Sans le savoir, ce satrape venait de sanctionner la mort du star-system, au sens où les studios l'entendaient depuis l'invention du terme en 1911. Pour la première fois, une grande vedette populaire allait se voir refuser l'accès d'un festival. Ici, en Californie, les ciné-clubs venaient de naître, les intellectuels commençaient à s'importer à cause de l'emprise des professeurs de faculté et des étrangers fraîchement débarqués d'Europe, mais les movie stars régnaient depuis déjà soixante ans, soit l'équivalent, en chronologie hollywoodienne, de plusieurs dynasties d'Egypte. Jayne Mansfield, symbole de l'ancien Hollywood, créature de Frankenstein lancée par la régie publicitaire de la Fox contre Marilyn Monroe, un simple buste, une paire de seins qui poussait l'arrogance jusqu'à n'avoir jamais tourné de film correct, un monstre engendré par la presse poubelle et le néant des vieux studios poussiéreux, allait retourner dans le chaudron d'où tout le cinéma d'antan était sorti. Star déchue à trente-quatre ans, avant même la consécration, Jayne Mansfield jouerait la victime expiatoire de la seconde chasse aux sorcières, celle des stars populaires, par les tenants d'une Amérique culturelle, inspirée du modèle européen. Refuser Jayne Mansfield, c'était se venger de l'arrogance d'une Elizabeth Taylor ou d'un Frank Sinatra sans risque de brouille avec les puissants du spectacle. Cela sous couvert de lutte contre la pornographie.
L'ouvrage s'ouvre sur l'accident de voiture qui a coûté la vie de Jayne Mansfield, le soir du 29 juin 1967, et pendant de longues pages, nous avons droit à un descriptif de la scène, dans ses moindres détails. Franchement, c'est glauque. Par la suite, l'auteur s'attarde à raconter la déchéance de cette actrice, broyée par la machine hollywoodienne, avec notamment cet aperçu d'une Amérique qui voulait faire peau neuve et chasser les actrices populaires, trop représentatives du mauvais goût et de la vulgarité.
Je ne connaissais pas cet ouvrage, pourtant lauréat du prix Femina 2011, aussi l'ai-je ouvert avec curiosité quant à la personnalité dont il était question. On sait très peu de choses sur Jayne Mansfield, après avoir tourné dans des comédies bon public, elle a fini sa carrière dans des films discutables et était victime de son image de bimbo, blonde à forte poitrine. Je m'attendais bêtement à en apprendre davantage, hélas j'ai été bien décomposée à la lecture de ce récit sinistre et accablant. Ce n'était vraiment pas la lecture indiquée! Je n'ai pas du tout apprécié l'approche de l'auteur, son écriture sèche et froide, son regard sur les dernières années de l'actrice, sans juger, sans complaisance non plus, mais sans attachement. Je n'ai pas du tout adhéré, et j'étais pressée d'en finir (158 pages seulement, ouf).
Jayne Mansfield 1967, par Simon Liberati
J'ai Lu, 2012