Pourquoi la Sainte-Croisade du mariage gay ?

Publié le 19 septembre 2012 par Rsada @SolidShell

Comme annoncé il y a quelques semaines, l’annonce prématurée du projet de Loi relatif à l’égalité des droits sur l’accès au mariage et à l’adoption des couples de même sexe n’a pas manqué de susciter les premières levées de bouclier.

Tombée un peu comme un cheveu sur la soupe, l’annonce de Christiane Taubira a réveillé les velléités de Sainte-Croisade sur le plan politique par Christine Boutin d’un côté, et sur un plan plus spirituel, celles de la communauté catholique emmenée par les Cardinaux André Vingt-Trois et Philippe Barbarin d’un autre côté.

En préambule de cette lutte du lobby catholique français, la Conférence des Évêques de France avait décidé de réserver la prière du 15 août dernier à la protection de la famille et de l’institution du mariage.

La première salve d’attaque a été portée par la présidente du Parti Chrétien-Démocrate Christine Boutin, qui a demandé au Gouvernement de programmer un référendum sur la question du mariage homosexuel, estimant que c’était aux français de décider d’une question qui chamboulera demain la politique familiale de notre pays. Elle ajoute à sa demande une possibilité d’objection de conscience pour les Maires ne souhaitant pas procéder à de telles unions.

La seconde salve, beaucoup plus violente, a été portée par le Cardinal Philippe Barbarin qui dénonce au travers de ce projet de Loi une « rupture de société » qui conduira à une « quantité de conséquences ». L’Archevêque de Lyon poursuit en dérapant lourdement lorsqu’il affirme que « Après, ils vont vouloir faire des couples à trois ou à quatre (NDLR : polygamie). Après, un jour peut-être, l’interdiction de l’inceste tombera » !

Selon moi, le fait marquant de ces diverses prises de position n’est pas tant dans le droit de chacun de livrer sa propre part de vérité. Nous l’avons déjà constaté par le passé, malgré la dureté de certains propos, le droit à la liberté d’expression n’est pas à géométrie variable lorsqu’il rentre pleinement dans le débat.

Non, le plus dérangeant dans la Sainte-Croisade qui s’engage aujourd’hui sur la question de l’égalité des droits, c’est cette volonté appuyée dans le langage à distinguer les minorités de la majorité. Lors des conversations, lorsqu’il est d’usage de ne plus citer la minorité que l’on souhaite pointer du doigt, il est devenu habituel d’employer le terme de « EUX » en opposition au « NOUS » symbole d’une immersion des minorités dans cette même majorité.

Que n’ont subi jadis les juifs de France en des temps pas si éloignés que cela ! Que subissent désormais nos compatriotes musulmans dès qu’est évoquée la possibilité de leur faire une place entière au sein de la communauté nationale ! Désormais, il appartient aux citoyens homosexuels d’être « distingués » de la communauté nationale par ce « EUX » significatif qui sous-entend un refus de ne pas épouser la « norme » moralisatrice.

Cet artifice du langage, profondément insultant au demeurant, permet à ceux qui contestent la visibilité effective de la diversité au sein de la société, de ne pas tomber dans le piège de la basique discrimination devenue un délit.

Une chose reste acquise depuis maintenant 100 ans et, au-delà d’une Laïcité protectrice, c’est qu’à chaque fois que les religions s’immiscent de près ou de loin dans un débat public, elles concourent à : déchainer les passions, exacerber haines et incompréhensions et contribuent à déstabiliser un peu plus une société déjà bien fragilisée.

Rappelons à tous et à toutes fins utiles, qu’en France les régimes matrimoniaux sont régis par la Loi Républicaine et non divine. Celle-ci s’applique sans restriction aucune à tous les citoyens ; et ce quelque soit leur croyance personnelle !

A la manière d’Ernest Renan : « L’homme fait la sainteté de ce qu’il croit comme la beauté de ce qu’il aime ».