“La Sicile serait la Grèce de l’Italie”, avait déclaré le maire de Palerme. Depuis le début de l’année, un vent de révolte souffle sur l’île, la laissé-pour-compte de l’Italie. Faillite, déficit, chômage pour certains, clientélisme pour d’autres. La Sicile est un paradoxe. Qui croire ? Ceux qui jurent que l’île est tragique. Ou ceux qui assurent qu’elle vit insouciante au temps ? Ceux qui proclament que l’omerta est la loi et l’accablement quotidien ? Ou ceux qui prétendent que les polars de Camilleri sont le miroir d’un pays bon vivant. Ici tout est vrai et faux. Mystère et rigolade. Ombre et lumière. Etat contre mafia. “Si tu veux comprendre la Sicile, n’oublie pas qu’elle est double”, m’avait-on raconté la première fois que j’ai mis les pieds sur cette île. Une île à l’état d’esprit parfois déroutant.
Et pourtant, pour beaucoup, la Sicile, c’est, en entrée, du soleil toute l’année, en entremets, des sites antiques et en plat principal, la chaise longue sous les palmiers. Pour les plus curieux, il est plutôt question d’un mille-feuille baroque, sarrasin, byzantin, gréco-romain. La Sicile est une de ces îles où nombreux sont venus et ont laissé leur empreinte : les Africains, les Grecs, les Romains, les Normands, les Allemands, les Espagnols. La Sicile est bel et bien ce dernier mini-continent où se mélangent encore l’Orient, l’Afrique et l’Occident. Et c’est bien là, au premier regard, une des valeurs les plus sûres de l’île. Ce mélange de couleurs et d’odeurs. Le charme décrépi des palais de Palerme. Les étals de fruits, de légumes et d’épices venus d’ailleurs. Une Sicile riche et pauvre à la fois.