Éditeur : Anne Carrière - Date de parution : Août 2012 - 316 pages et un coup de cœur !
Ce que je m’apprête à vous raconter s’est bel et bien produit – et à peu de choses près, de la manière dont je vais la décrire. C’est en ces termes que Robert Goolrick s’adresse au lecteur pour raconter son histoire. Eté 1948, Brownsburd est une petit ville tranquille en Virginie. Rien d’important ne s’y est déjà passé. Une ville où la rue principale est flanquée de quelques commerces. Des habitants aux vies simples qui ont appris à vivre les uns avec les autres. Et pas moins de cinq églises pour accueillir tout ce petit monde le dimanche matin où la parole de Dieu est écoutée et appliquée. Et c’est à Brownsburd qu’arrive Charlie Beale avec ses deux valises. L’une contenant ses couteaux de boucher et l’autre de l’argent liquide. Il décide de s’y installer, et au bout d’une semaine il achète un terrain où il dort à la belle étoile ou dans son pick-up. Il propose au boucher Will Haislett de travailler gratuitement pour lui. Sa femme Alma n'y voit aucun inconvénient et rapidement, le couple l’invite à dîner ou à dormir chez eux. D'ailleurs, leur fils Sam âgé de cinq ans se noue d’amitié avec Charlie Beale. La communauté se pose des questions mais jamais publiquement : d’où vient-il ? et pourquoi ? Son travail apprécié par tous, sa gentillesse et sa discrétion font qu’il semble être adopté par tous. Et chez les Haislett, il est considéré comme un membre à part entière de la famille. Sam passe tout son temps libre avec lui. Mais quand Sylvan passe le seuil de la boucherie, Charlie Beale en tombe amoureux. Dans les salles de cinéma, la belle jeune femme accède aux paillettes et à Hollywood qui lui donnent l'illusion d'une autre vie. Son époux est l’homme le plus riche de la ville et son mariage n’est un contrat marchandé.
Résumer ce livre à une simple histoire d’amour et d’adultère serait bien réducteur. Car Robert Goolrick excelle à nous détailler la vie de cette communauté. Les Blancs qui ne fréquentent pas les Noirs hormis en la personne de Claudie qui possède des mains de fée et coud pour ses dames des tenues. Comme partout, la personne qui détient de l’argent et des terres est importante. Peu importe qu‘elle soit grossière ou vulgaire, on la respecte. Même si l'on pense le contraire, on n'en dit pas mot.
Brownsburd est une petite ville où chacun s’applique à ne pas faire de vagues et à respecter la parole prêchée le dimanche matin. En tombant amoureux de Sylvan, Charlie va bouleverser à tout jamais la vie de la communauté. Sam sera le spectateur de cette liaison. Un secret qu’il garde pour lui pour ne pas trahir Charlie en qui il a toute confiance.
Je n’en dirai pas plus sur l’histoire sauf que dès les premières lignes, une tension s’installe comme un orage qui se prépare. Et quand la foudre tombe, elle n’épargne personne.
Robert Goolrick possède cette capacité à décrire finement la psychologie de ces personnages ordinaires et terriblement humains ! Avec cette sensibilité extraordinaire et beaucoup de subtilité, il nous dépeint les sentiments, l’enfance trahie, les apparences trompeuses, l’intégration, les carcans de la religion, des vies vécues par procuration, l’aspiration à la sérénité mais aussi l’amitié, les non-dits tacites (et ce que l’on préfère ne pas voir), la solidarité. Des thèmes dont la portée est universelle.
Je n‘ai pas lu ce livre, je l’ai ressenti avec une atmosphère quasi palpable! Un coup de cœur entier !
L'enfance est l'endroit le plus dangereux qui soit. Personne n'en sort indemne.
Lu du même auteur Féroces ( un livre qui m'avait bouleversée)