Un accident, un roman, une revue.
Q400. - La carričre de pilote de Rebecca Lynne Shaw, ŤBeckyť pour ses amis, s’est brisée alors qu’elle n’avait que 24 ans. La jeune copilote de Colgan Air, 774 heures de vol, n’a pas survécu, en février 20009, au crash de nuit de son Q400 prčs de Clarence, dans l’Etat de New York. Un accident spectaculaire –ils le sont tous- mais qui a marqué les esprits, plus que d’autres, dans la mesure oů il a mis en évidence d’étonnantes faiblesses du transport aérien américain. Ce que pointe un nouvel ouvrage de la longue série ŤErreurs de pilotageť, dű au prolifique Jean-Pierre Otelli (1).
L’enquęte du National Transportation Safety Board a établi sans trop mal les raisons de l’accident : les mauvaises conditions météorologiques, le givre, une gestion inappropriée par l’équipage de la vitesse du biturbopropulseur et, surtout, la grande fatigue dont souffraient les deux pilotes. Et c’est sans doute lŕ que réside le pire : les trčs jeunes pilotes américains, qui commencent généralement leur carričre dans des compagnies régionales, sont trčs peu payés et ils le sont ŕ l‘heure de vol. Ce qui explique que Rebecca Shaw ait écarté l’idée de prendre quelques jours de congé alors qu’elle était fortement grippée. Un moindre mal si elle n’avait manqué de sommeil, sa base opérationnelle se trouvant …ŕ 3.900 kilomčtres de chez elle, c’est-ŕ-dire ŕ Seattle.
Son petit salaire ne lui permettant pas d’aller ŕ l’hôtel aprčs avoir rejoint la côte est ŕ la veille d’une prise service, elle n’hésitait pas ŕ chercher le repos dans une salle d’attente d’aérogare. La veille de l’accident, elle est partie de chez elle ŕ 15 h pour embarquer ŕ bord d’un DC-10 de FedEx. Aprčs une longue escale ŕ Memphis, elle est arrivée ŕ 6 h 23 du matin ŕ Newark. Il lui restait environ 7 h ŕ attendre avant de prendre son travail mais c’est en vain qu’elle a cherché ŕ prendre du repos dans une salle pilotes. Comment, dans ces conditions, assumer correctement ses responsabilités ? La suite du scénario est une énumération de manquements, ŕ commencer par le fait que le commandant de bord, au demeurant expérimenté, n’a pas apppliqué la méthode pourtant obligatoire du cockpit Ťstérileť. Ce qu’indiquera clairement la transcription du Cockpit Voice Recorder. Puis, pendant l’approche, le givre fera son œuvre. Le transport aérien américain a beau ętre mature, cité de exemple et pris pour référence dans le monde entier, il est donc loin d’ętre parfait.
Jean-Pierre Otelli, avec une certaine audace, établit un rapprochement entre le crash du Q400 de Colgan et celui, survenu quelques mois plus tard, de l’A330 du Rio-Paris AF447 d’Air France : Ťle givrage est ŕ l’origine d’un problčme mineur qui déstabilise gravement l’un des pilotes. Celui-ci réagit en mettant lui-męme l’avion en situation de décrochage par une action disproportionnée ŕ cabrerť.
Toutes autres considérations mises ŕ part, l’accident de Colgan a fait grand bruit en męme temps qu’il a réveillé les consciences. Jean-Pierre Otelli a raison de le faire mieux connaître, en męme temps que d’autres cas de figure qui méritent l’attention de la communauté de la sécurité aérienne.
Glace et neige. – C’est un roman d’aviation qui a le mérite d’une grande originalité, construit autour d’un avion solaire hypothétique qui fait penser ŕ l’Akoya de Lisa Airplanes (2). Le récit va conduire la fręle machine jusqu’ŕ la calotte glacičre, sur base d’une intrigue bien menée. Les auteurs, Thierry Vigoureux et Anne Réale, nous offrent un bon bouquin, une occasion rare de quitter momentanément les soucis de l’actualité sans tourner pour autant le dos ŕ l’aviation.
Quarante ans de révolutions. – Le Fana de l’Aviation publie un fort numéro hors-série consacré ŕ Ť40 ans de révolutions aéronautiques, 1970-2012ť riche en articles de synthčse dus ŕ la plume alerte de Michel Bénichou. Un bon document, qui bénéficie d’une iconographie trčs riche réunie par Jacques Guillem.
Pierre Sparaco - AeroMorning
(1) Editions Atipresse
(2) Pascal Galodé Editeurs