Chez Faignond. Tel est le titre du nouveau livre publié chez édition Edilivre par Clément OSSINONDE. Ce défenseur hardi et mémoire vivante de la musique Congolaise.
O MBOKA FAIGNOND !…un éternel refrain dans la conscience collective congolaise. Un mot évocateur d’un passé prodigieux et inoubliable. Un lieu mythique qui retrace toute l’épopée de la danse et de la musique. Un centre attractif et rayonnant de jeux, de fêtes, de cinéma, de divertissement, de détente et de repos. Un carrefour historique où tous les confluents musicaux universels se retrouvèrent en rendant à ce premier sanctuaire sacré congolais la source originelle de prédilection, d’élévation et de développement.
L’éternel temple de la musique et de la danse
«Le nom du bar dancing « CHEZ FAIGNOND » évoque à lui seul le soleil exotique, la nature généreuse, l’air parfumé des tropiques, à travers la présence de la mère Rumba, et surtout des noms de danses d’origine Cubaines, comme les airs de conga et de habanera » page 7. Avec ce sanctuaire congolais de la Rumba et des musiques du Monde, c’est le courant passéiste que l’auteur développe dans cet opus qui nous replonge sans fin dans les îlots de succès et de prospérité de notre patrimoine musical.
Hier encore, ce fameux bar dancing populaire attirait des centaines des fans, mélomanes de deux villes les proches du monde: Brazzaville et Kinshasa ex Léopoldville. Un lien de rencontres et de retrouvailles de ces fieffés de la Rumba et des autres danses du Monde. Qui venaient exprimer à cœur joie leur désir ardent de célébrer la fête et de danser ensemble aux rythmes affolants venus d’horizons divers.
En signant cet ouvrage précieux et tant attendu, Clément OSSINONDE à renouer avec ce passé reluisant, enfoui dans nos abysses individuels et redonner au présent une image incontournable et scintillante de ce monument de la musique. En revisitant ce bar dancing chargé d’histoire, il est allé à la source même des musiques mondiales et des danses modernes. Une démarche littéraire qui donne aux témoins de cette fabuleuse époque le reflet euphorique et la grandeur éminente atteint par cette grande messe musicale congolaise située en plein cœur du quartier célèbre de Poto-Poto.
C’est cette histoire marquante qui a fait couler beaucoup d’encre et rendu indiciblement heureux les adorateurs, les zélateurs de la musique que l’auteur conte. Cette fièvre sans cesse montante du passé écoulé qui donnait aux fans ravis le plaisir et le bonheur de se retrouver en face d’une vedette, d’un groupe, d’un orchestre ou autres. C’est ces différents moments de kermesse, de détente, de repos, d’allégresse… que l’auteur a essayé de relater dans ce travail sérieux qui résume de fond en comble les péripéties de cet espace légendaire imprégné d’ambiance multiforme. C’est toutes ces images incrustées, tous ces visages multiples des êtres, toutes ces voix nombreuses, tous ces sons volatilisés et souvenirs ineffaçables que l’auteur a voulu remémorer pour nous faire revivre ce hier toujours vivant dans l’autel de nos cœurs.
Les axes principaux
Le travail excellent de Clément OSSINONDE s’articule autour des thèmes précis qui portent le nom des chapitres constituant l’ensemble cohérent de l’œuvre. Ce faisant, il évoque allégrement l’ambiance nocturne des années 50 et 60 chez FAIGNOND, sa nature des divertissements; de plus, il parle de la naissance de l’orchestre Bantous et du passage des vedettes internationales dans ce lieu historique; ensuite, il souligne l’ascension et l’élévation du fameux Nganda FAIGNOND; et enfin l’auteur achève le récit sur le devenir du bar dancing en brossant au préalable le tableau portrait sur la vie et l’œuvre d’Emile Joachim FAIGNOND, l’artisan du temple sacré des illustres musiciens, des passionnés danseurs et ambianceurs congolais.
D’emblée, l’auteur nous apprend que le Bar dancing chez FAIGNOND est né en 1948. Il précise que c’est: « le premier lieu de prédilection de tous les amoureux de la gaieté de la musique et de la danse, à l’image des sanctuaires caribéens à Cuba et à Porto-Rico à cette époque ». Il poursuit « la Rumba, le Polka Pike, la Biguine, le Tango et le Boléro envahissent la grande piste qui présente des superbes chorégraphies et les derniers chansons à la mode »page 9. Hormis CHEZ FAIGNOND d’autres lieux ont été fréquentés par cette foule en liesse et en quête de la fiesta. Il y a eu « chez AIR FRANCE » à Kinshasa et bien plus ancien de l’époque ou ancêtre le « bar SILUVANGI (Avenue Croix rouge- KIN).
A l’inverse des Bars d’autrefois, la richesse du temple FAIGNOND réside dans l’épanouissement et l’essor des spectacles et divertissements proposés. Les mélomanes étaient conquis par la ferveur, l’ambiance, la joie…qui régnait dans cette enceinte attirante et bouillonnante de l’époque dotée en premier lieu d’une sonorisation amplifiée et de grande qualité. Cette grande première qui donnait au sanctuaire FAIGNOND l’ampleur et la notoriété. C’est dans cet antre musical que la clientèle venait assister au grand concert en s’installant en terrasse en plein air pour le plaisir des yeux et le bonheur de partager la musique et les pas de danses. De plus, on notait également l’organisation en semaine des séances de cinéma au grand bonheur du public de Poto Poto. En somme, FAIGNOND fut un tout où s’organisait de manifestations, de divertissements, de projections, de spectacles inédits et qui rassemblait le public dans le but d’évasion, d’amusement, de dilation.
L’ambiance nocturne des années 50 et 60 est ponctuée par la présence et le développement des associations féminines et masculines dans des différentes manifestations comme anniversaire, baptême, retrait de deuil… Mais « le dancing CHEZ FAIGNOND devient à son niveau le plus élevé lorsqu’il réussit à créer un lieu élitiste qui fait se rencontrer les Brazzavillois «évolués» comme la thermologie coloniale qualifiait les congolais ayant adopté les us et coutumes françaises des colons. Il réussit l’exploit d’attirer hors centre ville, les blancs et de créer un lieu festif cosmopolite ». Page 12.
De plus Clément OSSINONDE dit « la principale activité du dancing CHEZ FAIGNOND est demeurée les bals. Les bals dans le dancing, ont été un véritable défoulement fondamental auquel tous les habitués ont trouvé leur satisfécit »page 15. Après l’exploit de la sonorisation monsieur FAIGNOND bénéficiant de ses relations amicales d’un système d’éclairage ambiant qui donne au bar des reflets de lumière en différents. Une autre grande première ! Qui met hors piste les différents concurrents de Kinshasa. Avec ce nouveauté on voit tous les Weekends des dizaines des Kinois qui traversaient le Pool pour savourer la bonne ambiance jusqu’au petit matin.
Un événement majeur va marquer par sa portée et dimension nationale l’histoire du sanctuaire musical congolais. « Le 15 aout 1959 le bar dancing CHEZ FAIGNOND, 29 rue M’BAKA à Poto Poto accueille l’orchestre les BANTOUS pour le premier concert devant la première association de soutien dite « Amicale de l’orchestre BANTOU »page 17. A cet effet, il souligne « cet espace célèbre de Brazzaville dédié à la fête, au spectacle, à tous les langages musicaux contemporains s’est affirmé au fil des temps comme une référence » page 17 à 18.
En dehors du public qui venait en foule bigarrée dans ce local musical ou temple des amoureux de la vie mondaine, on note la descente sur cette piste prestigieuse de nombreuses stars de l’époque. Parmi les vedettes internationales ayant marqué de leur empreinte chez FAIGNOND on peut citer « SAM CASTANDET, LINE RENAUD, PATRICE et MARIO,…et des danseurs célèbres de l’époque : FRANCOIS NGOMBE et EMILE OKEMBA, ces précurseurs des danses internationales comme Rock and Roll, Tango, Blues, Valse….
En mai 1964 l’imagination fertile de monsieur Emile Joachim FAIGNOND est beau fixe dit l’auteur en substance. A cet effet, il fait ériger une villégiature hors commun appelée « Nganda FAIGNOND ». « Le lieu dit Nganda FAIGNOND offre aux Brazzavillois qui aiment la nature, de trouver désormais un lieu approprier pour faire évoluer les couples, non seulement sur une piste de danse, mais aussi à toutes sortes de divertissements, la pèche, les jeux, le repos etc.….Un lieu vivant et ardent» page 21. Chez Nganda FAIGNOND devient un lieu qui abrite tout. De la musique on passe aux douceurs du farniente. Un camp des ambianceurs et jouisseurs est né dans cette savane où la vie de satrape et à grande guide coule à flot. Les mélomanes sont accueillis et servis dans un coin fabuleux où la vie devient « fête na fête ». Un refrain monotone que ces fans vont fredonner au coin d’une partie de pèche ou de partage de la boisson. Un moment de délassement, d’amusement amical, familial et convivial comme pour oublier la même rengaine et les difficiles passes de la vie. En sirotant et en se la coulant douce dans cette rivière de plaisir et désir inextinguible.
Le grand bâtisseur
Avec cette nouvelle acquisition FAIGNOND, en changeant le terrain et le local de travail, devient l’infatigable laboureur. A ce propos l’auteur souligne élogieusement : « FAIGNOND prouve par sa capacité à entreprendre qu’il est l’infatigable laboureur. Il prouve, en effet, qu’il possède un perpétuel élan créateur… » page 21 à 22. De sites en sites, le promoteur assermenté s’affirme en géant producteur affiné dans la vente et le développement. Il sert de promotion à la recherche et à l’innovation. Des qualités indéniables qui suscitent chez l’état congolais séduit l’achat de ses sites pittoresques. Monsieur Emile Joachim FAIGNOND est un artisan qui transforme la terre aride en or. Bon gré, malgré, le changement, le sublime nom demeure plaqué dans les enceintes multiformes qui se conjuguaient à l’infini dans les savanes ou banlieusard de Brazzaville. Une ascension rutilante d’un organisateur chevronné, d’un gestionnaire hors norme doté d’une parfaite culture artistique, environnementale et hanté par une passion dévorante pour le tourisme. Avec cette étiquette, l’homme d’affaire à la vie extraordinaire s’est construit une image solaire, une renommée et une notoriété qui ont atteint le summum de prestige et de la gloire… qu’il méritait et forçait l’admiration de tous témoins oculaires de sa réussite fulgurante.
« FAIGNOND était un grand homme. Il a tant fait pour la musique, la danse et le sport ».page 25. L’enfant aux potentialités énormes a réalisé son rêve intérieur. Cette réalisation qui a fait l’honneur et la fierté de ses parents exemplaires (Olivier FAIGNOND et Pauline EWOBOLA) qui l’ont transmis la fibre familiale. Ce feu de l’ambition exubérante de progression qui l’animait sans cesse dans ses œuvres et durant toute sa vie vouée à l’entreprise, à l’amour et au partage avec les autres. Ce maestro et amoureux de la musique, de la fête aura marqué par sa vision de construction l’ère moderne. Un précurseur du temps contemporain où sa marque de fabrique encore vivante trouve l’insigne de sa vocation d’artiste de terrain et de la découverte des mondes de divertissements et de repos. Ce champion du monde de spectacle et des fêtes monstrueuses, pimpantes, clinquantes aura servi à l’événement aujourd’hui des moments de festifs grandioses qui alimentent le marché de la culture et de la musique. Un passeur d’émotion festive qui a laissé dans cette terre en mouvement un gage certain d’un travail laborieux, riche et accompli.
A lumière de cet ouvrage, il importe de souligner que Monsieur Emile Joachim FAIGNOND fut un véritable entrepreneur et un talent inné dans la création et la promotion des lieux de festive, de jeux, de détente et de repos. Un bâtisseur fécond doté d’un sens inouï d’invention et de développement des sites artistiques et touristiques de renom. Une meilleure leçon de vie que cette grande figure aura laissé dans le monde de la musique, de la danse, de jeux, de détente, de tourisme. Un éternel éclaireur et un seigneur des savanes dans ce monde obscur en quête des idées innovantes et constructives. En signant ce magnifique ouvrage Clément OSSINONDE à donner à notre pays le Congo un riche patrimoine qui éveillera l’âme constructive des futurs architectes de demain. Qui reprendront le flambeau lumineux de ce pionnier singulier. Celui qui a tout construit à la sueur de son front pour le bonheur national et l’indéfectible amour des siens: Emile flore, Guy Roger, Roland Bienvenu, Jean-Claude, Parfaite, Yvette, Garcia. Que l’auteur à honorer grandement dans son préambule.
NB : Parmi les enfants cités deux ne sont plus de ce monde
Yves Fernand MAKODIA-MANTSEKA.