INTERVIEW – Alt-J

Publié le 10 septembre 2012 par Acrossthedays @AcrossTheDays

Alt-J a été pour moi un des meilleurs concerts de la Route du Rock. Après leur show, j’ai réussi à obtenir dix minutes d’interview avec Gwil (le bassiste) et Thom (le batteur). Je suis un peu nerveuse, it’s my first interview ever ! Et en plus, avec un groupe dont j’écoute le disque – An Awesome Wave – en boucle depuis un mois. Gwil est certainement surnommé « le blond » un peu partout, il parle pas mal et fait rêver avec sa chemise à Palmiers. Thom est un peu plus discret, il a une voix très grave comme dans les doublages de vieux films, et l’air super timide.

Alors, comment avez vous ressenti ce concert ?
Gwil : C’était génial ! Le public a vraiment bien réagi ! Et tu vois, on était juste le deuxième groupe à jouer aujourd’hui, donc on ne s’attendait pas à ce qu’autant de monde vienne.

Est ce que vous attendiez autant d’enthousiasme de la part du public ?
Gwil : En France, globalement, nous avons eu de très bons retours. C’est juste qu’en venant ici (dans un festival), on ne peut pas jouer autant de temps que d’habitude. Ce n’est pas comme à Manchester par exemple, où l’on a beaucoup de fans, on joue devant beaucoup de gens, c’est presque trop facile, comme jouer à la maison. On n’a pas fait tant de concerts que ça en France mais on a déjà joué quelques fois à Paris.

Est ce que vous vous attendiez à ce le groupe devienne aussi gros en si peu de temps ? Vous êtes un peu LE nouveau groupe indé dans la presse et dans la blogosphère… c’est génial quand même !
Thom : Non, vraiment, on ne s’est jamais attendu à un truc pareil… Les gens nous disent tous ça, maintenant il faut les croire ! Mais en fait, pour nous ça ne change pas grande chose…
Gwil : Oui, on est toujours des « gens normaux », des êtres humains quoi. En fait, c’est assez marrant, on a rencontré les XX sur un festival en Allemagne et on était assez impressionné, voire effrayé de les rencontrer. Mais en fait, on a bu un coup avec eux et c’est juste des gens normaux.
Thom : Oui, ils sont très timides.
Gwil : Plus tu rencontres des gens dans le milieu de la musique, plus tu te rends compte qu’ils font juste leur job. C’est tout.

C’est quand même cool que plein de gens écoutent un son nouveau comme le votre, et l’apprécie…
Gwil : Oui, quand on a fait l’album, on s’est dit qu’on l’aimait vraiment. On aime plein de trucs nous, mais je m’attendais pas à ce qu’autant de gens aiment notre musique, à tel point que notre album a été « accepté ». À un moment, quelques personnes nous disaient « ouais, faites votre album, c’est chouette » mais à cette période là on faisait de petits concerts, et ça a duré un certain temps…
Thom : Oui, on n’avait pas idée… finalement on n’a pas fait cet album pour qu’il soit « quelque chose », on l’a fait parce qu’on avait envie, et voilà comment ça a fini.

Là c’est le moment où je panique un peu parce que j’arrive plus à formuler la question que je voulais poser : « est ce que vous considérez que euh… votre album… erm, vous le concevez… euh merde, qu’est ce que je voulait dire déjà ? »

Est ce que vous considérez votre album comme un puzzle où chaque chanson a été écrite à des moments différents, comme une « mosaïc » (to tessellate : assembler en mosaïque)  ; ou comme un film où chaque titre ferait partie d’une histoire ?
Thom : C’est un peu des deux…
Gwil : Oui, quand tu fais un album, tu peux faire une sorte de concept-album, ça forme forcément un tout. Mais par exemple, la chanson Matilda a trois ans. C’est le premier « vrai » enregistrement que l’on ait fait, avec le producteur qui a produit toutes nos chansons depuis. À cette époque, on était à l’université et on descendait à Londres pour qu’il nous enregistre gratos.

C’est Charlie Andrew, c’est ça ? Vous avez toujours travaillé avec lui ?
Gwil : Oui oui depuis le début ! En fait la seule autre personne qui nous ait jamais produit c’est… moi, sur Garage Band (rire) !

Mais en fait, Charlie Andrew, c’est un ami à la base ?
Gwil : C’est un ami d’ami, et je crois qu’il a entendu ce qu’il avait enregistré sur… myspace probablement (rire général parce que myspace c’est trop has-been) et il a fait « eh, j’aime bien, vous devriez venir à Londres ! ». Il a son studio là bas. C’est là où on a enregistré tout l’album. C’est tout petit, à peu près cette largeur là (il écarte les bras)

Ah, ah, deux mètres par deux !
Thom : Ouais, c’est un peu ça, on y est allé régulièrement mais là on est resté enfermé pendant trois semaines non stop pour finir l’album. Au bout de deux semaines on est devenu fous ! Il n’y a pas de fenêtre et c’est vraiment minuscule.
Gwil : Il y a un canapé, mais il n’est pas assez grand pour nous tous ! (rire) Donc on était toujours en train de se chamailler pour savoir qui allait avoir droit au sofa.

Y’en a un qui doit se mettre sous le canap’ du coup !
Gwil : Ouais, ça, ou alors l’un de nous va lire un magazine un par terre…
Mais ouais, il y a certaines chansons qui ont été enregistrées comme ça à ce moment là, et puis il y en a d’autres comme Fitzpleasure, tessellate, breezeblocks et Matilda qui sont plus vieilles.

Mais du coup vous avez gardé les enregistrements originaux ou vous les avez réenregistrées ?
Thom : Non, non on a gardé les vieux enregistrements. Matilda sonne exactement comme nous l’avons enregistrée à l’époque.

Et comment vous avez travaillé avec Charlie Andrew ? Est ce que c’était comme un membre du groupe pendant cet enregistrement ? Quel rôle il a eu vis à vis du son et de la production en général ?
Thom : On avait des chansons presque finies, on lui amenait pour qu’il écoute et…

Il retravaillait dessus avec vous ?
Thom : Oui, en quelque sorte…
Gwil : en fait ça s’est passé différemment pour chaque chanson, non ?
Thom : Certains titres étaient déjà très aboutis…
Gwil : Bloodflood était vraiment finie, comme quelques autres, du coup y’avait pas grand chose à faire dessus.
Thom : Par contre, Fitzpleasure c’était un peu… un cauchemard.
Gwil : C’était une idée qu’on avait depuis longtemps… Et franchement, déjà qu’elle est assez barée, l’enregistrer c’était assez coton ! Elle est vraiment compliquée, en terme de composition. Du coup on a mis toutes nos idées à plat au studio, on se mettait devant l’ordinateur pour essayer plein de trucs, changer la structure etc… On a passé pas mal de temps à réfléchir sur cette chanson. Ce qu’elle devait être, ce qui devait changer…

Du coup, Charlie vous a aidé pour ça ?
Gwil : Ouais, carrément. Tu vois, tous les quatre on a une certaine exigence musicale. Donc, on se met d’accord sur une chanson que l’on considère comme « bien », et elle doit être vraiment, vraiment bien. (et là je dois avouer que je n’ai rien compris à la fin de la phrase).
Ensuite, on l’amène à quelqu’un comme Charlie pour qu’il la produise. Il a un regard plus critique, remet en question certains aspects de la chanson « ça devrait plus être comme ça ou comme ça ». Tout ça, ça fait partie du processus d’enregistrement.

Et il vous a apporté des choses en terme de travail sur le son ?
Thom : Oui, il nous a pas mal encouragé à improviser, à nous détendre… parce que des fois tu peux être un peu stressé à l’idée d’enregistrer une partie si tu es pas tout à fait à l’aise avec. Il sait que tu peux le faire, mais il aime bien nous pousser à explorer différentes choses. Le mieux pour moi, par exemple, c’est d’avoir la chanson dans mon écouteur et d’essayer de faire tourner des rythme par dessus.
Gwil : Ouais, une boucle comme ça tu peux essayer des trucs à l’infini.

Ok, ça va être ma dernière question.
J’ai entendu dire que certains parmi vous était en école d’art à Leeds, et je me demandais si du coup vous vous êtiez investis dans l’aspect visuel du groupe, comme les clips, la pochette…

Gwil : Oui, je considère que ça fait partie d’un tout.
Thom : On était à l’université quand on a commencé à écrire des chansons, donc tout était lié, on faisait tout nous-même.
Vous avez fait la pochette de l’album par exemple ?
Gwil : Oui, la cover c’est une image qu’on a trouvé sur internet. On avait pas mal de questions du label concernant cette pochette, on avait déjà passé la deadline et ils étaient un peu énervés. On avait jusqu’à 17h pour trouver un truc, et il était déjà quatre heure de l’après-midi. Du coup on a cherché « Delta » sur google image, et on est tombé sur le fleuve. On s’est dit « putain, c’est ça qu’on veut ! ». Il y avait plein d’images satellites incroyables et on a eu le droit d’en utiliser une pour l’album ! Par contre, on ne peut pas s’en servir pour du merchandising : sur des T-shirts ou des sacs…

Ah ouais ? Mais vous pourriez peut-être l’acheter… ou le redessiner !
Haha ouais bonne idée, redessiner le fleuve et faire un série de T-shirts collectors…

Et là globalement on s’est tous mis à parler en même temps en rigolant à propos de cette idée de T-shirt, c’est assez inaudible. Ce qui est certain, c’est que cette interview s’est terminé dans la joie et la bonne humeur. 
À suivre : l’interview de Civil Civic, qui parle de boîte de nuit, de Mc Donald et de beaux paysages.