Qui est Gilles-Eric Séralini ?
Professeur à l'Université de Caen en biologie moléculaire, spécialiste des effets des OGM agricoles, pesticides et différents polluants sur la santé, Gilles-Eric Séralini a été membre, en tant qu'expert, de deux commissions gouvernementales chargée d'évaluer les OGM avant et après leur commercialisation : la Commission du Génie Biomoléculaire (CGB) et le Comité de Biovigilance.
Il est Président du Conseil scientifique du Criigen (Comité de recherche et d'information indépendantes sur le génie génétique), qu'il a fondé en 1999 avec Corinne Lepage et Jean-Marie Pelt.
Il dénonce depuis de longues années la sous-évaluation des risques des OGM agricoles et des pesticides sur la santé... Un combat acharné qui lui a valu beaucoup de critiques et d'attaques personnelles de généticiens éminents.
Distingué de l'Ordre national du mérite par le ministère de l'Ecologie en 2008, il est soutenu dans ses prises de positions par des centaines de chercheurs et médecins dans le monde.
Gilles-Eric Séralini est l'auteur de plusieurs livres, notamment sur les OGM, la biodiversité et les effets des polluants : "Ces OGM qui changent le monde" (Flammarion, 2010), "Nous pouvons nous dépolluer" (Editions Josette Lyon), "Après nous le déluge" (Flammarion, 2008), et "Génétiquement Incorrect" (Flammarion, 2003), ou encore "OGM, le vrai débat" (Flammarion, 2000).
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2 ans de recherches secrètes pour que la vérité éclate
Il s'agit de deux produits très représentatifs : un maïs transgénique tolérant au Roundup, le caractère partagé par plus de 80% des OGM alimentaires, et le Roundup lui-même, le pesticide le plus utilisé sur la planète. On ne teste pas au niveau réglementaire ces produits sur des humains, mais sur des rats. Ces tests ont donc porté sur 200 rats en observation pendant deux années sur plus de cent paramètres. Les dosages utilisés (à partir de 11% d'OGM dans l'alimentation, et 0,1 ppb de Roundup dans l'eau) sont caractéristiques de doses environnementales courantes.
Les résultats de cette étude révèlent des mortalités plus rapides et plus fortes au cours de la consommation de chacun des deux produits, avec des effets hormonaux non linéaires et reliés au sexe. Les femelles développent des tumeurs mammaires importantes et en grand nombre et des perturbations hypophysaires et rénales, et les mâles présentent des atteintes hépato-rénales chroniques sévères.
L'équipe du Professeur Séralini de l'Université de Caen a publié cette étude(*) très détaillée dans une des meilleures revues scientifiques internationales de toxicologie alimentaire, en ligne ce 19 septembre 2012. Les implications sont gigantesques. Elles permettent de comprendre le mode d'action toxique d'un OGM et du caractère transgénique le plus répandu, mais aussi d'un pesticide à des doses extrêmement faibles équivalentes à celles trouvées dans les eaux de surface et dans l'eau de boisson. De plus, les résultats mettent en lumière le laxisme des agences sanitaires et des industriels dans l'évaluation de ces produits.
Il faut savoir que ces chercheurs français ont étudié secrètement, "dans des conditions de quasi-clandestinité. Ils ont crypté leurs courriels comme au Pentagone, se sont interdit toute discussion téléphonique et ont même lancé une étude leurre tant ils craignaient un coup de Jarnac des multinationales de la semence" précise l'article du Nouvel Observateur qui révèle le scandale.
Suite à cette étude alarmante, "les autorisations de mise sur le marché de ces produits doivent être immédiatement revues, les tests actuellement en vigueur de 90 jours doivent être prolongés à 2 ans pour tous les OGM, les pesticides doivent être testés 2 ans à faibles doses et en formulations, les tests réglementaires des compagnies doivent être immédiatement rendus publics, et soumis à l'expertise contradictoire. Ils doivent être à l'avenir réalisés indépendamment des fabricants" exige aujourd'hui le Criigen (Comité de Recherche et d'Information Indépendantes sur le génie Génétique) dont Gilles-Eric Séralini est Président du Conseil scientifique.
Le gouvernement reconnait la validité de l'étude
Suite à la parution de cette étude, Marisol Touraine, ministre de la santé, Delphine Batho, ministre de l'écologie, et Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, ont immédiatement réagis.
"Le Gouvernement a pris connaissance des informations, rendues publiques aujourd'hui, sur l'étude menée par des chercheurs français, mettant en cause l'innocuité à long terme du maïs transgénique NK 603 sur les rats. Les conclusions de cette étude font l'objet d'une saisine immédiate de l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Elles feront également l'objet d'une analyse par le Haut Conseil des Biotechnologies. Elles seront également transmises en urgence à l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments. En fonction de l'avis de l'ANSES, le Gouvernement demandera aux autorités européennes de prendre toutes les mesures nécessaires en termes de protection de la santé humaine et animale, mesures qui pourront aller jusqu'à suspendre en urgence l'autorisation d'importation dans l'Union européenne du mais NK 603, dans l'attente d'un réexamen de ce produit sur la base de méthodes d'évaluation renforcées. Cette étude semble confirmer l'insuffisance des études toxicologiques exigées par la règlementation communautaire en matière d'autorisation de mise sur le marché de produits transgéniques. Elle valide la position de précaution prise par le Gouvernement français sur le moratoire des cultures OGM. Le Gouvernement demande aux autorités européennes de renforcer dans les meilleurs délais et de façon significative l'évaluation des risques sanitaires et environnementaux." précise ainsi un communiqué du gouvernement.
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a confirmé samedi, lors de la Conférence Environnementale, le maintien du moratoire sur la culture de semences génétiquement modifiées en France. Mais l'importation de certaines céréales génétiquement modifiées est cependant autorisée. Le maïs OGM NK603 est en effet aujourd'hui autorisé à l'importation en France et en Europe, où il est notamment utilisé dans l'alimentation du bétail.
La bombe est lâchée
Dés le 26 septembre, chacun pourra voir au cinéma le film choc de Jean-Paul Jaud, "Tous Cobayes ?", adapté du livre de Gilles-Eric Séralini (Flammarion), et les terribles images des rats étouffant dans leurs tumeurs. Des images qui vont faire le tour de la planète et d'internet. Elles ont déjà été diffusées sur Canal+ au "Grand Journal" ce 19 septembre et le seront encore sur France 5 le 16 octobre dans un documentaire.
Monsanto avait déjà estimé que les expériences menées par les chercheurs français avaient abouti à "des conclusions non fondées" et qu'aucune preuve n'avait été apportée de leur dangerosité sur la santé de l'animal ou de l'homme. Comment la firme américaine va-t-elle maintenant réagir à cette "bombe" ?
Stella Giani
(*)"Long term toxicity of a Roundup herbicide and a Roundup-tolerant genetically modified maize". Food and Chemical Toxicology, Séralini G.E. et al. 2012