C’est fini, l’État apporte sa garantie, et va nommer les liquidateurs. Le CIF est mort et son Président sacrifié.
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
Ce week-end fut décisif pour le Crédit Immobilier de France. Nous vous annoncions il y a déjà quelques temps que le CIF était condamné, nous vous disions jeudi dernier que le crash était imminent, eh bien c’est fait, le Crédit Immobilier de France s’est écrasé après une longue chute pendant laquelle, invariablement, les décisionnaires nous répétaient l’antienne « jusque là tout va bien, jusque là, tout va bien…» .
Vendredi 31 août au soir, le dernier conseil d’administration du Crédit Immobilier de France s’est tenu. Appel a été lancé à l’État pour sauver le CIF. Bercy n’a pas répondu par une nationalisation ni par un sauvetage. L’État apportera sa garantie afin de permettre la levée des fonds minimums permettant à l’établissement de poursuivre son activité…. dans le cadre d’une gestion « en extinction ». C’est-à-dire, pas d’affaire nouvelle, réduction des effectifs, transfert d’activités sur d’autres structures. Le modèle cité est Dexia (tiens, tiens, gageons que parmi les rapaces qui se partageront la dépouille de CIF, nous trouverons…. La Banque Postale). «Il n’est pas question de nationaliser le CIF», assure-t-on à Bercy. Même si nous ne sommes effectivement pas dans le scénario d’une nationalisation, il n’en demeure pas moins que l’État impose sa loi.
Exit Claude Sadoun, et sans indemnités, s’il vous plaît ! Cette précision est écrite en toutes lettres sur le communiqué de presse du ministère qui annonce la mise en place de la garantie et réitérée avec force par J.-M. Ayrault à la radio. Si cette sortie n’est pas glorieuse, au moins cet énergique dirigeant qui avait constitué le groupe en un peu plus d’une dizaine d’années, qui avait réussi à sauver les actifs de son établissement quand l’État avait cherché à s’emparer de ses 3 milliards d’euros de fonds propres et qui avait même eu gain de cause devant le Conseil d’État en mars dernier face à l’Autorité de Contrôle Prudentielle(*) [1], n’aura-t-il pas à conduire son bébé à la morgue. C’est peut-être le tandem mis en place vendredi dernier avec Bernard Sevez, un administrateur du CIF nommé PDG, et Patrick Amat, directeur financier, nommé au poste de DG qui se chargeront de la sale besogne. Peut-être car ils ne semblent pas (d’après les « on dit » des gens qui se disent bien informés, mais auxquels en l’occurrence, votre serviteur accorde quelque crédit) avoir la pleine confiance du ministre Moscovici.
Là-dessus, il faut quand même évoquer la déclaration de Jean Marc Ayrault qui a assuré hier, dimanche 2 septembre, lors de l’émission « Tous politiques (29'55'')» sur France Inter, que « comme cet établissement dispose de fonds propres, l’argent des contribuables ne sera pas mis en cause ». La garantie que dès lundi l’État sera amené à présenter est déjà de 4,7Md€. On estime qu’à terme elle s’élèvera à 20Md€. Les fonds propres évoqués par le premier ministre s’élèvent quant à eux à 1,6Md€ (au dernier bilan connu (p.25), puisque le CIF n’a pas publié ses comptes)… Bon, il faut reconnaître que les encours s’élèvent à 32,9Md€, mais, cher premier ministre, il ne s’agit pas de fonds propres… Toujours est il que l’État accepte de garantir, avec l’argent des contribuables le refinancement d’un établissement auquel les investisseurs indépendants ne veulent plus prêter, ne l’estimant pas fiable ! Affirmer de la sorte que l’opération ne coûtera pas un cent au contribuable me semble quelque peu téméraire….
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Sur le web.
Note :
- L’ Autorité de Contrôle Prudentiel, autorité de tutelle, avait demandé au CIF de renforcer ses capitaux propres et réclamait au CIF un ratio de solvabilité d’au moins 12% avant le 31 mars 2010. Le CIF avait alors engagé un recours auprès du Conseil d’État afin de faire annuler la décision de l'ACP. Le juge administratif a finalement donné raison au CIF et a décidé que le Crédit immobilier de France n’avait pas besoin de renforcer ses capitaux propres. La juridiction administrative a donc annulé la décision de l'ACP le 5 mars dernier et a condamné l’État à verser 1 500 euros au CIF. Le flingage de Sadoun, tant dans le communiqué de presse que dans l’intervention radiophonique de J.-M. Ayrault ressemble un petit peu à un règlement de compte sur fond de démagogie. Notre Premier Ministre n’a pas l’élégance de s’abstenir de tirer sur une ambulance… ↩