Avant ma coupure d'internet, vous vous rappelez sûrement que je vous avais entretenus d'une série néo-zélandaise Hounds. C'est pas que la saison soit longue : 6 épisodes. Mais il s'avère que quand j'ai fini par rattraper mon retard, à l'issue duquel j'ai vraiment eu envie d'acquérir le DVD de la série. Ce qui fut dit, fut fait, et me voilà aujourd'hui devant vous pour chanter les louanges d'une dramédie vraiment pas comme les autres. Et avec, en guise de bonus, un nouveau test de site internation pour vous procurer des séries étrangères, c'est cadeau.
A l'époque du pilote, j'avais pu vous dire combien le ton de Hounds n'était pas aux singeries, mais se situait plutôt dans un humour pince-sans-rire et à contretemps du plus bel effet. Cette impression est renforcée par mon visionnage de l'intégrale. Ce qui fait de Hounds une si grande réussite, c'est son goût à la fois de l'absurde, du grossier même, et pourtant, son sens de la subtilité. La série a choisi un contexte rustre, présente plusieurs personnages mal dégrossis, et pourtant, elle parvient à maintenir une certaine finesse. L'équilibre semble instable sur le papier mais les épisodes sont au final très réussis grâce à ce sens de la mesure.
Qui plus est, la série refuse d'aller là où on pourrait s'attendre. Quand, dans le pilote, Will est contraint de revenir dans la vie de sa demi-soeur, plus jeune que lui de près de 20 décennies, et qu'il n'a jamais rencontrée, on s'attend surtout à ce que les personnages se retrouvent confrontés à leurs différences. Avec, d'une part, Lily et l'entraîneur canin Marty, plongés dans l'univers des courses de chien, et de l'autre Will et sa petite amie Amber, un peu snobs. Mais pas du tout. Déjà parce que Will, même si au début il le fait à reculons, cherche vraiment à s'intégrer dans cet univers. On n'est pas dans une logique typique de tant de séries, où l'humour repose sur le fait qu'un personnage extérieur se retrouve plongé dans un monde qui lui semble absurde, fou, ou les deux, mais plutôt dans une série où Will accepte sans manières de devenir un peu absurde et fou.
La série va plusieurs fois, en l'espace d'à peine 6 épisodes, prendre des décisions étranges, sur lesquelles je ne m'avance pas, mais qui se traduisent aussi bien dans la vie sur le champs de course qu'au boulot de Will. Et comme Hounds n'est pas du tout prévisible sur le long terme (et assez peu sur le court terme), ça la rend délicieusement rafraîchissante, forcément.
Mais ce n'est pas tout, car très vite, on comprend que Hounds est aussi et avant tout une histoire de tendresse. Celle, naissante, entre Will et Lily, bien-sûr, à laquelle on pouvait évidemment s'attendre. Mais aussi l'affection que porte Lily à Lundy Dixon Watson, le chien de son défunt père, et à l'entraîneur Marty. Le clan se soude très vite autour de questions qui auraient pu faire débat, de façon à vite former un noeud de personnes qui ne se comprennent pas forcément, mais qui s'acclimatent très vite à la vie ensemble, et l'apprécient.
Lily, en particulier, va s'attacher à Will d'une façon qui a de quoi arraché des petits sourires émus au spectateur. Rappelons que le personnage est celui d'une adolescente plutôt futée (mais, on l'a dit, par irritante ni supérieure), sarcastique, et consciente de ne pas forcément baigner dans un monde où les adultes sont très sérieux. Mais sa rapidité à tenir pour acquise la présence de Will dans sa vie adoucit incroyablement le portrait, et permet de sortir des poncifs sur l'adolescente trop intelligente. Et puis, Lily n'est parfois qu'une jeune ado comme les autres, futée, oui, mais terriblement vulnérable, et capable de ressentir des déceptions, et ainsi, tout en restant la force motrice de bien des intrigues, elle présente une sensibilité qui la fait vraiment sortir du lot des personnages adolescents équivalents. Je n'ai aucune idée de l'âge de l'actrice (difficile de dire si Susana Tang a vraiment l'âge de Lily), mais je l'ai trouvée étonnante.
Mais cette tendresse dont je vous parlais ne s'arrête pas là. Hounds parle de courses de lévriers, et est décidée à en parler avec la plus grande douceur, et une complaisance touchante. Dans cette série, l'adjectif "populaire" n'est pas pris comme un terme péjoratif : les courses de lévriers sont, certes, le loisir d'une certaine catégorie de gens, pas forcément très raffinés, mais ils ont du coeur, non seulement parce qu'ils aiment ce qu'ils font, mais aussi parce qu'ils aiment leurs chiens, et enfin, qu'ils aiment les autres gens qui font comme eux et aiment leurs chiens comme eux.
Et la force de Hounds, au bout du compte, c'est d'apprendre à connaître cette communauté dans laquelle avoir son propre boc au bar du champs de course est un signe extérieur d'importance sociale, où se murger le soir pendant les courses est au moins aussi important qu'entraîner son clébard le reste de la semaine, et où on accueille à bras ouvert quiconque a l'esprit dans la même configuration. Ce n'est pas pour rien qu'on assiste moins souvent, dans la série, à des scènes au bar, qu'à des courses de chiens...
Voir Will ne pas s'opposer à tout cela, se laisser gentillement emporter, même s'il ne comprend pas tout, est vraiment l'oeuvre de cette première saison pleine de charme. Il apprend à aimer les us et coutumes du champs de course ; à parler avec ces gens au lieu de les regarder de haut parce que lui, môssieu, est avocat ; il s'ouvre à une nouvelle expérience qui n'avait rien de super prestigieux, et c'est une jolie aventure à observer.
Mais n'allez pas croire que tout n'est que bons sentiments dans Hounds. En dépit de son caractère bon enfant, la série a aussi des passages plus sombres à proposer, et non des moindres ; c'est ce qui l'empêche de se qualifier comme comédie, quand bien même elle en utilise de nombreux ressorts. Qu'en l'espace de 6 épisodes, elle revienne à deux fois sur une question de décès, n'est par exemple pas innocent. Sans parler, à mesure que la série progresse, des questions financières qui commencent à être soulevées...
Hounds a aussi une part plus terre-à-terre, qui finalement colle bien à l'univers populaire qu'elle s'est choisi, et nous ramène à la réalité plusieurs fois. Une certaine réalité, bien-sûr, un peu farfelue, mais réalité quand même.
Et c'est avec cette sincérité étrange, que Hounds accomplit son charme. Ce n'est pas une série qui vous fait vous esclaffer de rire systématiquement (ça arrive, cela dit), il faut vous y préparer, mais c'est une série qui oscille énormément dans le ton qu'elle s'est choisi, et qui réussit quoi qu'il arrive à atteindre son but. Le second décès sera même extrêmement déchirant, ce qui est absolument ridicule quand on connaît la durée de la saison !
Hounds est comme ses chiens : improbables créatures filiformes qui semblent fragiles, mais qui ne demandent qu'à détaler et franchir la ligne d'arrivée avec brio. Ca a été pour moi une très jolie rencontre que cette série au ton particulier.
Alors tout ça pour dire : vous pensez bien, l'expérience Hounds cet été a été couronnée de succès à tous les niveaux.
Et d'ailleurs, en parlant de succès, la production de la série espère actuellement qu'on lui commandera une saison 2 (et j'ai lu plusieurs articles encourageant la chaîne TV3 à aller dans ce sens, dans la presse en ligne néo-zélandaise), donc avec un peu de chance, on reparlera encore de Hounds !