En réalité, ce n'est pas que François Hollande reste totalement inactif,
bien entendu, mais c'est que son action manque à la fois de visibilité et
qu'elle est considérée comme insuffisante par beaucoup de français.
J'y vois trois raisons essentielles:
La première c'est qu'il a voulu restaurer la répartition des rôles entre le
président de la république et son premier ministre mise à mal par son
prédécesseur. Nicolas Sarkozy était sur tous les fronts même ceux qui étaient
auparavant dévolus au premier ministre. François Hollande a clairement annoncé
qu'il allait, d'une certaine manière, rétablir le premier ministre dans ses
prérogatives "Moi président de la République, je ne traiterai pas mon
premier ministre de collaborateur."
Pendant que Jean-Marc Ayrault gouverne avec discrétion, François Hollande
s'occupe de l'Europe : Le 4 septembre il est à Rome, le 5 il s’entretient
avec Herman VAN ROMPUY, le 6 il est à Londres et accessoirement, le 8 il décore
Paul Mc Cartney de la Légion d'honneur.
Vu de France, il parait moins présent et éloigné des principales
préoccupations des Français que sont la crainte du chômage et la baisse de leur
pouvoir d'achat.
La deuxième raison, c'est que ses premières décisions déçoivent. Certes,
elles répondent aux promesses de campagne mais de manière très édulcorée
(hausse très limitée du SMIC, baisse réduite du prix de l'essence, réforme de
la retraite à peine amendée...). Même la taxation à 75% semble devoir être très
largement amendée.
Enfin la troisième et principale raison c'est que les décisions prises, ou
les annonces faites, ne répondent à aucun des problèmes de fonds auxquels la
France est confrontée, en vrac : la désindustrialisation, les finances
publiques structurellement déficitaires, la baisse de la productivité, la
balance du commerce extérieur qui se dégrade d'année en année, la croissance en
berne, le chômage...
Or, la conscience, il est vrai assez récente, qu'ont les français de la
gravité de notre situation, les rendent impatients. Impatients non pas de
changements concrets dans leur situation, car ils ont bien compris que cela
prendra du temps, mais impatients d'être rassurés sur la capacité de ses
gouvernants d'apporter des solutions.
Pourtant, à ce jour, aucune stratégie n'a été officiellement présentée.
Aucun plan d'action sérieux sur la manière dont le gouvernement va s'y prendre
pour faire revenir la croissance, redynamiser le tissu industriel, répondre à
la crise du logement...
Rien de vraiment convaincant sur tous ces sujets si ce n'est quelques
projets qui s'apparentent plus à des rustines qu'à de vrais remèdes comme les
emplois d'avenir ou le contrat génération. Rien même sur la réforme fiscale qui
était pourtant un thème central de sa campagne. Pire encore, l'impression
laissée est que le seul levier sur lequel le gouvernement peut peser est celui
de la fiscalité à travers un incessant alourdissement.
En ces temps de crise, très anxiogènes, les français ont besoin d'être
rassurés et d'être certains qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre la
normalité revendiquée par notre Président et sa capacité à sortir le pays de la
crise.
Ceci posé, que doit-il faire pour rentrer dans les bonnes grâces des
français. Et bien la réponse parait évidente, expliquer sa stratégie, démontrer
qu'il sait ou il va et que même si cela demande du temps, qu'il a les solutions
pour redresser le pays. Il doit présenter un plan d'action sur 5 ans associé à
un calendrier raisonnable (qui peut croire qu'il n'y aura que 2 années
difficiles et qu’après on recommence à raser gratis ?). Pour ce faire il doit
choisir un cadre solennel et prendre de la hauteur par rapport aux sujets
annexes que sont le prix de l'essence ou même la taxation à 75% des très hauts
revenus. De ce point de vue la forme de son intervention de Dimanche soir est
une erreur. Ce n'est pas lors d'une interview sur le plateau de TF1 que l'on
peut prendre le recul nécessaire par rapport à tous les sujets certes
symboliques mais accessoires qui ne peuvent que détourner l'attention de
l'essentiel.
Evidemment, pour pouvoir expliquer sa stratégie encore faut-il, en préalable, l'avoir définie ce qui est plus facile à dire qu'à faire. A ce jour, et après l'avoir écouté ce soir, j'ai l'impression que la réflexion n'est pas encore tout à fait aboutie, pour employer un doux euphémisme. A Hollande de nous prouver le contraire et vite.