On l'a défendu, on le défendra sans doute encore. Manuel Valls applique une feuille de route qui est celle du candidat Hollande pendant la campagne.
Mais voici que le feuilleton Roms déborde de l'actualité estivale pour plonger dans la rentrée. Et l'on se désespère que cette (triste) actualité ne débouche toujours que sur des échanges feutrés et sans profondeurs.
Avec un plaisir cynique, les journalistes répètent les mêmes questions (sur Nicolas Sarkozy, l'inquiétude européenne, ou l'intégration). Mardi 11 septembre, Jean-Jacques Bourdin, sur RMC-BFM TV lui a ainsi rapporté l'inquiétude de la Haute commissaire aux droits de l'Homme de l'ONU sur la situation des Roms en France.
Valls reste ferme sur sa politique menée envers... par BFMTV
Invariablement, le ministre répond toujours de la même façon, avec les mêmes arguments: fermeté et respect des populations, un diptyque qui fait sens mais cache désormais l'essentiel: la réalité du terrain.
Ces échanges, qui pouvaient presque suffire lorsque le sujet des démantèlements de camps illicites de Roms fut une première fois posée vers la fin du mois de juillet, nous paraissent usant, vains et creux.
Les questions devraient être plus précises. Les réponses tout autant.
On sait parfaitement que les retours volontaires (ou non) des Roms de nationalité roumaine ou bulgare ne servent pas à grand chose. Leur efficacité est toujours mise en doute - avec autant de force que sous Nicolas Sarkozy. Dimanche dernier, François Hollande a eu beau jeu de rappeler que le quinquennat précédent n'avait rien résolu. Sarkozy a subi le déshonneur (le discours de Grenoble et la théâtralisation de la traque aux Roms), sans l'efficacité.
On sait que les gouvernements Sarkozy ont échoué sur ce terrain comme sur d'autres. Mardi, Valls a promis 7.000 retours aux pays. Les anciens Sarko-fans sont coincés. Valls les privent d'un argument de campagne, une instrumentalisation facile, l'accusation facile de laxisme contre la gauche. Il n'y avait plus que l'octogénaire patron du Figaro pour louer l'action du ministre de l'intérieur. Il avait au moins cette honnêteté que d'autres n'ont plus depuis longtemps.
On sait aussi que les démantèlements ne s'accompagnent pas de solutions d'intégration ou de logement adéquats. Qu'une solution européenne serait préférable. Valls et son collègue Bernard Cazeneuve (ministre chargé des affaires européennes) sont d'ailleurs partis en Roumanie ce mercredi.
On sait que la plupart des campements sont insalubres (cf. celui de Villeneuve-le-Roi détruit ce même 11 septembre au matin), voire dangereux; que les communes se réjouissent rarement à la perspective d'accueillir des campements.
On sait aussi que les Roms sont loin d'être les seuls à être logés dans des conditions insalubres. Il y a quelque 3 millions de Français mal logés, la plupart dans des conditions insalubres.
Mardi, Valls a explicitement cité les termes de Michel Rocard: « Aujourd'hui, nous ne pouvons pas nous permettre d'accueillir toutes ces populations qui sont souvent des damnés de la Terre, qui sont pourchassées dans leur pays, qui sont discriminées. (...) La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde et de l'Europe ».
Qui prétendrait le contraire ? Là n'est plus le sujet.
Le sujet, le vrai, est de savoir si des
solutions de logements salubres sont en cours d'identification; si des conditions d'intégration peuvent être enfin envisagées; si les effets de zèle policier ou municipaux peuvent cesser;
Bref, peut-on enfin discuter sereinement ?