Le FMI, vous connaissez? Nous parlons bien sûr de l’institution, et non des frasques-crime?- de son ancien président, bon vent à lui.
Le Fonds monétaire international est une institution internationale créé en 1944 regroupant 185 pays, dont le rôle est de – accrochez-vous- « promouvoir la coopération monétaire internationale, de garantir la stabilité financière, de faciliter les échanges internationaux, de contribuer à un niveau élevé d’emploi et à la stabilité économique et de faire reculer la pauvreté. ».
Le FMI assure donc la stabilité du système monétaire international et la gestion des crises monétaires et financières. Pour cela, il fournit des crédits aux pays qui connaissent des difficultés financières telles qu’elles mettent en péril l’organisation gouvernementale du pays, la stabilité de son système financier (banques,…), ou les flux d’échanges de commerce international avec les autres pays.
Lors d’une crise financière, pour éviter qu’un pays ne fasse « faillite » (c’est-à-dire que ce pays ne puisse plus payer ses dépenses primordiales, comme le paiement des fournisseurs ou des salaires des fonctionnaires), le FMI lui prête de l’argent le temps que la confiance des agents économiques revienne. Le FMI conditionne l’obtention de prêts à la mise en place de certaines réformes économiques.
Parfait. Tout va bien. Le FMI est l’ami des pauvres.
Mais en réalité, son rôle est contesté de plus en plus. Comme celui de L’Onu (que peut-on sérieusement attendre d’elle alors que les membres du conseil permanent sont les premiers exportateurs mondiaux d’armes- USA, Chine, Russie, France, Royaume-Uni) et la Banque Mondiale (voir article).
Mais le mieux est de laisser la parole à Peter Doyle qui a travaillé au FMI pendant 20 ans et qui a démissionné de cette honorable institution en juin dernier. Voici la lettre de sa démission.
Département Européen
Washington DC
18 juin 2012
À M. Shalaan, doyen du conseil d’administration du FMI
Aujourd’hui, je me suis adressé au conseil d’administration pour la dernière fois – parce que je quitte le FMI.
Par conséquent, je souhaite en premier lieu exprimer formellement ma profonde gratitude pour les autorités Suédoises, Israéliennes et Danoises avec lesquelles j’ai récemment travaillé, ainsi que pour toutes les autres avec qui j’ai travaillé auparavant, pour leur extraordinaire amabilité à mon égard.
Mais je souhaite également saisir cette opportunité pour expliquer les raisons de mon départ.
Après vingt années de service, j’ai honte d’avoir été associé au FMI.
Ce n’est pas seulement à cause de l’incompétence qui a été partiellement décrite dans le rapport du Bureau de la vérification et de l’inspection internes (OIA) au sujet de la crise mondiale et dans la Revue triennale de la surveillance (TSR) sur la crise de la zone Euro. Mais c’est surtout parce que les causes essentielles de ces crises, comme cela a déjà été le cas pour d’autres, ont été identifiées largement en amont mais ont été étouffées par le FMI. En raison des longues périodes de gestation et des processus internationaux de décision prolongés pour faire face à ces deux défis mondiaux, il était essentiel que nous émettions à temps des avertissements soutenus. Par conséquent, l’échec du FMI à les émettre est un échec de premier ordre, quand bien même des telles mises en garde auraient pu être ignorées. Ceci a pour conséquences que beaucoup, y compris la Grèce, souffrent (et risquent bien pire à l’avenir), que la deuxième monnaie mondiale de réserve est au bord du gouffre, et que le FMI a passé les deux dernières années à courir après les évènements durant les ultimes efforts visant à la sauver.
De plus, les raisons qui ont directement causé ces défaillances du système de surveillance du FMI, à savoir la répugnance à prendre des risques, les priorités bilatérales et le parti-pris Européen, deviennent au contraire de plus en plus profondément enracinées, en dépit d’initiatives qui visent à s’en occuper. Ceci est particulièrement clair dans le cas des nominations au poste de Directeur Général, choix qui au cours des dix dernières années, ont été bien évidemment désastreux. Même la directrice en exercice est entachée, car ni son sexe, ni son intégrité, ni son ardeur ne peuvent compenser l’illégitimité fondamentale du processus de sélection. Dans une institution aussi hiérarchique, les implications de tels choix contaminent directement les niveaux supérieurs de la direction et, à travers les recrutements, les contrats de mission, la préparation de la succession du personnel de grades supérieurs, ces implications en arrivent à se diffuser dans l’ensemble de l’organisation, écrasant tout le reste. Le comité exécutif préfère un FMI handicapé, soumis à ces défaillances du système de surveillance. Je regrette de ne pas avoir su il y a vingt ans que tel serait le choix.
Il y a des personnes de qualité ici, parfois caustiques. Mais celle qui rédige ces lignes s’en va. Vous devriez vous préoccuper de ne pas perdre les autres.
Bien cordialement.
Peter Doyle
(Conseiller économiste du Département Europe et ancien chef de la division Suède, Israël et Danemark)
Copie :
Mme. Nemat Shafik
M. Stanley Fischer
M. Stephan Ingves
M. Benny Andersen
M. Alex Gibbs
M. Eric Meyer
M. Amit Friedman
M. Martin Holmberg
M. Reza Moghadam
M. Mark Plant
M. Brad McDonald
Source: Okeanews
Téléchargez la lettre: peter-doyle-lettre-demission (1)