Il faut remonter ŕ 1982 pour retrouver la premičre mention du concept FIMA, Future International Military Airlifter, ŕ l’origine de l’A400M, au terme d’innombrables rebondissements. Compte tenu de la longueur et de la complexité de la genčse du transport militaire européen, le nouveau glissement du calendrier de moins de 6 mois, qui vient d’ętre révélé, mérite l’absolution. Mis ŕ part le fait que l’imposant turbopropulseur TP400-D6 du consortium Europrop International ne sort pas grandi de ce nouvel incident de parcours. C’est lui, en effet, qui est en cause, et lui seul.
Un essai d’endurance de 300 heures de vol que menait l’avion n° 6 a dű ętre interrompu toutes affaires cessantes, aprčs 160 heures, en raison de l’apparition répétée de copeaux métalliques dans un réservoir d’huile. Du coup, Airbus et le motoriste ont dű reporter ŕ plus tard la suite de cet essai important, imposé par l’EASA, Agence européenne de la sécurité aérienne, en vue de l’homologation civile de ‘A400M. Lequel, pour le moment, ne dispose que d’un certificat restreint.
Sans ętre un coup dur, c’est une mauvaise nouvelle pour le programme. Tous les moteurs déjŕ livrés vont retourner en usine pour ętre modifiés, les causes du mal étant d’ores et déjŕ identifiées et donnant lieu ŕ une modification actuellement en cours de validation. Mais, du coup, la livraison du premier avion (ŕ l’armée de l’Air française) est reportée Ťau deuxičme trimestre 2013ť, soit grosso modo prčs de 6 mois de retard par rapport ŕ un calendrier qui avait déjŕ beaucoup souffert de problčmes antérieurs. En revanche, Airbus Military prévoit toujours de livrer quatre avions l’année prochaine, trois ŕ la France, un ŕ la Turquie. La montée en puissance deviendra ensuite réalité, par étapes, ŕ partir de 2014.
Au-delŕ des cinq avions utilisés pour le développement, et qui ont accumulé 3.700 heures de vol, trois appareils prennent actuellement forme sur la chaîne d’assemblage final de Séville, la fabrication de 10 autres est entamée et les approvisionnements ŕ long terme sont engagés pour un total de 23 exemplaires. A terme, la cadence de production de l’A400M doit atteindre deux avions et demi par mois, étant entendu que les commandes passées par les huit Etats clients, via l’OCCAR, portent sur 174 appareils. Cela sans préjuger de la suite, compte tenu de grands espoirs de succčs ŕ l’exportation.
L’A400M, pourtant un avion bien-né et déjŕ réputé tel, aura décidément connu de multiples difficultés liées ŕ sa motorisation. Laquelle est confiée ŕ EPI qui réunit Snecma, Rolls-Royce, MTU Aero Engines et l’industriel espagnol ITP, actionnaires du consortium, rejoints par des fournisseurs de premier rang parmi lesquels Avio (Italie) et Techspace Aero (Belgique). Lors d’épisodes antérieurs, c’est notamment la régulation électronique du TP 400 qui a posé problčme. Quoi qu’il arrive, il ne faudra pas attendre que toutes les leçons soient tirées d’incidents ŕ répétition pour confirmer qu’un calendrier trop serré a été imposé au maître d’œuvre et ŕ son motoriste, tandis que le budget forfaitaire initial était de toute évidence irréaliste. D’autant que le turbopropulseur TP 400 affiche une puissance de 11.000 chevaux équivalents, sans précédent dans le monde, ex-URSS mise ŕ part.
De toute évidence, les armées clientes de l’A400M vont examiner les données propres ŕ ce nouveau rebondissement avec inquiétude, ŕ commencer par la France dont les C160 Transall sont ŕ bout de souffle. D’oů l’impatience avec laquelle est attendu le début des livraisons des 50 A400M qu’elle a commandés. Apparemment, les conséquences fâcheuses de ce nouvel incident de parcours s’annoncent néanmoins trčs limitées.
Pierre Sparaco - AeroMorning
(Photo: Daniel Faget)