Deveney – Domas © Akileos – 2012
En ce jour d’automne, Noémie se rend chez ses grands-parents paternels. Habituellement, elle ne vient ici que pour les vacances d’été. Mais aujourd’hui est un jour de tristesse. Son grand-père vient de mourir et le paysage de ses vacances prend un tout autre visage. Les rires et les jeux ont laissé la place à la tristesse et aux larmes.
Le soir de l’enterrement, Noémie a du mal à trouver le sommeil. Les multiples petits craquements de la maison, habituellement silencieuse, attire l’attention de l’enfant. Elle a pourtant perdu l’habitude de se blottir contre un doudou mais ce soir-là, elle ressent le besoin d’avoir Mister Piggs à ses côtés. Une voix, portée par le vent, la réveille en pleine nuit. Sur l’invitation de Piggs qui a pris vie, Noémie va le suivre dans un pays imaginaire. Devenue ambassadrice d’un rêveur en péril, sa quête va la conduire par monts et par vaux dans un éprouvant combat contre une créature malfaisante.
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Il est temps de prendre la clé des songes.
Cette réplique de Piggs conclut le prologue. La partie introductive – d’une vingtaine de pages – est ancrée dans la réalité ; elle laisse ensuite la place au voyage et à la quête de la jeune fille. Dès lors, les repères habituels se tordent pour laisser place à de nouveaux paysages et des rencontres atypiques. Comme la petite Alice, Noémie ne reculera pas devant le danger et l’inconnu. Portée par son désir de venir en aide à un rêveur en détresse, elle accepte de s’enfoncer toujours plus loin dans cette épopée. Piggs sera son guide principal. Comme le lapin blanc dans Alice au pays des merveilles, cet individu a la lourde tâche de transmettre les codes de ce nouveau monde. Le duo va ensuite accueillir un jeune Prince qui, à mesure que le récit se développe, rajeunira. Enfin, un dernier compagnon complète cette équipe de courageux aventuriers ; il s’agit du Chevalier Mulhot (un rongeur). Tous quatre vont unir leurs forces pour combattre l’Estompe, mystérieuse créature des ténèbres. La présence de ce personnage donnera également tout son sens (propre et figuré) au titre de l’ouvrage…
…qui développe un monde remplit de magie et de légendes.
Tatiana Domas donne vie à un univers somptueux. Le trait est minutieux, les couleurs chatoyantes. Seul grief que je pourrais émettre sur la partie graphique : les expressions sont parfois trop figées, ce qui casse le rythme et le lyrisme du récit. Nous sommes-là face à une épopée d’héroïc-fantasy qui s’adresse à un lectorat que je ciblerais sur les 8-12 ans. Tous les ingrédients y sont présents : la quête, le groupe de personnages hétéroclites, le Roi et la Princesse, le Mal, la Magie.
Dans l’ensemble, j’ai alterné des temps de lecture où j’étais totalement prise par l’histoire et d’autres moments où j’étais simple spectatrice. A plusieurs reprises, j’ai été contrariée par le fait que les enchainements entre les scènes ne sont pas suffisamment construits. Puis, passée la page 50, tout se bouscule, les solutions arrivent trop vite et s’imposent sans être réellement argumentées. Pris par l’action, les personnages interagissent indépendamment de l’histoire et intègrent à leur logique des éléments narratifs qui n’avaient pas été portés auparavant à la connaissance du lecteur.
Je n’ai pas proposé cette lecture à Monsieur Lutin. Malgré le voyage que m’a offert cet ouvrage, je reste cependant dans l’expectative quant à son dénouement… pour le moment, je ne saurais le rendre accessible à mon fils. Pourtant, la réflexion qu’il sous-tend est pertinente. Voici ce que l’éditeur en dit : « Le Royaume d’Estompe est un récit qui, à travers le conte et l’onirisme, aborde le thème du deuil et de ce qui fait que l’on continue à vivre, alors que ceux que l’on aime ont disparu ».
En conclusion, il me semble que quelques pages supplémentaires, aux 68 pages consacrées à ce récit, auraient été les bienvenues. Peut-être aurait-elle permis que le scénariste s’attarde davantage sur certains éléments narratifs pour permettre au lecteur de s’imprégner totalement de cet univers et de ses protagonistes.
Extrait :
« Au cimetière, l’automne était partout. Dans les branches, les racines et sur les visages. Et tandis que je l’admirais, je me demandais comment on pouvait être si triste au milieu de tant de beauté » (Le Royaume d’Estompe).
Je remercie les Éditions Akileos pour la découverte.
Le royaume d’Estompe
Récit complet
Éditeur : Akileos
Dessinateur : Tatiana DOMAS
Scénariste : Jean-Christophe DEVENEY
Dépôt légal : septembre 2012
ISBN : 978-35574-113-5
Bulles bulles bulles…
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