Pourquoi la leçon de Frederik de Klerk à la France ?

Publié le 06 septembre 2012 par Rsada @SolidShell

Participer chaque année à l'Université d'Eté du Medef n'est pas anodin. Au hasard d'une rencontre, d'un évènement et d'une conjuguaison de faits souvent surprenants, les portes de ce cercle très fermé -voire prisé- m'ont été ouvertes il y a quelques années.

Ainsi donc, depuis 2008, je prends un malin plaisir à écouter certaines railleries de mes amis qui ne cessent de s'étonner que moi, le fils d'ouvrier, le socialo devenu traitre, je prenne autant de plaisir à amputer un chouillas de mes vacances pour venir écouter des débâts jugés pompeux ou ennuyeux pour celles et ceux qui ne les voient qu'au travers des récits qui en sont faits dans la presse ou la télévision.

Ennemi juré de l'opportunisme, je concède ici y succomber quelque peu car le Medef m'offre chaque année une occasion unique d'approcher un monde étranger où des personnalités rares, des personnalités d'exception, viennent y délivrer leur part de vérité.

Au rang de ces personnalités il y a bien entendu de très grands chefs d'entreprise, des journalistes connus, des Chefs d'Etat ou des ministres d'hier et d'aujourd'hui. Parfois une surprise. En 2012, cette surprise, cette rencontre improbable, c'est un homme entré dans l'Histoire en 1991 pour avoir engagé les réformes ayant mis un terme à l'apartheid en Afrique-du-Sud.

Ancien président d'une Afrique-du-Sud devenue multiraciale, Prix Nobel de la Paix aux côtés de Nelson Mandela en 1993 puis vice-président de ce dernier jusqu'en 1996, Frederik de Klerk est venu faire la leçon à la France sous la standing ovation d'un public ému.

Source MEDEFtv


Il y a de nombreuses manières de communiquer et de transmettre un message fort, un message clair audible par tous. Frederik de Klerk a parlé en toute simplicité, en toute humilité de l'histoire contrastée de son pays. Il n'a pas réfuté ou nié les drames, les pleurs et les injustices qui s'y sont déroulées pendant près de 40 ans. Il n'a pas écarté les difficultés à surmonter pour ouvrir les yeux et les coeurs si longtemps déchirés. Il n'a pas oublié de rapeller qu'il appartient aux hommes, à tous les hommes, de travailler de concert pour construire une nouvelle société où chacun dispose de la part qui lui revient. Enfin, il n'a pas caché sa fierté d'être le représentant d'un pays qui a réussi le pari d'être en paix avec son histoire.

L'ancien président d'Afrique-du-Sud a parlé de l'Europe, de sa construction et la chance que représente la diversité des peuples et des pays qui la compose. Pour lui, l'Europe est une force et un modèle à suivre.

Il s'est ensuite attardé sur la France. De son image à travers le monde et du phare de toutes les libertés qu'elle a très longtemps incarnée pour les peuples qui n'ont jamais manqué de nous observer. Il a parlé de notre rôle moteur dans cette Europe en crise et de cette Histoire commune dont il invite à poursuivre la construction aux côtés de nos partenaires. Vantant les mérites de la diversité culturelle et cultuelle dans son propre pays, il s'est étonné que la France, que les français ne trouvent pas les moyens de la valoriser.

Frederik de Klerk a fait la leçon à la France. Il a invité notre pays à ne pas se réfugier derrière son Histoire, derrière ses préjugés et ses Lois. Prenant appui sur notre Laïcité -si incompréhensible vue de l'étranger- il a insisté sur le fait que vivre ensemble ne se décrète pas si tous les citoyens ne dispose pas de la même visibilité au sein de la société, s'ils se sentent discriminés de par leur religion ou leur couleur de peau. Il demeure convaincu que la France a encore des choses à dire au monde si elle ne se renferme pas sur elle-même, si elle valorise toutes ses minorités et qu'elle donne vie à son propre modèle de multiculturalisme.

Il a conclu en demandant à la France de se faire le défenseur d'une nouvelle charte mondiale de reconnaissance de la diversité et des minorités, à l'image de celles qui existe pour les Droits de l'Homme, de la Femme et de l'Enfant.

Celles et ceux qui me connaissent bien. Vous, lecteurs assidus de ce blog, vous vous doutez bien que je n'en demandais pas tant en venant me perdre à Jouy-en-Josas ! Nous français, Peuple de toutes les Révolutions, nous n'aimons pas les leçons de bonne moralité. Et pourtant, si Frederik de Klerk avait raison ?

Dernier instant d'émotion au moment où Laurence Parisot pose la question de savoir comment Nelson Mandela a réagi lorsqu'il est venu lui annoncer sa libération. Au bord des larmes, Frederik de Klerk répond : "Je lui ai dit qu'il était libre. Il m'a dit que non, que c'était beaucoup trop tôt pour lui et qu'il n'était pas encore prêt. Je lui alors répondu qu'il avait passé beaucoup trop de temps en prison et que le moment était venu de construire l'Histoire ensemble" !

A la manière de Winston Churchill : "La grande leçon de la vie, c'est que parfois, ce sont les fous qui ont raison".