Quel rapport peut-on établir entre Facebook et World of Warcraft, ou encore entre Second Life et Guild Wars ? Toutes ces applications ont développé une monnaie virtuelle. Qu’il s’agisse de pièces d’or, de crédits Facebook ou bien de linden dollars, le principe est le même : permettre aux utilisateurs de régler leurs transactions au moyen d’un système de paiement en théorie déconnecté de la réalite. En principe ces monnaies virtuelles ne devraient permettre d’acheter que des biens virtuels au sein d’espaces imaginaires ou connectés sur la toile.
Comment est-ce possible ? Les entreprises gérant ces communautés en ligne ont développé deux systèmes différents. D’un côté Blizzard et Activision, les entités à l’origine de World of Warcraft et de Guild Wars, permettent aux joueurs d’obtenir des pièces d’or en effectuant certaines tâches en ligne – des « quêtes ». Autrement dit, ces sociétés émettent elles-mêmes de l’argent virtuel distribué aux joueurs. D’un autre côté, Facebook et Linden Lab (la société créatrice de Second Life) proposent aux utilisateurs d’échanger directement des espèces sonnantes et trébuchantes contre de la monnaie virtuelle. Ainsi contre 1 euro on peut obtenir 324 Linden Dollars ou 14 crédits Facebook.
Dans tous les cas, ces sociétés ont mis en place des plateformes qui permettent aux utilisateurs d’échanger entre eux leur argent et leurs biens virtuels, qu’il s’agisse de maisons, de Tee-shirts ou d’épées. En d’autres termes, elles ont créée des bourses et des marchés virtuels sur lesquels transitent tous les jours une quantité d’artefacts virtuels faramineuse. Bref, chacune a implémentée une véritable économie virtuelle. Bien qu’autonomes, ces systèmes en ligne ne sont toutefois pas autarciques, les connexions avec le monde réel sont nombreuses.
A y regarder de plus près, il semble en effet que ces monnaies n’ont de virtuelles que le nom. Elles ne sont pas réellement virtuelles mais plutôt virtuellement réelles. A tout instant, les utilisateurs ont la possibilité de convertir leurs avoirs immatériels en dollars, euros ou toute autre monnaie de leur choix. Ainsi dans Second life, c’est la société Linden lab, par l’intermédiaire de sa plateforme Lindex, qui assure elle-même la convertibilité des devises, qu’elles soient réelles ou immatérielles. De même pour World of Warcraft ou Guild Wars, les utilisateurs ont la possibilité de monétiser leurs fortunes par l’intermédiaire des nombreux sites communautaires qui pullulent sur la toile. Le grand nombre d’utilisateurs de ces services –World of Warcraft revendique plus de10 millions de joueurs réguliers- assure une liquidité et une convertibilité parfaite des devises immatérielles en devises réelles. Réalité et espace communautaire se retrouvent ainsi inextricablement entremêlés.
A tel point que certains on fait de la revente de pièces d’or ou de Linden Dollars leur métier. Arpentant l’espace en ligne à la recherche de profits, ces cyber-travailleurs convertissent leurs gains virtuels en avoirs réels. Il faut dire que les opportunités ne manquent pas. Ainsi en 2007, Lacoste avait été jusqu’à organiser un concours de mannequina sur Second Life dont le gagnant s’était vu remettre la coquette somme de 1 000 000 Linden dollars (soit environ 4000 dollars US).
On estime qu’en 2011, près de 1,5 milliard de dollars réels ont ainsi été dépensés en biens virtuels. Une manne dont les dirigeants de Facebook ont bien vite saisi l’importance : avec un trafic d’environ 450 millions de dollars US en 2011 sur le site communautaire, ces échanges ont rapporté pas moins de 150 millions de dollars US à la société californienne. Une chose est donc certaine, bien qu’elles puissent être considérées comme irréelles, les monnaies virtuelles rapportent gros à ceux qui savent qui savent les convertir.
Jean-Baptiste Duret