Peut-on encore parler d’Andy Warhol sans tomber dans l’énumération de poncifs ni un énième alignement de reproductions de ses œuvres ? C’est le défi qu’a brillamment relevé la romancière et essayiste Cécile Guilbert. Son ouvrage, Warhol spirit est un livre hors-norme, dont l’ambition n’était pas moins que la réalisation d’un « tombeau » de l’artiste visionnaire, vingt ans après sa mort. Sans se départir d’une certaine esthétique pop, l’auteur analyse en profondeur la personnalité intime de Warhol, en mêlant avec une virtuosité rare textes et créations graphiques.
Alors que l’artiste est plus que jamais au cœur de la culture de masse, s’immisçant malgré lui dans la mode, les publicités ou même le cinéma, Cécile Guilbert a décidé de revenir sur les mots de Warhol : ses écrits, ses citations, sa correspondance. Ce qui apparaît comme incongru pour un homme d’images devient rapidement une évidence. Les citations de Warhol, qui apparaissent ici en pleine page (un peu comme des tableaux), dévoilent en effet un visage méconnu de l’homme.
Mais Warhol spirit se limite pas, loin de là, à un simple empilement de citations. Car Cécile Guilbert s’est fixé pour mission une analyse quasiment psychanalytique de l’œuvre warholienne. Pourquoi Warhol n’a-t-il jamais inclus le Pape de son époque parmi son immense galerie de portraits ? Telle est l’une des questions par lesquelles l’auteur ouvre son texte. Souhaitant se libérer du carcan chronologique, elle a ainsi découpé son livre en vingt thèmes (et autant de chapitres), en référence au vingtième anniversaire de la mort de l’artiste.
Sans nul doute, Warhol spirit est l’uns des livres les plus singuliers de ce début 2008. Après une audacieuse biographie romancée de l’écrivain Lawrence Sterne, Cécile Guilbert vient de réorienter notre regard sur l’un des artistes les plus commentés de tous les temps.
« Warhol spirit » de Cécile Guilbert, Ed. Grasset, 280 pages, 25,90 €