J’ai fait cette photo lorsque j’étais dans la région de Charlevoix, le plus beau coin du monde. Sur ce fleuve du matin, on ne sait plus où sont l’eau, les nuages et la brume. Le navire semble presque voguer dans un espace vide. C’est un peu ce que je ressens en voyant de l’extérieur mon pays naviguer depuis plusieurs années. Sentiment accentué après y avoir passé trois semaines intensifiées par une campagne électorale. Comme s’il n’y avait plus de direction, de voies tracées pour la suite des choses. Le vote épidermique d’une bonne frange de mes compatriotes me semble incohérent : On envoie en chambre de trop nombreux représentants d’un avorton de parti de droite dans une élection provinciale (l’ADQ en 2007), d’anonymes représentants d’un parti de gauche (le NPD) en 2011 dans une élection fédérale, et dans quelques jours, d’un éphémère parti de droite (la CAQ). Une chatte n’y retrouverait pas ses petits, à moins que ces derniers soient badigeonnés d’un populisme démagogique (on approche le pléonasme, mais ça me fait du bien …) aux effluves vigoureuses. Je me souviens d’une soirée bien heureuse avec plusieurs journalistes qui dormaient à la maison dans les jours qui ont suivi le tremblement de terre. Deux d’entres-eux défendaient l’idée que la culture politique d’une trop grande partie de notre population était dans un état lamentable, tellement lamentable qu’il devient effroyable d’imaginer que ce sont eux qui installent nos gouvernants au pouvoir. J’avais longuement contre-argumenté avec eux, défendant l’idée que cette pseudo ignorance pouvait aussi être interprétée comme une position idéologique divergente (au plan de la priorisation des valeurs par exemple). J’ai toujours eu une allergie à ce ‘Le peuple est con’, mais j’avoue que dans l’incohérence du contexte, mon proverbial optimisme est ébranlé. À l’autre bout du spectre, il y a également ceux que l’on qualifie d’experts de la chose publique, ceux qui commentent tout et rien (un peu comme je le fais !!) dans nos médias, grands comme sociaux. À l’exemple de Mathieu Bock-Côté, ce pseudo intellectuel qui tourne des phrases plus lourdes de références que de sens. Après avoir constaté une certaine médiocrité dans notre existence politique, n’a quant à lui aucune crainte à nous annoncer enfin une sortie de crise : « Qui n’a pas eu le sentiment, ces dernières années, que le Québec s’enfonçait dans la médiocrité ? Quand une société se sent impuissante, elle perd le goût du collectif. La politique semble alors baigner dans les eaux puantes de l’affairisme, de la corruption. C’est avec ce climat mental que nous romprons le 4 septembre. Une page d’histoire s’écrira. Nous ne changerons pas seulement de gouvernement. Nous changerons probablement d’époque. Notre histoire comme peuple bifurquera.» Changer d’époque, une histoire qui bifurque …. un chausson avec ça ?! Ma prédiction, pessimiste pour une fois : Un gouvernement péquiste minoritaire qui ne survit pas deux semaines, la CAQ et le PLQ s’unissant pour prendre le contrôle du gouvernement. Un gouvernement CAQ-PLQ (ou PLQ-CAQ) pour les 5 prochaines années et aucune histoire qui bifurque, la bonne continuité dans cette descente en enfer … Avec Harper à Ottawa, je pense que je vais demander l’asile en Haïti !!