Je viens d’achever la lecture de la traduction en Français du livre de Antal Fekete, « Le Retour au Standard Or », paru aux éditions Le Jardin Des Livres. Alors que le monde, tous les jours, s’approche un peu plus d’une crise monétaire majeure (si ce n’est pas la mère de toutes les crises), il me paraissait nécessaire d’en dire quelques mots ici.
Avant de lire ce livre, je connaissais mal le Pr. Fekete. En effet, cet économiste et mathématicien, bien qu’ayant correctement prévu les différentes phases de la crise que nous traversons actuellement, n’a pas eu le succès médiatique que certains autres comme Nassim Taleb ou Nouriel Roubini.
On peut conjecturer longtemps sur les raisons de l’indifférence médiatique marquante de traitement que ce Hongrois longtemps installé au Canada a subi, mais on peut noter que ses prises de positions ouvertement libérales, son point de vue économique clairement revendiqué comme appartenant au mouvement de l’école autrichienne (dont Ludwig Von Mises et Friedrich Von Hayek firent partie), et son attachement au retour de l’étalon-or ne lui ont certainement pas attiré la bienveillance des journalistes économiques traditionnels, là où Roubini a su se montrer keynésien (ou à tout le moins, interventionniste), et Taleb s’est habilement cantonné à son domaine de prédilection mathématique.C’est donc avec un a priori positif que j’ai entamé ma lecture de « Le retour au standard-or ». Au passage, on notera la tentative marketing amusante de l’éditeur de présenter le livre dans un format non conventionnel, bien plus haut que large, qui donne l’aspect général d’un lingot d’or au volume de 240 pages écrit gros. Si c’est esthétiquement intéressant, cela rend le livre un peu moins facile à manipuler. D’un autre côté, la quantité écrite par page étant réduite, on avance rapidement dans l’ouvrage…
La forme évacuée, attachons-nous maintenant au fond du livre.
Ce fond se compose, comme tout ouvrage traduit d’une langue vers une autre, de la traduction elle-même et du propos de l’auteur.
Pour la traduction de l’anglais, je tiens à le dire : elle est, pour tout dire, assez consternante. Pas au point de rebuter le lecteur, mais entre les « après que » systématiquement suivis du subjonctif (qui alourdit considérablement les phrases), les faux-amis traduits un peu trop vite, la syntaxe parfois confuse, et une concordance de temps hésitante dans certains passages, on se prend à vouloir retrouver le texte anglais pour comprendre pourquoi le traducteur, certainement de bonne foi, n’a pas fait un petit effort pour rendre le propos en français correct.
Et puisque propos il y a, ajoutons en contraste à la traduction que celui-ci est très intéressant et relativement logique dans son énoncé.
Essentiellement, dans son ouvrage, Antal Fekete développe son idée fondamentale : n’importe quel bien répondant à quelques critères simples peut servir de base à l’émission monétaire. Ces critères sont le fait d’avoir une valeur suffisante, et qu’il puisse être liquidé assez rapidement pour fournir la contrepartie nécessaire pour rembourser les effets de commerce ou les billets de banque émis (billets au sens : acte écrit, engageant la banque sur une dette, pas au sens « petit bout de papier émis par une banque centrale », hein). Dans ce cadre, il apparaît évident que ces billets ou effets ne sont pas inflationnistes puisqu’ils naissent en même temps que les marchandises sont produites, et disparaissent (contre de l’or ou de l’argent) lorsqu’elles sont livrées, une fois finies. Dans le temps moyen, ces effets et billets peuvent circuler comme bon leur semble, en fonction des besoins, et ne nécessitent même pas de banques, puisque ce ne sont que des reconnaissances de dette. Au pire, ils sont échangés contre leur valeur-or auprès d’un établissement qui se chargera ensuite de la compensation avec la ou les banques impliquées.
L’ouvrage détaille ensuite, de façon particulièrement éclairante, voire prémonitoire pour certains passages compte-tenu de la crise qui se déroule sous nos yeux, la façon dont les gouvernements se sont affranchis de l’étalon-or d’un côté et du fonctionnement de ces effets de l’autre, entraînant d’un côté une inflation galopante, et de l’autre, par conséquence de friction sur les marchés, un chômage de masse incompressible. Dans la foulée, il explique très bien la connivence empoisonnée qui s’est mise en place entre les banques et les gouvernements, au travers d’une réserve fractionnaire basée sur l’émission de dette publique, compensée par … rien du tout, et destinée mathématiquement à grossir sans jamais s’arrêter (enfin, jusqu’au moment où un nombre suffisant d’acteurs économiques refusera de continuer à opérer avec la monnaie fiat).
Du reste, si l’on en croit l’actualité, on constate que le Pr. Fekete a plutôt bien jaugé des événements en cours, puisque jusqu’à présent, tout se déroule comme il l’avait prédit. Il n’est pas le seul, d’ailleurs, puisque d’autres, comme Marc Faber, qui a aussi prévu la crise de 2008, expliquent l’importance de s’investir en or pour qui veut sauvegarder son capital.
Et même en se contentant de regarder la semaine écoulée, on en arrive à la même conclusion : après une période — un hiatus, dirons-nous — plus ou moins long où une déflation majeure fera de lourds dégâts en Europe et aux Etats-Unis, l’inflation devrait rapidement s’installer avec une montée importante des cours de l’or.
Ayant globalement les mêmes points de vue que Fekete, je ne peux que vous encourager à vous procurer son ouvrage et vous faire votre propre opinion.