur les enjeux actuels et que grâce à eux vous ne vous laisserez pas bercer par la douce musique ambiante.

N’hésitez pas à nous faire part de nos observations et à nous présenter d’autres économistes volontairement cachés par les médias bien pensants. (9)