Riches & Dommageables (eux), Pauvres et Négligeables (nous)

Publié le 23 septembre 2012 par Hunterjones
J'étais penché tout près de la pompe #6 de la station service. On ne me voyait pas. C'était comme si je n'existais pas. J'étais même hors des circuits des caméras. J'aurais pu voler de l'essence mais j'étais, à ce moment précis, à pied.
Je voyais au loin une longue ligne afin de payer son essence. La femme qui dominait la ligne faisait valider des billets de loto. Les gens derrière s'impatientaient.
Je pensais à ces gars de la LNH. Des gens qui vivent sur une différente planète que la nôtre. D'un côté des mulitmillionnaires qui ne se soucient aucunement de voler le travail d'un pauvre soldat russe ou d'un hockeyeur professionnel de suisse ou d'Allemagne, de l'autre des milliardaires qui veulent un contrôle absolu d'une ligue dont ils ne contrôlent plus rien depuis qu'ils ont rendu les salaires publics dans les années 90. Je pensais à eux en me disant que ces gens-là ne pensent surtout pas à nous, les fans de hockey. Je rêvassais en me disant que ce serait merveilleux que les spectateurs laissent tomber ET les joueurs ET les proprios. Pour toujours. Après tout, la dernière fois que j'ai regardé, et je n'invente rien, 4% de la population appuyait les propriétaires de concessions dans le conflit de la LNH, 8% appuyait les joueurs et 88% n'appuyait ni l'un, ni l'autre. Ça devrait donc se refléter dans la vente des billets non?
Mais c'est un beau rêve. On est franchement trop cons. On se taxe volontairement à coup de billets de loto et on aime payer notre bière 10$. La dame aux billets de loto avait un air de Pauline Marois. Tardive cinquantenaire, faussement blonde, un peu ronde. Ça m'a rappellé qu'on avait voté pour Pauline. Qu'elle veut surtaxer les foyers gagnant plus de 130 000$. Nous sommes directement ciblés là-dedans, l'amoureuse et moi, et pourtant je vis très bien avec ça. N'est-ce pas normal de redistribuer aux moins nantis quand on a des surplus?
Allez dire ça aux gens de la LNH. Ou a Bernard Arnault. Arnault est propriétaire de marques aussi prestigieuses que Christian Dior, Louis Vuitton, Moët et Chandon, Château d'Yquem et Sephora. Sa fortune est évaluée à 26 millards de dollars. Il est l'homme le plus riche de France. Il veut tellement échapper au taux d'imposition de 75% que le gouvernement socialiste de François Hollande veut imposer aux Français gagnant plus d'un million d'euros par an, qu'il a demandé à être nationalisé Belge. Ça fait beaucoup de bruit dans l'hexagone.
Le journal Libération a fait un sévère doigt d'honneur au système capitaliste dans lequel il baigne en titrant Casse-toi riche con! à la une de son journal. Ils se sont justifiés en disant qu'ils ne faisaient pas des unes en fonction des impératifs publicitaires, si bien que les publicitaires ont laissé tomber Libération, leur faisant perdre 150 000 euros par jour depuis le 12 septembre. Arnault a lui-même intenté une poursuite contre le journal.
Libération est enchainé.

Parlant de chaines je me suis aussi mis à disgresser mentalement sur Québécor et ses multiples plaintes au CRTC afin d'empêcher Bell d'acheter Astral. Lors des audiences publiques visant l'achat d'Astral par Bell, là aussi on était dans un monde parfaitement farfelu. Il y avait les gens de Québécor qui disait le plus sérieusement du monde que le CRTC s'apprêtait à faire un dangereux précédent...
Sans rire...

Comme si leur système convergent n'avait pas déjà causé des dommages du même ordre que ce qu'ils anticipent. Ne nous leurrons pas, malgré les pubs trompeuses qui nous laissent croire que le consommateur serait laisé si une telle transaction était acceptée, la menace est EXCLUSIVEMENT COMMERCIALE. Le citoyen n'est en rien considéré dans tout ça. C'est comme le conflit de la LNH. On veut nager dans ses millions tout seul. On veut être le plus grand et voler plus petit que soi, I don't see a problem with that*
"Vous pouvez pas accepter ça, ils seront meilleurs que nous au même jeu d'intoxication populaire..." était en somme la traduction des récriminations de Québécor face à Bell.

Sans même effleurer le million, je crois être du bon bord. De ceux qui savent qui en ont peut-être un peu plus et qui vivent très bien avec l'idée d'avoir à partager.
On est riche quand l'argent sort et sert. Pas quand il s'empile. Comme nous, faut qu'il s'active et se rende utile cet argent.
C'est ce que je faisais ce matin-là. Je m'activais, il fallait faire quelque chose. À l'ombre des regards, c'était comme si je n'existais pas. C'était la 153ème station service que moi et ma gang on visitait. Si tout se passait comme prévu les 153 bombes que nous y avions installés sauteraient en même temps. 1 dollar 53 le litre, que le diable les emporte.

La femme était toujours au comptoir et s'achetait de nouveaux billets faisant rager les gens derrière.
Ils ne seraient plus là personne pour l'heure du gros lot...
J'ai eu une pensée pour les pétrolières dont le cours des actions ralentirait sûrement.
J'étais ému.
*Sidney Crosby, 13 septembre 2012, répondant à la question "Vous n'avez pas un certain malaise de voler le poste d'un joueur d'Europe pour peut-être seulement quelques mois de grève?"