A la faveur d’une nouvelle rencontre Versailles Intime, nous avons retrouvé Jean-Paul Gousset, directeur technique de l’Opéra royal, pour une visite placée sous le signe du divertissement. Marchant dans les pas de Marie-Antoinette sur les terres de son domaine de Trianon, il s’agissait en effet pour nous de découvrir comment la Reine, au milieu de ses proches, se mettait en scène dans son Petit Théâtre.
Après avoir visité parcouru le premier étage et l’entresol du Petit Trianon, en passant par des pièces comme le salon de Compagnie où Marie-Antoinette aimait retrouver ses amis pour jouer de la musique, nous avons emprunté la charmille du Jardin Anglais, un ravissant passage arboré menant à l’entrée du Petit Théâtre. De dehors, l’édifice ne laisse entrevoir ni même présager aucune des merveilles se trouvant à l’intérieur. Pourtant une fois la porte franchie, l’ahurissante beauté de la salle toute de bleu, de blanc et d’or s’impose avec triomphe.
Nous sommes restés un moment silencieux, nous imprégnant au maximum de l’essence de ce lieu magique. Puis Gousset nous a invité à nous installer sur les jolis bancs du parterre, avant de nous confier l’histoire singulière de ce théâtre de société, l’un des plus beaux d’Europe qui soit encore en état de fonctionner :
C’est en 1780 que Marie-Antoinette inaugure ce petit théâtre privé, commandé quelques années auparavant à l’architecte Richard Mique. Le luxe de la salle n’est qu’apparence, cette dernière étant en réalité peinte de faux marbre blanc et ornée de sculptures en carton-pâte. Seules les deux torchères, situées de part et d’autre de la scène, ne sont pas en carton mais en plâtre, feignant avec brio d’être du bronze.
Passionnée de théâtre depuis l’enfance, Marie-Antoinette sélectionne des pièces légères d’auteurs à la mode (Sedaine, Beaumarchais, Rousseau…), s’éloignant des oeuvres classiques interprétées à l’Opéra royal. Elle joue pour elle-même, aux côtés de ses intimes, le Comte de Provence, le Comte d’Artois, Madame de Polignac ou la Princesse de Lamballe. Le cercle auquel elle réserve la primeur de ses représentations étant très restreint, il n’est pas rare que l’on demande aux domestiques de venir combler les rangs vides du théâtre. Ce sont donc ces derniers qui l’applaudissent lorsqu’elle s’amuse à jouer des rôles de servantes ou de fermières !
Les décors de toile peinte ayant servi aux représentations de Marie-Antoinette – un décor de forêt et un intérieur rustique, existent toujours. Ils ont été restaurés récemment et s’actionnent à vue grâce à des cordes de chanvre, des treuils et des poulies situées dans les cintres et les dessous. Au dessus du décor, la force de trois hommes est nécessaire pour lever le rideau et changer la toile de fond. Sous le plateau, autant de machinistes font apparaître ou disparaître les châssis situés à gauche et à droite de la scène. Nous avons eu la chance de voir ces décors se mouvoir, Jean-Paul Gousset les ayant fait apparaître pour nous les uns après les autres, avant que nous le rejoignions sur scène, foulant du pied les mêmes planches que l’illustre souveraine.
Là, il a évoqué les trésors d’ingéniosités requis pour éclairer correctement la scène et la salle qui pouvait accueillir jusqu’à cent personnes au parterre, au balcon et derrière les loges munies de grilles. Au XVIIIe siècle, on ne faisait jamais le noir total, c’est pourquoi l’on devait utiliser de très nombreuses et coûteuses bougies de cire, un luxe que seule la famille royale pouvait s’offrir… 232 années se sont écoulées depuis l’inauguration du Petit Théâtre de Marie-Antoinette et même si le temps a fait son oeuvre, l’émerveillement reste intact et à jamais renouvelé.
Photos Fanny G. © roughdreams.fr
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http://www.chateauversailles.fr/homepage
Le secret du théâtre de Marie-Antoinette à Versailles, à écouter ou à télécharger sur France Culture: http://www.franceculture.fr/emission-secret-professionnel-le-secret-du-theatre-de-marie-antoinette-a-versailles-2011-12-31
Un très bon reportage en 5 parties consacré au Petit Théêtre de Marie-Antoinette sur YouTube: http://youtu.be/xNt2oDv3iMk (1/5)
Remerciements chaleureux à Diane Drubay de Buzzeum et l’équipe marketing/nouveaux médias du Château de Versailles.