Le défi est lancé. Nous avons donné quatre semaines à notre journaliste pour revoir son mode de vie, changer de rythme et devenir la reine de la vie saine. Une condition : continuer à travailler et à s’occuper de ses enfants, sans partir dans un spa à l’autre bout du monde…
Isabelle Artus
Je propose à ma rédactrice en chef l’idée d’une semaine en thalasso : La Baule, Carnac, Quiberon, Biarritz,n’importe où, du moment que c’est au bord de l’Atlantique. Un océan qui me paraît plus tonique (sous-entendu plus sain) que la mer Méditerranée, dont le climat évoque davantage la nonchalance, le farniente. « Trop facile de s’acheter une nouvelle hygiène de vie dans ces conditions », me signale-t-on du côté de ma direction. Je dispose donc d’un mois pour faire mes preuves, améliorer ma façon de vivre… tout en continuant à me rendre à mon travail chaque matin.
Par où et par quoi commencer ?
Je sens que j’ai besoin d’aide et qu’il me faut trouver un spécialiste de la vie saine. Mais qui ? Je commence par rendre visite à mon généraliste. Ses conseils sont simples et définitifs : je dois arrêter de fumer et de boire de l’alcool. Je dois faire une heure d’exercice par jour (marcher rapidement pendant une demi-heure, ça compte; additionner les pas entre mon bureau et la photocopieuse, ça, ça ne compte pas), manger cinq fruits et légumes par jour, boire un litre et demi d’eau, et puis c’est tout. Trop simple, trop « déjà entendu », et finalement trop difficile à faire.
Au moment de réfléchir à la meilleure façon d’illustrer l’article que vous êtes en train de lire, une consoeur candide me pose la question : « C’est quoi, pour toi, vivre sainement ? » Je ferme les yeux et, immédiatement, surgissent des images de repas dégustés en famille, en pleine nature et dans la joie. Il fait beau, je prends mon temps, rien ne presse. Je suis à peu près certaine qu’après ce repas j’irai faire une balade dans la nature, par pur plaisir. Je visualise la scène et la décris très précisément quand ma consoeur (toujours la même), un brin ironique, me fait remarquer que l’on se croirait dans la publicité Ricoré et que mon désir de vie saine s’apparente à un rêve de vacances. Atterrissage brutal et retour à la case départ.
Échange mauvaises habitudes contre bonnes
Oui, mais lesquelles ?
Arrêter de fumer. J’ai beau savoir qu’il faut commencer par là, inconsciemment, je cherche autre chose de plus nouveau et, si possible, de plus facile. Améliorer mon sommeil. Comme beaucoup, j’ai l’impression de mal dormir ou pas assez. Je me rends chez le docteur Maurice Tran Dinh Can, médecin acupuncteur, auteur de
Bien dormir pour guérir(Ed. du Rocher - 2002) qui m’explique que la plupart des dysfonctionnements de l’organisme viennent d’une mauvaise qualité de sommeil, et qu’en rétablissant celui-ci mon corps me le rendra au centuple. J’adore cette idée ! Après plus de quarante ans d’exercice, le docteur Tran Dinh Can a réduit sa pratique à l’extrême : une seule aiguille dans la tête. Un point, c’est tout. À raison de deux séances par semaine, je suis obligée de constater que je me sens mieux. Je dors mieux, je suis moins stressée, mes collègues me trouvent plus reposée et sans doute plus agréable à vivre au quotidien.
Consciente que tout le monde n’a pas la possibilité de consulter cet excellent praticien, je poursuis ma quête de vie saine et prends rendez-vous auprès d’un naturopathe deux semaines plus tard. Prise au jeu, je commande une cigarette électronique Cross pour arrêter de fumer et… j’arrête de fumer. L’honnêteté me pousse à écrire la vérité : à ce moment précis de mon enquête, je pars en vacances à la montagne. L’altitude, un air pur qui m’assomme, la promiscuité avec ma famille induite par la petitesse de l’appartement de location m’ont bien aidée. La délocalisation géographique est un facteur déterminant pour rompre en douceur avec ses mauvaises habitudes.
Retour huit jours plus tard en Île-de-France – sa cuvette, sa pollution, son métro et ses tentations. D’autant que tartiflette, fondue et autre raclette ont eu raison de ma ligne. Je culpabilise, ce qui est mauvais pour la santé et pèse sur ma conscience. Heureusement, le docteur Jean-Philippe Zermati, médecin nutritionniste, auteur de M
aigrir sans regrossir, est-ce possible ? (Ed. O. Jacob - 2010) me rassure sur mon (dés)équilibre alimentaire, qui ne se calcule pas sur une journée, ni même sur une semaine. Ce n’est pas parce que j’ai fait l’impasse sur les fruits et légumes pendant huit jours que mes os vont se briser ou que mes
cheveux vont tomber.
Puis vient le jour de mon rendez-vous chez Odile Chabrillac, coach naturopathe, auteur de
Les aliments qui rendent intelligent (Plon 2008). Cette femme est une publicité vivante pour la vie saine (adieu famille Ricoré, je veux être comme Odile). Elle m’explique que le corps humain est porteur d’une force vitale que le naturopathe va préserver et/ou stimuler. C’est parti pour une heure et demie de consultation sur mesure : elle me pose des dizaines de questions, prend mon pouls chinois, observe à la loupe le bout de mes doigts, mon iris, touche mes oreilles, me fait tendre le bras paume ouverte vers le ciel. J’ai en face de moi un véritable inspecteur en train de mener son enquête, de remonter mon fil d’Ariane. Le but de ce bilan est d’établir mon programme d’hygiène vitale.
Pas si simple
Cette première consultation me donne l’impression de pénétrer un univers complexe, avec des règles de vie compliquées nécessitant un véritable engagement de ma part et une implication sur le long terme. Tel l’apprenti jardinier, je dois commencer à faire connaissance avec mon terrain. En attendant de concourir pour le prix du plus beau jardin de France, je demande quelques conseils simples pour démarrer une vie saine sur de bonnes bases. La coach me recommande de m’éloigner autant que faire se peut des champs électromagnétiques qui m’entourent. Concrètement et dans le désordre : lâcher mon ordinateur et faire une pause toutes les deux heures (comme pendant un long trajet en voiture), éviter de porter une montre à quartz, éteindre mon portable dès que possible et tester les bienfaits du Bol d’air Jacquier afin de réguler mon oxygénation. Je décide mentalement que je suis suffisamment oxygénée pour les six prochains mois. En ce qui concerne l’alimentation, que des règles de bon sens : manger le plus frais possible des fruits et légumes de saison, boire de l’eau faiblement minéralisée, prendre du pain complet bio et remplacer l’huile d’arachide par de l’huile d’olive et de colza, première pression à froid. Enfin, elle me conseille de faire des pauses (cinq minutes montre en main à ne rien faire du tout) pour me sortir de la frénésie ambiante, chronophage et pourvoyeuse de stress, très mauvais pour ma santé.
Bilan : Vivre sainement est une idée qui fait autant rêver qu’elle panique. Renoncer, au nom de ma bonne santé, à mes bonnes vieilles addictions au tabac, au sucre, au téléphone portable, à Internet est très difficile. Aux grands principes, aux règles multiples (et souvent contradictoires), je préfère la politique des petits gestes faciles à intégrer dans mon quotidien, comme remplacer une huile ou une eau minérale par une autre, ou choisir une fois pour toutes du pain complet bio. Après quelques semaines, je réussirai finalement à lâcher mon téléphone et mon ordinateur sans trop de difficulté. Il m’arrive même d’oublier d’allumer mon portable et de m’en trouver mieux.