« Si l’apathie est, comme on le dit, de l’égoïsme en repos, l’activité, qu’on vante tant, pourrait bien être de l’égoïsme en mouvement. Ce serait donc l’égoïsme en action qui se plaindrait de l’égoïsme en repos. » (Joseph Joubert)
Ce disque heureusement faiblard et globalement mollasson a quelque chose du repos du guerrier. Pourtant, Kevin Ayers n’a jamais eu la drôle d’idée de vouloir faire la guerre à qui que ce soit, il a bien autre chose à faire : la sieste, boire des coupes de champagne, refaire la sieste, s’étirer mollement, bailler en attendant que le temps passe, sautiller tel un Ubu lymphatique, faire des disques avec des amis encombrants. Celui-ci qui est son septième après son époque machine molle donne l’impression d’avoir été enregistré par-dessus la jambe tout en tombant du hamac, ce qui n’est pas rien, c’est presque un vrai tour de force.
Dix morceaux de pop plutôt classique, un peu posément mature avec quelques heureuses tentations vaudevillesques (Ballad Of Mr.Snake, The Owl) et puis une merveilleuse reprise de Falling in Love Again tellement relâchée qu’elle ferait passer l’original chanté par Marlene Dietrich pour un monument de rigidité, alors que Marlene quoiqu’on en dise était bien molle elle aussi (elle avait aussi les jambes bien blanches). Voilà pour la musique.