Eurocopter fęte 20 ans de succčs franco-allemands.
Marignane n’avait jamais rien connu de tel : 80.000 personnes envahissant le site d’Eurocopter, en bordure des pistes de l’aéroport de Marseille-Provence, pour fęter les 20 ans de l’entreprise. Une réussite exemplaire qui a permis ŕ la société franco-allemande de se hisser au rang enviable de numéro 1 mondial des voilures tournantes. Et, mieux encore, de confirmer qu’elle a brillamment réussi ŕ mettre en place une bi-nationalité profondément ancrée dans ses mœurs en męme temps qu’une culture d’entreprise que l’on ressent exceptionnellement forte. D’oů cette image d’immense fęte de famille joyeuse, dimanche, ponctuée par des présentations en vol soigneusement millimétrées. Et ponctuées d’applaudissements nourris : ils et elles sont visiblement fiers de leur entreprise.
Certes, Eurocopter n’a que 20 ans mais sa véritable histoire est sensiblement plus longue. L’ex-division hélicoptčres de Sud-Aviation et les artisans des voilures tournantes de Messerschmitt-Bölkow-Blohm, Henri Ziegler et Ludwig Bölkow en tęte, se sont inscrit trčs tôt dans l’axe tracé par le général de Gaulle et le chancelier Konrad Adenauer, il y aura bientôt un demi-sičcle. Marignane et Donauwörth ont marié des savoir-faire largement complémentaires pour en arriver ŕ concevoir l’inimaginable, une fusion par-dessus le Rhin, une opération d’une folle audace.
Jean-François Bigay, qui fut le premier président de l’entreprise unique, venu ŕ Marignane humer l’air des 20 bougies de la réussite, l’avait bien expliqué, ŕ l’époque : malgré l’absence de droit européen, des cultures d’entreprises différentes, de régimes sociaux sans dénominateur commun, Eurocopter avait réussi ŕ conduire la notion de fusion binationale aux limites extręmes de ce qui était pratiquement possible. Ce fut plus qu’une réussite, un exemple ŕ suivre, la preuve de la force que permet l’union. Aujourd’hui, l’actuel président de la société, Lutz Bertling, évoque le plus naturellement du monde Ťnotre histoire franco-allemandeť, Allemand francophone qui confirme implicitement le bien-fondé du cours de l’histoire. C’est, en quelque sorte, naturel. Ou, tout au moins, ce n’est devenu.
En voyant voler l’impressionnant X3, démonstrateur technologique hybride récemment revenu d’une tournée trčs remarquée aux Etats-Unis, en observant les évolutions du redoutable Tigre, en entendant parler de nouveaux projets prometteurs, on comprend qu’Eurocopter bénéficie de la trčs grande motivation de son personnel. Dans le męme temps, tandis que la Bavičre peut s’appuyer sur un sentiment d’appartenance similaire, parallčle, cette réunion de famille a permis de rappeler qu’il s’agit du plus gros employeur des Bouches-du-Rhône : 8.375 personnes (au moins 12.000 avec les sous-traitants français), un chiffre d’affaires annuel de plus de 5 milliards d’euros, 132 bâtiments ŕ Marignane sur un site de 80 hectares, 20.000 personnes en additionnant France, Allemagne et implantations ŕ l’étranger, ŕ commencer par American Eurocopter, au Texas.
Marignane a connu une premičre vie industrielle, avant les voilures tournantes. La saga s’est construite ŕ partir de 1938, avec le LeO 45, l’imposant hydravion SE 200, l’autogire novateur SE 700 (déjŕ !), les Vampire, Mistral et autres Aquilon. Fort heureusement, le souvenir de ces grandes heures est soigneusement entretenu, ce précieux patrimoine historique dűment préservé, comme l’a rappelé la belle exposition de documents anciens mise en place ŕ l’occasion de cet anniversaire.
Jean-François Bigay a avoué ŕ nos confrčres du quotidien ŤLa Provenceť (édition datée du dimanche 9 septembre) ce qu’il a appelé une frustration, qui mériterait ętre précisée ŕ l’intention des historiens : Ťen 2003, tout était pręt pour le rachat de l’américain Sikorsky. Mais la Maison Blanche a dit non. Dommage !ť Quoi qu’il en soit, un bel anniversaire…
Pierre Sparaco - AeroMorning
(Photo: Stéphane Chéry)