Ce n'est pas moi qui le dis, mais la Fnac. Je vais sortir des thèmes habituels aujourd'hui. Ebuzzing considère encore que je suis un blog "multi-thématique" (et pas politique), donc j'ai le droit.
L'autre jour, je suis tombé à un envoi publicitaire de la Fnac, qui crée la Fnac Pro, apparemment des produits et services qui visent surtout les professions libérales. Décryptons…
En couverture : une photo, "Louise, avocat", jolie brune, milieu de trentaine, les mains sur un clavier d'ordinateur, calculatrice et imprimés officiels sur sun bureau. Et qu'est-ce qu'elle dit, Louise ?
Moi je suis spécialiste en droit pénal, pas en imprimante.
A l'intérieur, d'autres rejoignent Louise. Jacques, par exemple. Lui, il est "chef de laboratoire". Blouse blanche, stéthoscope autour du cou, la soixantaine bien sonné, calvitie, cheveux gris, lunettes. Qu'est-ce qu'il dit, Jacques ?
Mon truc c'est la microbiologie, pas les micro-processeurs.
Le tour de Véronique ensuite. Brune, milieu de vingtaine, l'air pas contente. Elle est conseil en communication. Et pourtant qu'est-ce qu'elle dit ?
Tout ce que je sais, c'est qu'une imprimante, ça sert à imprimer.
En somme, ce sont des pros. Ils font des trucs pointus, intelligents. On les admire. On les envie. Et pourtant, vous les mettez devant un ordinateur et ils demandent à quoi sert le mulot. Heureusement pour eux, la Fnac Pro est là.
Prenons "Olivier. courtier en assurances". Chemise, pas de cravate. Pose devant des rayons de dossiers. La trentaine, cheveux courts, bien coiffé mais le regard malheureusement un peu vide.
Sur les primes d'assurance, je suis imbattable ! En revanche sur les tablettes numériques…
Le pauvre. Ils auraient prendre Jacques pour les tablettes. Parce que notre super courtier, s'il confond iPad et EPAD, on se dit qu'il n'est pas si imbattable que ça.
"Antoine", genre jeune loup, est agent immobilier.
Les seuls objectifs qui me parlent sont des objectifs de business.
Olivier aurait pu lui expliquer comment prendre une photo d'appartement avec son EPAD. Mais Antoine veut un vrai appareil photo. C'était malin de pas nous montrer un photographe qui dirait : "je connais la photo, mais pas les appareils".
La palme va sans doute à Marie. Encore une jeune brune en robe noire. Elle est comptable indépendant.
S'il fallait en plus que m'y connaisse en logiciels informatiques…
Parce qu'habituellement elle fait tout sur papier, avec un crayon et une gomme ? Elle va compter un vendeur de la Fnac pour lui expliquer comment ouvrir une feuille Excel ? La compta est l'un des métiers qui sont tellement informatisés, que les deux compétences sont réellement inséparables.
Vous avez donc compris le truc. Vous n'êtes pas stupide, vous. Pour conquérir le marché des "pros", la Fnac doit d'abord leur expliquer qu'ils sont des neuneus, qu'ils ne comprennent rien et qu'ils ont besoin de la gentille Fnac pour les aider. Leur fail vient du fait que nous ne sommes plus en 1997, et que les "pros" savent brancher un ordinateur, ils ont compris ce qu'est une tablette. Les comptables utilisent même des logiciels informatiques. Et depuis 1997, tous ces outils sont devenus beaucoup plus simple.
Or, les pros de la Fnac ne proposent pas, à ce que je vois, grand'chose au-delà des conseils de vente. Ce sont donc des vendeurs, comme on les connaît : "C'est un peu plus cher, mais pour bosser confortablement il vaut mieux prendre le modèle avec 1200", puis, l'année suivante : "celui-ci n'a que 1200, donc c'est un peu juste. Pour être bien, c'est mieux d'avoir au moins 1800". En somme, étendre leur modèle grand public aux pros. Ce qui veut dire que le modèle grand public, c'est le même, sans la partie "pro". Dans "je suis un pro, mais je suis stupide", il faut supprimer tout ce qui précède le deuxième je. Si vous ne comprenez pas ce que je veux dire, allez acheter un EPAD à la Fnac.