A l'écoute de cet album funky gorgé de sample, difficile d'imaginer que le groupe qui produit cette musique puisse venir de Marseille. D'ailleurs, si les influences hip hop avaient été encore plus marquées, on aurait presque pu croire à un nouvel album du producteur californien Dj Shadow tant l'univers cinématographique est présent. Pourtant, Troublemakers, c'est Arnaud Taillefer, Lionel Corsini et Fred Berthet (ce dernier ayant quitté le groupe avant l'écriture de leur deuxième album "Express Way"). Tous les 3 ont produit ce disque dans leur home studio à la fin des années 90 avant d'inonder les labels américains de leur maquette fraichement réalisée (ils en ont contacté plus de 50). Beaucoup ne donneront jamais signe de vie, et ce sera finalement la maison de Chicago spécialisée en deep house classieuse Guidance qui les signera en 1999. Très attendu avant même sa sortie, cet album ne fera démentir personne et confirmera tous les espoirs de voir un groupe français gagner son titre de noblesse de l'autre côté de l'Atlantique. Le pari de parvenir à s'imposer chez eux était ambitieux, non pas que leur musique n'en ait pas la carrure (bien au contraire), mais force est de reconnaitre que rares sont les groupes qui réussissent à se faire une place dans ce milieu restreint et assez confidentiel de l'électro sophistiqué, qui plus est aux Etats-Unis, pays peu enclin par nature à s'intéresser à des productions étrangères. Maniaques du sampling et collectionneurs avisés spécialisés dans les bandes originales de films de ces 30 dernières années (la pochette est plus qu'explicite), les Troublemakers ont fait une entrée fracassante en 2001 avec ce disque "Doubts & Convictions" que je vous invite à découvrir aujourd'hui. Puisant leur inspiration au travers du parcours de chacun de ses membres, les productions sont bien léchées et judicieusement orchestrées. Soulignons tout de même que ces trois-là ne sortent pas de nulle part et ont appris à malaxer les sons et les formes depuis quelques temps déjà. Fred Berthet, producteur parisien installé dans la cité phocéenne, travaillait déjà sous d'autres pseudos, comme Venus Attack ou South Fork. Arnaud Taillefer, photographe, étudie la musique électroacoustique au conservatoire et apporte sa touche BO 70's et hip-hop. Le troisième larron, Lionel Corsini, a.k.a DJ Oil, arrose Marseille de downtempo et de funk 70's depuis 15 ans, en plus de performances avec des musiciens jazz ou afro (pour info son album solo "Black Notes" est paru en juillet). Résultat, un mélange de l'esprit des 70's auquel sont ajoutées des instrumentations live entre jazz et électro d'ambiance (claviers - guitares - sax - scratchs). Une association idéale et parfaitement gérée tout au long de l'album qu'eux mêmes qualifient avec humour de disque de piano bar.
Très soucieux de la qualité de leur travail et friands de belles mélodies, le perfectionnisme que s'impose ses membres est perceptible dès le premier morceau de l'album, "Street Preacher" (en écoute). Ce titre "patchwork" souligne assez bien le travail effectué par le groupe dans son esthétique bigarrée. Allant de surprise en surprise, on ne s'ennuie jamais et les découvertes vont bon train. Des interludes musicaux en guise de respiration ponctuent ce déferlement créatif d'une durée de 72 minutes (pour un premier essai, on peut dire qu'ils ne se sont pas moqués pas de nous), et l'on se laisse doucement bercer par cette variété de saveurs douces. Je vous le dis, ces gars-là ont tout pour vous plaire. Amazon iTunes Myspace