Car l'ouvrage de Jean Teulé est tout sauf pessimiste malgré un titre qui ne prête pas à rire. L'écriture est entièrement au second degré même si l'auteur s'est nourri d'anecdotes plus ou moins démenties, comme la signification du logo d'Apple, dont la pomme à demi-croquée évoque le suicide au cyanure, le 7 juin 1954, d'Alan Turing, l'inventeur de l'ordinateur (page 60).
Chacun trouvera corde à son cou dans cette drôle de boutique qui, au départ n'est pas marrante du tout. Lames de rasoir, parpaing avec anneau et chaine à cadenasser à la cheville pour se noyer d'une traite, baiser de la mort, loupe génératrice d'insolation ... les méthodes ne manquent pas. Les moins fortunés pourront se satisfaire d'un sac en plastique.
Dans la famille Tuvache on est inventif de père en fils depuis dix générations pour fournir à la clientèle un choix très vaste qui fait la renommée de la maison. Mais le petit dernier ne marche pas sur les brisées de ses ainés. Alan zozote, mais là n'est pas son plus grand défaut. C'est un optimiste de première, pour qui tout peut toujours "s'arranzer". Il est fan de l'ours Baloo dont il chante à tue-tête la maxime : il en faut peu pour être heureux.
Tout fout le camp et Mishima, le père, se met à barrer de traviole. Ce n'est pas une balade dans le cimetière voisin ou une virée pour réapprovisionner les rayons en champignons vénéneux qui vont remettre les coucous à la bonne heure.
Quelles sont les idées qui auront le dessus ? Les noires des parents ou les roses des enfants ? La petite entreprise connaitra-t-elle la crise ou la fortune ? Il faut lire le Magasin des Suicides pour respirer un bon bol d'humour.
Après 6 ou 7 adaptations théâtrales le cinéma s'est emparé du concept pour en faire un film d'animation que Patrice Leconte a présenté en avant-première au festival d'Annecy.
Le réalisateur, conscient que le genre n'a guère le vent en poupe parmi le public adulte français (comme le regrettait Marianne Piquet dimanche au Rex avant la projection du Jour des corneilles) "Faire l'ouverture d'Annecy avec un film d'animation, c'est comme faire l'ouverture de Cannes avec un film classique". Il parait que le succès a été grandiose et que le résultat plait énormément à l'écrivain qui a déclaré en sortant : un délire ce film, insensé, jamais vu ça. Complètement fou, drôle et farfelu. Cà pétille de partout.
Quelques jours à attendre avant de découvrir le film, dont la fin est différente de celle du livre.
Le Magasin des Suicides de Jean Teulé, Julliard, 2007Film de Patrice Lecomte à partir du 26 septembre au cinéma