Le successeur de l’A320, susceptible d’entrer en service vers 2035 ou 2040, existe déjŕ dans l’imagination d’ingénieurs et scientifiques allemands : il s’appelle le Ce-Liner, il est tout électrique et sa capacité est de 189 places. Sa ligne est élégante, résultat d’une aérodynamique trčs élaborée. Et, grâce ŕ la propulsion électrique –sur laquelle on est impatient d’en savoir davantage- c’est un avion qui n’émet pas le moindre gramme de CO2. Le ręve des écologistes devenu réalité, sur papier tout au moins. D’autant que ses concepteurs pensent aussi ŕ des procédures opérationnelles novatrices.
Il est difficile de placer le Ce-Liner dans son juste contexte. Il est en effet censé représenter la vision d’Airbus de l’avenir, Charles Champion, directeur général technique de l’avionneur européen en vante les mérites avec conviction. Mais ce projet audacieux ne sort pas de travaux menés par le bureau d’études de Toulouse ou Hambourg mais de celui de Bauhaus Luftfahrt, en Allemagne. C’est plus qu’un Ťthink tankť dans la mesure oů les travaux qui y sont menés par trente-cinq ingénieurs et scientifiques cherchent ŕ construire des passerelles entre théorie et pratique.
Créé en 2005, Bauhaus Luftfahrt, comme son nom de l’indique pas, appartient ŕ EADS Deutschland, Liebherr Aerospace, MTU Aero Engines, le ministčre bavarois des affaires économiques, des transports et de la technologie. Un quatuor rejoint au début de cette année par le pôle technologique IABG. Il s’agit donc d’un groupe de travail purement allemand, ce qui déroute quelque peu l’observateur dans la mesure oů une telle démarche ne correspond pas tout ŕ fait ŕ l’air du temps. D’autant qu’il est question ici d’EADS Deutschland, une notion que l’on croyait dépassée.
Cette restriction de pure forme étant énoncée, force est de constater que Bauhaus Luftfahrt explore des voies nouvelles qui sont prometteuses, audacieuses, sans que l’on sache si elles sont tout ŕ fait réalistes. Mais, ŕ n’en pas douter, l’originalité est au rendez-vous. On note, par exemple, un souhait de traduire dans les faits des maničres de faire opérationnelles qui, pour l’instant, se limitent ŕ des propos académiques. Rien n’empęcherait en effet de généraliser les approches longues, sans paliers successifs, permettant une descente moteurs au ralenti, sans décibels inutiles : il y a lŕ une évidence, non scientifique, dont on se demande pourquoi elle reste lettre morte.
Plus inattendue, voici que sort du chapeau le principe du vol en formation, en croisičre, pour obtenir une diminution de l’énergie cinétique dépensée en pure perte. Comme des pilotes de Formule 1, ceux des avions se placeraient dans le sillage de l’appareil qui les précčde… En réduisant l’espacement ŕ 1.850 mčtres, la consommation de carburant pourrait ętre diminuée de 10 ŕ 15%.
L’essentiel, par ailleurs, serait de faire appel ŕ du carburant issu d’énergies renouvelables et, surtout, l’énergie électrique, sur des bases qui demandent ŕ ętre précisées. Est-ce une Ťwish listť ou un programme de travail pour les deux prochaines décennies ? La question vient inévitablement ŕ l’esprit, la réponse, pour le moment, est encore trčs floue. Tout bien réfléchi, le but ŕ atteindre est bien connu, le moyen d’y arriver ne l’est pas. Et ce ne sont sans doute pas 35 chercheurs allemands qui changeront ŕ eux seuls la face du monde aérien. Mais il ne leur est pas interdit pour autant de nous faire ręver ŕ des lendemains meilleurs.
Pierre Sparaco - AeroMorning