Alix Senator – T1 : Les aigles de sang

Publié le 16 septembre 2012 par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

12 ans avant Jésus-Christ. Lepidus, grand pontife de Rome, et le général Agrippa meurent tous deux éventrés par un aigle géant. S’il ne s’agit pas de Jupiter en personne venu se venger, qui commande ces rapaces et dans quel but ? Alix, cinquantenaire et Sénator enquête discrêtement..

Scénario de Valérie Mangin, dessin de Thierry Démarez

Public conseillé : Adulte et adolescent

Style : Aventure Historique Paru chez Casterman, le 12 Septembre 2012 Share


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Le concept

Rarement une Bd avait été autant promue avant sa sortie. Près de 6 mois avant sa parution, Alix Senator a fait l’objet de teasers video et de nombreuses annonces dans la presse. C’est dire si Casterman suit avec intérêt cette modernisation de son fond de catalogue. La série Alix, avec ses 31 albums fait partie du fond patrimonial de la BD européenne. Il a fallu une audace certaine à Valérie Mangin, Thierry Démarrez et Denis Bajram (Directeur artistique sur le projet) pour tenter cette nouvelle version de l’icône “Alix”. Pour consommer cette rupture avec le personnage de Jacques Martin, ils ont inscrit cette histoire dans un contexte radicalement différent : Alix a 55 ans et en tant que proche d’Auguste, est devenu Senateur. Exit l’éphèbe niaiseux. Voilà l’homme mûr, sûr de lui et de son pouvoir.

L’histoire

12 ans avant Jésus-Christ. Il ne fait pas bon être trop proche du pouvoir suprême dans la Rome des Caesars. Le puissant Auguste vient de se faire élire Imperator (Empereur). Un timing parfait, car son dernier rival, Lepidus, grand pontife de Rome, meurt attaqué sauvagement par des aigles aux serres d’or (symbole de Jupiter et de Rome). On pourrait soupçonner Auguste d’en être l’auteur, mais le général Agrippa, son frère, ami et soutien de toujours, meurt lui aussi dans les mêmes circonstances peu de temps après.
Alarmé par ces événements, Auguste désigne son vieil ami le sénateur Alix Grachus pour enquêter discrètement. Pressentant qu’il s’agit de l’œuvre d’un maître fauconnier, et d’une vengeance politique, Alix enquête, accompagné de ses 2 fils Titus et Khephren. Malgré les progrès de l’enquête, le danger s’approche dangereusement de l’empereur.

Ce que j’en pense

Pas de doute ! Cette adaptation et modernisation d’un personnage traditionnel, d’une icône, est une réussite. Et pourtant, honnêtement, je craignais le pire. Dans le même registre, les tentatives sur Spirou connurent pas mal d’errements avant de trouver la bonne distance. Dans Alix Senator, Mangin a trouvé le ton juste du premier coup. En viellissant le personnage, et en le responsabilisant socialement et humainement (père et sénator), elle rajeunit l’image de cette icône un peu ringuarde qui ne parle plus à la nouvelle génération. Autre avantage : En plaçant son récit 30-40 ans plus tard, elle laisse de côté les histoires de jeunesse du héros et change de contexte historique (très riche). Ce qui ne l’empêche pas de se servir, avec beaucoup de liberté et de finesse, d’événements décrits dans de précédents albums (par exemple La mort d’Enak, le compagnon d’Alix).



Une Rome moderne

Dans Alix Senator, Mangin et Démarez présentent une Rome antique, conforme à notre vision actuelle, et très éloignée des poncifs hollywoodiens des années 50/60. Comme dans les romans de Steven Saylor, ou la série Rome (HBO), et plus lointainement la série Murena de Dufaux et Delaby, la ville et les romains sont très contemporains dans leurs préoccupations, et leur vie courante. Ce qui facile grandement l’identification.
Valérie Mangin travaille la personnalité de ces personnages sans manichéisme et avec une complexité toute humaine. Attentive au contexte historique, Elle a choisi une époque particulièrement dense pour placer son récit. Période charnière de la restauration de la république, c’est un temps où tout peut encore basculer.
En mélangeant histoire personnelle et destin de Rome, elle se place dans la tendance actuelle des récits historiques. Visiblement très documentée, elle mélange habilement histoire réelle et fiction, avec peu de “rustines historiques”.
Le scénario de Valérie, s’il n’est pas profondément orginal : meurtre-enquête-danger-résolution est parfaitement maîtrisé. En 48 pages, elle déroule son récit, et le contexte historique avec facilité, en finissant le tome par un “cliffhanger” de toute beauté. Moi, j’attends avec impatience le second tome.

Coté graphique

Thierry Démarez et Valérie Mangin n’en sont pas à leur première collaboration. Dessinateur réaliste, aussi à l’aise sur les personnages que dans les décors, il est à l’origine avec Valérie de la série “Le dernier Troyen”. Autant dire que le style “antique” ne lui est pas vraiment inconnu.
Pour Alix Senator, Thierry Démarez est dans la même logique que Valérie. Complété par la Direction Artistique de Denis Bajram (compagnon de Valérie Mangin, et auteur de la série “Apocalypse Now”), il croque un Alix moderne, plongé dans une Rome populeuse, dense et sale. C’est un grand coup de jeune par rapport à l’œuvre de Martin. Très attentif au réalisme architectural de la ville eternelle (Merci à Gille Chaillet pour son livre référence “la Rome des Césars”), Démarez représente une Rome antique parfaitement crédible.

Pour résumer,

Accompagnez Alix, sénateur vieillissant, dans une aventure de tout danger. Valérie Mangin, Thierry Démarez et Denis Bajram ont réussi un coup de maître : rajeunir un héros “ringard”, et nous donner envie de vivre avec lui de nouvelles aventures antiques et modernes à la fois.


NB : si vous voulez en voir plus, n’hésitez pas à acheter le tirage limité (18,95 euros) contenant un beau cahier graphique et historique additonnel et un dos toilé rouge du plus bel effet.
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