Ne donnant plus signe de vie depuis 2002 et la PlayStation première du nom, la série Spec Ops refait surface 10 ans plus tard sur nos consoles actuelles. Le gros éditeur Take-Two, propriétaire de la licence, la confia à l’une de ses filières filles, 2K Games, avec le studio allemand Yager Development au chantier. Avec tous les shooters militaires déjà présents aujourd’hui, est-ce que ce reboot de cette série oubliée se montrera pertinent, ou finira t-il enfoui sous les sables ?
Les sables de Dubaï sont l'une des rares originalités dans le gameplay de Spec Ops: The Line.
L’hymne américain interprété à la guitare électrique retentit dans un Dubaï délabré alors qu’un drapeau américain inversé flotte seul sur un gratte-ciel. En sélectionnant une nouvelle campagne à partir de ce menu, un hélicoptère traverse l’écran et on enchaîne sur une séquence de rail-shooting à bord du faucon noir. Voilà un début comme je l’aime : rapide, efficace, intense et facile à prendre en main pour les débutants. Ainsi, malgré une concentration assez importante sur le scénario, Spec Ops: The Line dose bien cinématiques et séquences de gameplay sans pour autant perdre en intensité dans l’un ou dans l’autre. Néanmoins, la jouabilité du titre reste plutôt ordinaire, et même si les premiers opus furent désignés des jeux de tir tactique, on se rapproche plus ici d’un Gears of War que d’un Ghost Recon. En effet, les possibilités de commandes sont assez limitées : on peut seulement prioriser des cibles pour nos deux coéquipiers, ou demander des flashbangs à certains moments critiques. Aussi, on peut difficilement dire que les mécaniques soient aussi affûtées que ces deux autres jeux et cela est surtout dû au fait que certaines touches soient assignées à deux actions en fonction du contexte. Par exemple, la touche ”B” (sur Xbox) est à la fois assignée au corps à corps et au saut par-dessus les obstacles, mais il arrive plusieurs fois que l’on frappe juste à côté des couvertures au lieu de faire l’action appropriée. Les niveaux restent également très linéaires bien qu’ils soient assez intenses en action comme les autres jeux hollywoodiens tels que Call of Duty.
"The Horror! The Horror!"
Spec Ops: The Line relate l’histoire d’un soldat de la Delta Force et de ses deux hommes à la recherche d’une unité de l’armée américaine à Dubaï. Cette unité était partie en mission de sauvetage humanitaire suite à une violente tempête de sable qui a englouti toute la ville. L’unité n’a donné plus de nouvelles depuis un dernier message de son colonel annonçant par message radio l’échec total de la mission. Le scénario est en fait une réadaptation moderne d’Apocalypse Now et de son inspiration d’origine : Au cœur des ténèbres (dont l’auteur partage d’ailleurs le nom avec le fameux colonel). Le petit groupe de la Delta découvre alors une ville dans une situation confuse où des insurgés combattent contre les soldats américains qui semblent avoir établi leur propre autorité. Au fur et à mesure que l’on progresse dans les ténèbres de Dubaï, on assiste et on commet même des atrocités de la guerre. Ces moments nous mettent vraiment mal à l’aise et ne sont pas gratuits comme le massacre à l’aéroport de Modern Warfare 2. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, on est rarement amené à faire des choix moraux et ce sont vraiment les dernières décisions qui impacteront sur les multiples fins sur lesquelles on pourra déboucher. On aura donc pas besoin de se retaper tout le jeu pour découvrir toutes les fins, mais seulement rejouer les derniers chapitres. Il est cependant dommage que le jeu ne dure que 4 à 5 heures en difficulté normale quand on sait qu’Apocalypse Now était réputé pour sa longueur.
Je vous jure que sa voix et sa tête sont hétérogènes. Au moins, on ne la voit pas quand on joue.
Comme beaucoup d’autres jeux et plus particulièrement les shooters, Spec Ops tourne sur l’Unreal Engine, et comme beaucoup d’autres jeux avec ce moteur, le tout est assez joli. On retrouve néanmoins le problème récurrent du moteur où des textures restent parfois baveuses pendant un certain temps jusqu’à ce qu’elles chargent complètement, surtout en multijoueur où la performance est primée. Aussi, la version anglaise du jeu se voit son protagoniste joué par Nolan North (Nathan Drake, Desmond Miles…), mais le physique du personnage qui se rapproche plus d’un Ribéry ne correspond pas tellement à la voix du doubleur qu’on aurait pourtant cru “passe-partout”. La campagne ultra-scénarisée de Spec Ops: The Line est accompagnée d’un mode multijoueur, lui aussi assez classique. Le degré de personnalisation est pas mal poussé même si là encore, il n’y a rien d’inédit (on peut voir des “atouts” comme sur le mode multijoueur de Call of Duty). Le multijoueur est assez sympa en soi, et le sable de Dubaï vient pimenter juste un tout petit peu le gameplay comme dans le mode solo.
Parmi les pléthores de jeux de tir militaires déjà au rapport sur le marché, s’il y en a un qui met une claque scénaristique c’est bien Spec Ops: The Line. On est loin de l’habituel chasse aux russes avec des chapeaux gris et des chaussures à fermeture éclair. Le premier AAA de Yager aborde certainement la guerre de la façon la plus mature qu’on ait vu jusqu’ici dans le medium. Dommage que le gameplay quant à lui reste très classique et ne suive pas l’approche audacieuse qu’a pris le scénario.
Score: 4 out of 5 stars