«Nous ne sommes pas en terrain conquis»

Publié le 07 septembre 2012 par Bordeaux7

« Bordeaux fête le vin à Québec » a ouvert ses portes hier soir pour quatre jours de dégustation et de fête sur les bords du Saint-Laurent. Créé à l’initiative du maire de Québec, Régis Labeaume,  sur le modèle de la fête bordelaise, l’événement est coorganisé avec la SAQ (Société des vins de Québec, qui détient le monopole de la vente du vin au détail dans la province) et le CIVB. Rencontre avec Georges Hausalter, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, quelques heures après l’ouverture de la fête.

Que représente le Québec pour le vin de Bordeaux ?
Nous avons ici un marché historique que nous aimons bien travailler. La consommation de vin au Canada continue à se développer et les jeunes générations viennent au vin,  même si ça n’est pas une boisson aussi commune dans l’alimentation canadienne qu’elle l’est en France. Nous avons ici une position de « leader » mais pas de situation hégémonique : la France représente 30% de la consommation de vin au Québec et le vin de Bordeaux est la catégorie la plus importante. Nous ne sommes pas en terrain conquis, c’est un marché très ouvert. Il faut donc sans cesse renforcer le lien avec le consommateur pour qu’il pense à nous. La ville de Québec nous a donné une opportunité exceptionnelle de le faire grâce à cette fête. Les premiers retours que j’ai eus sont vraiment très positifs sur la chaleur de l’accueil du public québécois envers nos vins. Je crois que c’est un excellent usage de ce jumelage Bordeaux-Québec !
Le système de commercialisation du vin au Québec est très particulier, encadré par un monopole d’Etat. Cela rend-il ce marché plus complexe à atteindre pour les producteurs du Bordelais ?
Au Canada et en particulier au Québec, l’importation,  le stockage et la vente au détail d’alcool - et donc de vin -  est en effet un monopole d’Etat confié à la SAQ. Vous ne pouvez pas faire commerce du vin librement. Vendre du vin à un restaurateur ou à un particulier directement est un crime. Vous devez avoir un « agent promotionnel » qui va représenter vos vins auprès de la SAQ, et répondre aux appels d’offres qu’elle émet. Nous avons donc un rôle essentiel à jouer pour expliquer à la SAQ la place importante de Bordeaux dans la consommation du public québécois. C’est vrai que, de fait, il n’y a qu’un seul client qui est la SAQ. Cela a pour avantage que nous avons un interlocuteur clair pour discuter. Une fois qu’on a convaincu la SAQ, celle-ci nous aide à convaincre le consommateur. Et il faut reconnaître que c’est une organisation très professionnelle, avec une grande qualité dans la logistique, le stockage et la mise en avant des produits.
Peut-on déjà s’attendre à ce que cette fête du vin s’installe à Québec ? Souhaitez-vous que cette première expérience se renouvelle ?
C’est trop tôt pour le dire, à la fin de cette édition nous déciderons tous ensemble… Mais je crois que c’est une bonne façon de promouvoir le vin de Bordeaux : créer une relation affective forte entre le vin et son consommateur qui est loin de lui. On sait bien que la pérennité de notre vignoble passe par notre capacité à gagner des parts de marché à l’exportation. Or le marché est très ouvert, même ici au Québec où il y a une culture française bien implantée. Tout ce qu’on peut faire pour se donner la préférence dans le cœur des Québécois sera donc très utile. Or là, nous avons une chance formidable : personne d’autre que Bordeaux ne peut bénéficier d’une telle promotion. Donc si nous avons l’opportunité de le refaire, et même si c’est un gros investissement, nous le referons. Car c’est un bon investissement.
Propos recueillis par Sophie Lemaire

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