Les Portugais sont de plus en plus nombreux à migrer vers l’Angola pour améliorer leurs conditions de vie. Grâce à leurs revenus gagnés dans le pays, nombre d’entre eux envoient de l’argent à leurs familles au Portugal, ravagé par la crise économique. Une initiative encouragée par les autorités portugaises qui incitent les jeunes chômeurs à tenter leur chance vers les ex-colonies lusophones pour trouver du travail.
L’Angola, nouvel eldorado des Portugais. Ils seraient plus de 20 000 par an à affluer vers l’ex-colonie portugaise pour tenter d’améliorer leurs conditions de vie. La crise économique n’a pas épargné le Portugal. Avec un taux de chômage de 15%, le pays tourne au ralenti. Pis, un jeune sur trois serait à la recherche d’un emploi. Alors pourquoi ne pas tenter sa chance de trouver un travail vers les ex-colonies portugaises ? C’est la question que pose le Premier ministre portugais Pedro Passos Coelho. Il a récemment appelé les jeunes enseignants chômeurs à migrer vers le Brésil ou l’Angola. Des propos qui ont fait scandale. Pourtant, son appel a été suivi. Les pères de familles portugais, eux, aussi incitent leurs enfants à tenter leur chance de s’en sortir dans des pays comme l’Angola.
Des migrants portugais en Angola envoient de l’argent à leurs familles au Portugal
Après avoir vécu plusieurs décennies de guerre civile après son accession à l’indépendance en 1975, l’Angola s’apaise peu à peu même si les tensions sont toujours de mise. Le pays, deuxième producteur de pétrole après le Nigeria, a connu une ascension économique fulgurante ces dernières années. L’Angola fourmille de chantiers. Les grandes constructions poussent un peu partout dans la capitale Luanda. L’ex-colonie portugaise a besoin de main d’œuvre de plus en plus qualifiée. Une demande à laquelle les Portugais sont de plus en plus nombreux à y répondre. Ingénieurs, banquiers, architectes, enseignants déposent leurs valises à Luanda sans prendre le billet de retour pour Lisbonne. Ils n’hésitent pas à embarquer avec leur famille. Les salaires étant plus alléchants qu’au Portugal, ils y restent.
Une situation qui inquiète le chercheur à l’université technique de Lisbonne et des questions migratoires Joao Pexoto. Lors d’un entretien accordé à France info, il estime que si tous ces cerveaux ne reviennent pas au Portugal, ce sera préoccupant pour l’économie du pays. Selon lui, les chiffres actuels du nombre de portugais fuyant la misère du pays, est bien en deçà de la réalité. Ils seraient beaucoup plus nombreux dans les faits.
« Le nombre d’immigrés portugais en Angola est impressionnant », assure Didier Péclard, chercheur spécialiste de l’Angola à la Fondation Suisse, contacté parAfrik.com. « La relation économique entre les deux pays n’a jamais été interrompue. Le plus étonnant, c’est que le sens du transfert d’argent s’est inversé, affirme-t-il. C’est désormais les immigrés portugais en Angola qui envoient de l’argent à leurs familles au Portugal ». Le chercheur rappelle notamment que « l’Angola était considéré à l’époque coloniale comme le joyau de la couronne portugaise ».
Des immigrés portugais expulsés d’Angola
Même si on ne peut pas dire que le Portugal vit actuellement une émigration massive comme celle qu’il a connue dans les années 60, où des pays comme la France accueillaient les chômeurs portugais, le phénomène prend toutefois de l’ampleur, selon Joao Pexoto. Mais ce tableau idyllique a aussi des failles. D’après le chercheur Didider Péclard, « l’arrivée des migrants portugais dans le pays donne parfois lieu à des conflits. Certains d’entre eux sont nostalgiques de l’ère coloniale et de nombreux entrepreneurs se plaignent que les autorités angolaises leur mettent des bâtons dans les roues ».
D’ailleurs, en juillet 2011, quarante deux portugais qui travaillaient au noir en Angola ont été expulsés par les autorités. Face à ce flux d’immigrés qui ne cesse d’augmenter, « l’Angola ne fait qu’appliquer de manière rigoureuse les bonnes pratiques internationales en matière de migration », avait assuré ce responsable angolais.
La presse portugaise n’a, elle, pas manqué de faire le constat de l’augmentation du nombre de migrants portugais en Angola. « La vieille Europe déprime. La zone euro est au bord de l’implosion et la récession menace. En Afrique, la croissance économique se maintient. Et si les jeunes Européens traversaient la Méditerranée pour émigrer ? », questionne un quotidien de Lisbonne. En 2006, seulement 156 visas de Portugais en partance vers l’Angola étaient recensés. En 2011, leur nombre a explosé, atteignant 23.787. En 2012, on compte près de 100 000 Portugais résidant en Angola, soit le triple des Angolais installés au Portugal. Qui l’aurait cru que l’Angola deviendrait un jour le recours à la misère de milliers de portugais ?