Les grands labours
Les poses concrètes de la passion,
intimes, suprêmes et violentes,
calmes ou fébriles
chauffent les accessoires vivants de sa mer carnivore,
comme des bijoux libres
goûtant fort
dans la déchirure
de sa bouche de fruits assoiffés.
Je n’écris plus d’homicides
mais contemple le calme inouï
des anges mouillés sur son ventre.
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Un indien m’a dit de ne jamais me laver
La peau sèche,
le coeur renvoyé,
je prie de tout perdre
avant d’en oublier la mémoire,
et de mourir à jeun,
charge ton fusil,
nous voyagerons.
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L’inutilité de la beauté
Avons-nous assez honte,
sommes-nous malades ou méchants
d’aplatir la passion,
j’attends la vitesse :
ce lourd moment
où tu ne reviendras jamais.
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J’espère que non
Oublier l’avenir, de plein fouet,
est dans l’ordre des choses,
comme aimer en pleine froideur.
Imposant et épeurant,
le maître me demanda
au sujet des poèmes adressés à sa soeur :
« As-tu mal à la tête ou au coeur ? »
L’heure avance,
imaginez le contraire.
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Service secret
Es-tu toujours ce paysage
aux barrages mystérieux,
où la plongée est un décès,
le mouvement une erreur.
Aider à tuer
est une distraction inexistante,
tout le monde sait
où se procurer l’arme idéale :
l’amour qui tue,
comme on tue tout animal.
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L’HORREUR DES FRUITS
Un poète travaille avec ses mains,
déracine les mots de la page,
obstrue la réalité,
extermine la lourdeur de la saleté,
un crime contre l’esprit
dont la beauté piétine
le coulis des femmes
qui engraisse la terre sèche
ce qui s’appelle de la mousse nouée.
Écrire c’est s’avorter pour ressusciter :
un lavement de l’âme
j’aime la vitesse de cette ascèse démesurée.
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Denis Vanier poète
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« Denis Vanier, un monstre dans la ruelle »