Furieux que le Conseil
fédéral d'Europe Ecologie-Les Verts se soit prononcé contre le traité
budgétaire européen, Daniel Cohn-Bendit a claqué (provisoirement ?) la porte de
ce parti qu’il a pourtant largement contribué à sortir de l’ornière électorale
dans laquelle il se traînait depuis des décennies.
Rappelons quand même comment EELV en sont arrivés à obtenir pour la première
fois de leur longue carrière un groupe à l’Assemblée nationale et
accessoirement à 2 ministères qui ne soient pas de l’écologie.
Jusqu’aux dernières élections européennes, et même s’ils étaient dominants
dans le petit monde de l’écologie politique, les Verts n’ont jamais connu de
succès électoral digne de ce nom.
Les scores de leurs représentants à l’élection présidentielle sont de ce
point de vue, très révélateurs.
1974 René Dumont 1,3%
1981 Brice Lalonde 3,8 %
1988 Antoine Waechter 3,8%
1995 Dominique Voynet 3,2%
2002 Noël Mamère 5,25 %
2007 Dominique Voynet 1,6%
En 2007, malgré un contexte qui n’a jamais été aussi favorable aux thèmes
écologiques, les Verts ont atteint le fond avec le score de 1,6 % de Dominique
Voynet.
Pourtant, voilà que 2 ans plus tard, aux élections européennes, ils
connaissent au sein de la liste Europe Ecologie, un succès aussi soudain que
surprenant. Avec plus de 16 % des voix, ils arrivent en troisième place à une
encablure du Parti Socialiste.
Les raisons de ce succès ont été largement analysées à l’époque, et les
commentateurs furent unanimes pour en attribuer une grande part du mérite à
Daniel Cohn-Bendit.
Cette soudaine vigueur de l’écologie politique pouvait s’expliquer par la
conjonction de 3 phénomènes :
Le premier, le plus évident, c’est bien que l’écologie était devenue, plus
que jamais, un sujet d’actualité, une préoccupation de plus en plus généralisée
et pas seulement en France. Paradoxalement, ce ne sont pas les représentants de
l’écologie politique à proprement parler qui ont été à l’origine de ce
phénomène mais plutôt des scientifiques ou des personnalités issues des médias
comme Nicolas Hulot ou Yann Arthus-Bertrand. Les écolos politiques n'ont fait
que bénéficier du mouvement sans vraiment l’avoir initié.
Le second phénomène, a indéniablement été l’implication forte de Daniel
Cohn-Bendit et sa capacité à rassembler sous une même étiquette le petit monde
hétérogène de l’écologie française et des personnalités pourtant très
différentes qui sont soit à la marge de l’écologie traditionnelle (José Bové)
soit même en dehors de la mouvance écologique (Eva Joly). Sans Cohn-Bendit
comme catalyseur et comme très médiatique tête de liste, tout aurait été
certainement différent.
Enfin, Europe Ecologie a été récompensée d’avoir fait une campagne
d’élections européennes et non pas nationales, et sur la base d’un projet
européen clair et sans ambigüité.
Ensuite ce furent les régionales de 2010, un peu décevantes par rapport à
l’objectif que s’était lui-même fixé Cohn-Bendit (15%) mais néanmoins
globalement satisfaisantes (12,26%) pour Europe Ecologie qui restait dans son
élan des européennes.
En 2010 ce fut aussi la création d’Europe Ecologie Les Verts, et le début
d’un long déclin prévisible.
La création d’Europe écologie, sous la houlette de Cohn-Bendit, qui
rassemblait des écologistes de diverses tendances et des personnalités moins
politisées comme Hulot ou Arthus-Bertrand, a pu laisser espérer, pendant
quelques mois, que l’écologie politique française allait enfin évoluer pour
devenir un parti européen d’écologie politique et non pas avant tout un parti
de gauche antilibérale !
Las !....Il n’a pas fallut longtemps aux Verts pour s’approprier le
mouvement et en dicter la ligne directrice.
Avec la décision du Conseil d’EELV d’appeler leurs élus à voter contre le
traité budgétaire européen, les Verts ferment la parenthèse Europe
Ecologie.
En s'opposant frontalement à celui qui leur à permis de s'imposer comme la
troisième force politique en France, et sur un sujet qui a pourtant été à
l'origine de leur renouveau, les Verts retombent dans leurs vieux
traVerts.
Les travers d'un mouvement qui a toujours semblé hésiter entre un parti de
gauche plus ou moins à la traîne du Parti Socialiste et un parti de promotion
de l'Ecologie. Les travers d'un parti qui depuis des années n'a jamais donné
l'impression d'aborder l'écologie avec impartialité et sans parti pris
idéologique. Des travers qui en ont fait un parti réputé ingérable et à la
ligne politique quelques fois incompréhensible.
Gageons qu'avec ce retour en arrière, Europe Ecologie Les Verts, s'ils gardent ce nom, retourneront rapidement dans la médiocrité dont Cohn-Bendit les a sorti en 2009. Gageons également que le PS n'oubliera pas de sitôt le camouflet qu'ils lui ont fait subir et qu'après avoir allègrement mordu la main qui les a nourri...en sièges de députés, ils ne sont pas près de conclure à nouveau un accord électoral aussi favorable. Je ne suis pas certain qu'ils aient bien réalisé qu'avec leurs 18 députés et leur 2 ministères, ils vivent une période faste qu'ils ne reverront jamais, qu'ils en profitent, dans 5 ans c'est fini.