« Je le dis à François Hollande et à Jean-Marc Ayrault. Alors même que la cour de Karlsruhe n’a pas encore délibéré, pourquoi nous précipitons-nous pour ratifier ce traité ? Attendons !» La salle plénière de l’université d’été du PS se gonfle d’applaudissements.
Des «bravo» fusent dans les travées pour accueillir la sortie d’une Marie-Noëlle Lienemann presque à bout de souffle. Le Premier ministre ne veut pas d’un débat qui affaiblirait, dit-il, la majorité. Pourtant cette ovation montre, à elle seule, que la base du Parti socialiste voit d’un très mauvais œil le TSCG (le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance) élaboré conjointement par Merkel et Sarkozy, et qu’elle attend ce débat. Et ce, bien qu’Hollande ait fait ajouter un petit supplément de croissance au texte initial.
Mais ils ne sont qu’une poignée de responsables PS à oser dire tout haut leur désaccord. Aux côtés de la sénatrice de Paris, on trouve quelques courageux, tous membres de l’aile gauche du parti, comme les députés Razzy Hammadi et Jérôme Guedj. «Si nous ne portons pas ce débat, il va être externalisé, explique ainsi ce dernier, Et il va se dérouler avec les mots de Jean-Luc Mélenchon.»
Au final, une vingtaine de députés issus de la motion C du congrès de Reims pourraient ne pas voter le traité à l’Assemblée. En Allemagne, 23 membres du pourtant très sage SPD ont déjà refusé le texte.
«Impossible de voter contre»
Mais Benoît Hamon, le chef de file de cette même aile gauche, et désormais ministre délégué à l’Economie sociale, lui, l’a défendu dans les colonnes de Sud Ouest, nuançant à peine son propos sur le thème : «Cet accord n’est que le premier acte d’une réorientation de la construction européenne.»
Solidarité gouvernementale oblige… De quoi déstabiliser ses petits camarades, qui observent que celui qui avait porté à Reims son courant à 18 % des suffrages hésite encore à déposer un texte au prochain congrès du parti à Toulouse. Cinglant, un hamoniste considère qu’actuellement «il ne se comporte pas comme le leader de la gauche du parti».
Du côté d’Arnaud Montebourg, qui avait su cristalliser une partie des attentes des militants de l’aile gauche autour de sa candidature lors de la primaire, la déception est aussi très grande. Ceux qui ont oeuvré à ses côtés ne reconnaissent plus vraiment l’homme qui se gargarisait de «démondialisation» et de «protectionnisme» lorsqu’ils l’entendent expliquer, aujourd’hui, qu’«il est impossible de voter contre» le traité…
Article publié dans le n°802 du magazine Marianne, daté du 1er au 7 septembre 2012.