Ce succès, et d'autres projets similaires, ont incité plusieurs entrepreneurs à initier des sites de crowdfunding pour financer spécifiquement des projets d’infrastructures communautaires. Ces sites tentent de redéfinir les relations entre les villes et les citoyens. Grâce au crowdfunding, on passe du Partenariat public-privé (PPP) à un type de partenariat que je qualifierai de public-citoyen (PPC). En même temps, d’autres initiatives complémentaires d’implication des citoyens dans le développement de leurs communautés émergent comme le logiciel appelé ChangeByUs qui s'est transformé au fil du temps en une plate-forme municipale permettant de tisser des liens entre citoyens dans l'espoir qu'ils s’organisent autour de projets ambitieux àl’échelle locale. ATTENTION ! On ne parle pas ici de remplacer les taxes et autres sources de financement publiques par le crowdfunding. Cette alternative priorise avant tout des projets spécifiques de petite envergure, non pris en compte dans les planifications stratégiques des villes, par manque d'argent mais très importants pour certains quartiers. Oubliez donc le financement de la Rue Notre Dame par le financement populaire. Ca fait plus de 40 ans qu'on est pas capable de la faire collectivement :-).
Je vous présente ici 3 exemples de plateformes de crowdfunding soutenant des projets d’infrastructures communautaires :
Neighbor.ly
Jase Wilson avait participé à une mini-conférence au MIT, où un collègue a fait une présentation sur le crowdfunding des projets communautaires comme Spacehiveau Royaume-Uni, qui est une plateforme de financement des projets de revitalisation urbaine à Londres.Il rentra chez lui à Kansas City, où un débat controversé a éclaté sur la façon de financer un projet de tramway que les autorités voulaient financer en augmentant les impôts des entreprises et des propriétaires fonciers vivant dans la zone couverte par le tramway. Kansas City avait tenté en vain pendant la dernière décennie d’obtenir une subvention de 25 millions de dollars du Ministère fédéral des Transports pour financer en partie ce projet estimé à un coût total de 100 millions de dollars.
Jase Wilson a donc proposé l'idée du crowdfunding pour soutenir les efforts du bureau du maire Sly James en lançant un prototype de ce qui allait devenir Neighbor.ly
Les gouvernements locaux et les organismes communautaires peuvent soumettre des projets sur le site. Les visiteurs (particuliers et entreprises) peuvent faire un don à des projets à différents niveaux. Neighbor.ly ne prétend pas remplacer les taxes ou autres mécanismes de financement publics, mais agira comme une autre source de revenus complémentaires pour des initiatives particulières.
«Maintenant, les citoyens peuvent soutenir directement un nouveau parc, un musée, une ligne de tramway, un projet de vélos en libre services. Ce qui facilite la réalisation des projets qui ne l’auraient pas été autrement et contribue à renforcer le sentiment d’appartenance des citoyens » selon Jase Wilson.
Neighbor.ly est donc une plate-forme de financement communautaire qui fournit une occasion unique pour les gouvernements locaux, les organisations et des entreprises d'obtenir du financement pour des projets locaux spécifiques. Le site a pour mission d'aider les villes à court d’argent et permettre aux citoyens, entreprises et institutions d’investir dans des lieux et des projets locaux qui leur tiennent à cœur.
Comme la plupart des sites de crowdfunding, Neighbor.ly offre des "avantages en nature" comme des autocollants, des T-shirts, des sacs d'emballage, des pixels, ainsi que la possibilité de faire partie d'un projet artistique qui envelopperait le tramway avec un collage de messages provenant des bailleurs de fonds. Le site travaille également sur l'offre d'avantages plus complexes, telles que la publicité et la vente aux enchères des droits de dénomination pour les arrêts sur le parcours cyclable. Des crédits d'impôts pourraient également être impliqués.
Semblable à neighbor.ly, les projets soumis sur Citizinvestor devront être initiés par des municipalités, mais le site permet aux citoyens d'adresser des pétitions pour les projets.
Aucun argent n’est retiré de la carte de crédit des utilisateurs jusqu'à ce que le projet atteigne son objectif de financement. Plus important encore, tous les projets proposés doivent être approuvés par le gouvernement local avant d'être lancés. En plus de ces restrictions, la plate-forme compte aussi sur la volonté et la responsabilité des autorités pour faciliter la réalisation des projets. "Si un projet d’une aire de jeux dans un quartier pauvre qui arrive à lever 10 000 $ provenant de 500 donneurs, ne se réalise pas, la ville aura 500 citoyens sur le dos" affirme le promoteur du site Jordan Raynor.
Contrairement à Neighbor.ly, Citizinvestor ne propose aucune récompense, parce que les questions juridiques entourant sa gestion semblaient trop complexes.
Citizinvestor se concentre également sur des petits projets, des projets dans les cinq chiffres de 10 000$ - 20 000$ en partant de l'hypothèse que ceux-ci sont plus faciles à financer.
Patronhoodest une troisième plate-forme qui vient d’être lancée par trois participants d’une école d’été à Berkeley dont un Montréalais.
Patronhood est ouvert à des projets à l'échelle internationale et à tout promoteur ayant un bon projet et capable de le réaliser .
"Le but de Patronhood est la construction d'une communauté autour des projets", affirme Sachin Shukla, l’un des co-fondateurs. Dans cette optique les fondateurs investissent beaucoup d’efforts dans l’accompagnement des promoteurs de projets pour les aider à élaborer leur campagne de financement. Patronhood envisage aussi de faciliter les échanges et les occasions d’apprentissage entre les entrepreneurs, un aspect souvent absent des autres projets de sites de crowdfunding.
Les contreparties offertes par le site peuvent prendre la forme de croquis, de dessins, de photographies, ou autres gadgets liés au projet en question.
Avant de viser des projets prestigieux, Patronhood veut commencer avec des petits projets faciles à gérer.
En dépit des différences entre ces trois plateformes, elles ont la même finalité : contribuer au développement des municipalités par le financement de projets d’infrastructures communautaires, souvent à petite échelle. La clé du succès réside dans des communautés qu’elles réussiront à créer autour des projets. Après tout, ne dit-on pas que "l'Union fait la Force"?