Éditeur : Buchet Chastel - Date de parution : Septembre 2012 - 203 belles pages avec beaucoup de pudeur!
Enfant, Claire se rend à Paris pour le salon de l’agriculture. Devenue bachelière, cette fille de paysans du Cantal est acceptée à la Sorbonne pour des études littéraires. La jeune fille rencontre un nouveau monde, un nouveau pays qui lui est inconnu et où la culture lui fait défaut. Parmi tous ces étudiants, elle se sent souvent mal à l’aise. Après des mois où elle jetait chaque jour ses jeunes forcesdans la lutte des études qui étaient sa guerre, elle décroche sa première année, poursuit ses études et finit par s’installer dans cette ville. Claire s’est construite avec ce mélange de deux mondesoù elle a trouvé un équilibre.
Claire connaît la dureté et les difficultés du travail de ses parents. Un monde agricole avec le couteau sous la gorge, des heures de travail non comptées et des interrogations sur l’avenir de la profession. A la Sorbonne, elle découvre, apprend ce que d’autres étudiants connaissent par leur milieu social. Gêne et honte se font sentir. Et il y a Paris. Une vie dont elle ne profite pas, un endroit qui ne lui appartient pas. Avecla peur de redoubler et de perdre la bourse qui lui permet d'étudier. Petit à petit, elle prend ses marques, apprivoise cette ville sans pour autant oublier d’où elle vient. Ses origines sont ancrées en elle. Indélébiles. Et ce sont autant d’odeurs, d’environnements différents qui lui rappellent son Cantal et la ferme familiale. Chez Marie-Hélène Lafon, le mot paysan n’est pas dénigré mais employé avec respect et fierté. J’ai doublement aimé ce livre car je me suis retrouvée dans ce personnage de Claire. Sans tout raconter, les dernières pages sont particulièrement émouvantes. Claire devenue adulte reçoit son père et son neveu quelques jours chez elle. Les pensées, les sentiments du père et sa fille sont décrits avec une justesse incroyable. Un père qui ne comprend pas mais admet leurs vies différentes.
Soit on aime l’écriture de cette auteure, soit c’est l’inverse et on peut avoir l’impression d’être enseveli par ce ruisseau de mots. Il faut prendre son temps pour s’imprégner de la richesse déployée par l’envergure stylistique (certains diront pompeux ou ennuyant, pas moi) car comme dans l’annonce, l’écriture se joue des codes et de la ponctuation. Un livre sur les origines, sur le monde paysan (avec un hommage et un amour qui saute auxyeux et prend à la gorge), sur la construction identitaire et où une forme de pudeur se ressent dans chaque phrase !
Le billet de Mimipinson