Le jeu vidéo souffre : il halète, cherche en vain un peu d’oxygène, mais le même air vicié emplit sans cesse ses poumons. Années après années, les licences se font de plus en plus fortes, l’originalité de plus en plus rare. Lorsque les efforts d’un développeur se voient couronnés de succès – critique et public – son jeu se voit souvent assorti d’une suite et décliné sur tous les supports possibles et imaginables.
Le problème soulevé n’est pas celui de la qualité, mais bel et bien de l’originalité, de cette capacité à se renouveler au fil du temps. Le jeu vidéo a-t-il encore un avenir en tant que média innovant ?
Le premier problème, c’est celui des séries: si un jeu apporte une expérience nouvelle et qu’il se vend, il semble impossible de ne pas voir fleurir immédiatement des projets de suite. Borderlands 3 est déjà évoqué alors que le Borderlands 2 vient à peine de sortir, FEAR s’est perdu au fil des épisodes, tout comme Resident Evil, Dead Space, et plus récemment Mass Effect prennent le même chemin…
Les nouvelles licences se font de plus en plus rares, et plus rares encore sont celles qui se voient accorder une seconde chance: Enslaved n’aura jamais de suite, Majin and the Forsaken Kingdom non plus, et Mini Ninja ne reviendra qu’en téléchargement. Pourtant, ces jeux affichaient de bonnes idées de gameplay, un style graphique sympathique et, s’ils n’étaient pas parfaits, se révélaient plus qu’agréables à parcourir. Mais que peuvent les joueurs face aux investisseurs ?
Ensuite vient l’obsolescence programmée. Derrière ce nom barbare se cache une triste vérité commerciale : les éditeurs de jeu comme les constructeurs de consoles nous vendent des produits périssables qu’ils nous encouragent à remplacer chaque année. En témoignent la pléthore de déclinaisons que connait la Nintendo DS, la longévité des séries de FPS militaires, toutes semblables aux autres, et les innovations cosmétiques qui justifient chaque année une nouvelle itération des séries de sport les plus populaires.
S’il ne s’agissait que de déclinaison de concepts originaux et de nouveautés timides, la crise ne serait peut-être pas si grave. Mais les copies et les clones se multiplient, uniformisant peu à peu les licences. Une fonctionnalité de l’un se retrouve bien vite chez l’autre, rapprochant les expériences au point qu’un néophyte serait bien incapable de distinguer un Battlefield d’un Medal of Honor. Les grandes licences n’osent d’ailleurs plus sortir des sentiers battus de peur de voir leur public se tourner vers la concurrence.
L’uniformisation va même jusqu’à la copie. On connait les déboires de Zynga face à Electronic Arts, les multiples accusations de plagiats ne freinant pas le géant du free-to-play. Quand on entend les recommandations de Mark Pincus, fondateur de Zynga, à ses développeurs, on se dit que le bonhomme n’a pas grand-chose d’un passionné:
Vous n’êtes pas plus intelligents que les autres alors contentez-vous de copier ce qu’ils font jusqu’à ce que vous fassiez leur chiffre d’affaire.
Les jeux mobiles Gameloft ont également eu leur part de critiques, entre bandes-annonces inspirées de celles de Zelda, et jeu de stratégie d’une originalité douteuse. Si l’on peut s’étonner de l’absence de poursuite de la part de Nintendo ou Blizzard, il faut savoir que le gameplay d’un jeu n’est qu’une idée et ne peut être protégé juridiquement. Une porte ouverte à tous les opportunistes assez malins…
Le titre de ce PAL pouvait sembler provocateur, mais la question mérite néanmoins d’être posée: y a-t-il un véritable avenir pour le jeu vidéo ?