La lecture est d'autant plus fastidieuse qu'au point de vue graphique, l'auteur a choisi d'utiliser plusieurs couleurs, qui se succèdent, symbolisant les différentes époques, les différentes émotions, les différents personnages... Les cases ne s'enchaînent pas toujours de manière instinctive, écartelées entre la page de gauche et celle de droite.
Visuellement, cela reste magnifique. Mais ça demeure également très confus parfois.
Ceci dit, nous suivons l'évolution émotive et mentale de GB Tran relativement à ses racines, qu'il renie au départ pour finalement s'y intéresser et décider d'en faire cet album.
Les remerciements à la fin de l'ouvrage ne laissent aucun doute sur son implication dans ce travail de mémoire.
«Faire ce livre m'a brisé le cœur... Ma plus profonde gratitude va à Stephanie qui a su le panser.»À la lecture de ce roman graphique, on ne doute pas un instant que ces destins tragiques, ces familles brisées par la guerre et la prise de conscience du passé de sa famille ont dû toucher l'auteur, comme ils touchent malgré tout le lecteur.
Le site de l'auteur
Les cahiers russes [La guerre oubliée du Caucase], Un récit-témoignage d'Igort, Éditions Futuropolis, 2011Prix de la Mémoire du Holodomor 2011, ParisLivre de l'année au festival de Treviso, 2011Prix spécial du Jury au festival de Naples, 2011
Déjà auteur des Cahiers ukrainiens, Igort est un amoureux de la culture slave.
Le roman graphique Les Cahiers russes s'inspire de la journaliste Anna Politkovskaïa, qui a été assassinée le 7 octobre 2006 parce qu'elle dénonçait les abus du gouvernement russe. Dans ce récit coup de poing, où le texte occupe une place importante, aucun détail terrifiant ne nous est épargné, depuis le modus operandi de l'assassinat de la journaliste jusqu'aux atrocités subies par les Tchétchènes dans les salles de torture. Mais aussi, l'horreur psychologique vécue par certains soldats russes à qui l'on demande de commettre l'irréparable et qui ne se remettront jamais de ce qu'ils ont dû faire, et surtout du fait qu'ils ont été considérés comme des héros par la nation russe pour ces actes. Cette situation fait écho à certains témoignages de la guerre en ex-Yougoslavie et à d'autres récits de guerre qui sont trop souvent tus parce qu'ils ne cadrent pas avec la simplicité manichéenne des bons face aux méchants qui se battent entre eux.
Les Cahiers russes, en plus d'évoquer un conflit peu médiatisé, excepté lors des drames du théâtre Doubrovka (du 23 au 26 octobre 2002, un commando tchétchène a pris en otage les spectateurs du théâtre Doubrovka, à Moscou, environ 1000 personnes. L'opération s'est soldée par 129 morts parmi les otages et 39 terroristes tués) ou de la prise d'otages de l'école de Beslan entre le 1er et le 3 septembre 2004 (1200 otages - adultes et enfants - pris en otage par un commando tchétchène - plus de 300 morts après l'intervention d'une unité spéciale russe), nous en apprend un peu plus sur les revendications du peuple tchétchène et son histoire. La journaliste Anna Politkovskaïa a servi de médiateur dans l'affaire du théâtre (à la demande du commando tchétchène). Quant à la prise d'otage de Beslan, elle a été empoisonnée dans l'avion qui la menait à Beslan, avec comme conséquence l'impossibilité de se rendre jusqu'au lieu du drame.
Roman graphique pédagogique, Les Cahiers russes se veut « une plongée dans une Russie marquée par de multiples violences [et qui] témoigne du courage de celles et ceux qui résistent pour défendre l'état de droit et renforcer la société civile. »
Il nous laisse un goût amer d'injustice et d'incompréhension.
Un article du PointLe site de l'auteur
[Lætitia Le Clech]
Humeur musicale : Dead Can Dance, Anastasis (PIAS, 2012)