Auteur : Anne Berest
Editeur :Grasset
Nombre de pages : 320
Date de parution : 22 août 2012
Présentation de l'éditeur :
« J'ai rencontré ton père en 1986, au Pimm's ou au Sept, je ne sais plus un des clubs de la rue Sainte-Anne. C'était juste après son année de "voyage". C'est comme cela qu'il l'appelait. Même s'il n'a pas voyagé durant cette année-là. Ça, j'en suis sûr. Mais je n'ai aucune idée d'où il pouvait bien être, et je dois te dire que je n'ai jamais voulu savoir. Ton père était un très jeune homme, farouche, qu'il ne fallait pas blesser. La seule chose que je peux te dire, c'est qu'il me parlait toujours d'un certain Gérard Rambert, qu'il avait connu pendant son "voyage", et qui le fascinait. Je me souviens qu'il travaillait dans l'art. Je l'ai croisé une fois, un type excessif. C'est tout. »
Mon avis :
Denise a 22 ans lorsqu'elle découvre le monde du travail pour un job d'été auprès du photographe Bertand Quentin d'Aumal, l'amour et le sexe, mais la drogue aussi auprès de sa mère Matilda et de ses nouvelles rencontres. Mais ce qui l'intéresse par dessus tout est de découvrir une partie cachée du passé de son père, Patrice Maisse, acteur sans succès des années 80, mort d'une overdose en 1999.
" Patrice était un être réel qui se pensait construit comme un être de fiction, il était nourri d'un spectacle, qui ressemblait à sa vie, mais dont la dimension était différente."
Pour cela, elle rencontre Gérard Rambert, un marchand d'art qui a bien connu son père pendant cette période mystérieuse de 1985.
Le livre se décompose en deux parties assez inégales. Les deux premiers tiers du livre sont consacrés à l'enquête de Denise et à son apprentissage.
La seconde partie lèvera le mystère sur ces fameux mois de l'année 85, tout en révélant aussi des évènements qui vont éclairer la personnalité de Denise.
La première partie semble souvent un verbiage creux, servi dans un style parlé peu littéraire. Les personnages sont soit des précieux ridicules comme le photographe ou des déviants, des drogués, des prétentieux misogynes.
" Comment cette provinciale à moitié laide, à moitié bien roulée, pouvait-elle refuser son invitation?"
La dernière partie se révèle être une vision éclairée des centres de désintoxication du Patriarche, Lucien Engelmajer. Ces centres reconnus par l'Etat, créés en 1972, soignaient les toxicomanes par des méthodes naturelles et par intégration dans du travail collectif. En 1995, cette organisation qui prétend même guérir le sida, est reconnue pour ses dérives sectaires.
Le milieu des artistes pervertis des années 60 à 80 peut me séduire quand l'auteur traite leurs dérives avec humilité et psychologie mais j'ai du mal à le supporter quand ceux-ci sont imbus de leur personne et enclin à se gausser de ceux qu'ils considèrent plus faibles comme les femmes, les personnes différentes. Cependant, rêveurs et utopiques, ils ne se sont pas souciés de leur génération future.
" Cette descendance gâtée, amoureuse d'elle-même, couvée par une génération écrasée par la guerre, n'avait pas su quoi faire de la suivante."
Le ton est ici caustique, les récits peuvent être crus et les pensées vulgaires mais je reconnais que cela est nécessaire afin que l'auteur colle à son sujet.
La seconde partie est plus intéressante puisqu'elle dénonce une organisation ambiguë qui a certes soigné de nombreux toxicomanes mais qui a dévié, justement vers 1985, de son but humaniste pour se tourner vers le profit facile de l'endoctrinement sectaire.
L'ensemble donne un roman déséquilibré où l'atmosphère malsaine est assez pesante.
Ce roman m'a été prêté par la Librairie