Aujourd'hui, crise de démagostalgie.
Ce n'est ni une découverte, ni un scoop (je veux dire... une exclusivité), mais si la langue française se défend plutôt bien, qu'est-ce qu'elle est attaquée ! Qui fait encore un effort pour trouver le mot juste, au moins à l'occasion d'une expression publique ? L'autre matin, j'entendais le porte-parole (celui qui, donc, assume la lourde responsabilité de parler pour les autres, en leur nom) des athlètes français participant aux Jeux paralympiques lequel, pour exprimer l'idée simple qu'il était arrivé avant les autres athlètes et qu'il résidait depuis plusieurs jours dans la capitale du Royaume Uni, n'a pas eu peur de lâcher à la radio (France inter) : "Je suis sur Londres depuis une semaine". Ah bon, lui, c'est le parachute, son handisport ? Le parachute géostationnaire, au-dessus de Londres ? Hier soir, c'était Darkhorse au cinéma, film par ailleurs de peu d'intérêt ; à trois reprises, lorsque le héros affirme que pour lui c'est OK ('It's OK!') les sous-titres ânonnent "Pas d'souci"... Trois fois. Ben si, y en a un, d'souci, c'est qu'à force de faire de notre baragouin quotidien un grand n'importe-quoi, on finira par ne même plus se comprendre entre nous. Quand on pense qu'une prof certifiée qui, pour décrocher son CAPES de français moderne, a dû triompher d'une épreuve de grammaire médiévale, prétend qu'elle a eu un poste sur Toulouse et que dans ce charmant coin de France, au niveau des relations avec l'équipe pédago, ça va ; ben non, ça va pas.
Je ne vais pas y passer tout ce billet, j'y reviendrai peut-être un de ces jours, j'aimerais bien écrire là-dessus mais il faut que je trouve le temps, mais quand même, j'ai rien d'un fondamentaliste de la langue, j'adore que cette langue si vivante se nourrisse des richesses des autres langues et s'embellisse de nouveautés, mais faisons gaffe un peu à pas trop se torcher avec des expressions toutes faites, prêtes à parler, bien synthétiques (un mot employé égalant dix ou quinze notions du dictionnaire), sinon le français va se ratatiner jusqu'à devenir un patois de plus. Face à, justement, l'anglo-américain.
Oui, l'anglo-américain. C'est marrant, bientôt 70 ans après La Libération, le dernier snobisme, c'est de causer l'anglais, de truffer d'anglais nos pauvres phrases dans lesquelles un Save the Date cotoie un Wedding Stop Motion (avec toutes les majuscules, aussi pompeuses que superflues). Et pour revenir à mon sujet, c'est en me baladant gentiment par les rues de Paris que j'ai pris conscience de l'état avancé de la contamination angloïde.
Au moins la moitié de la matière commercialo-publicitaire qui forme l'environnement obligé du parisien promeneur se déverse sur lui en anglais. Je ne donnerai pas d'exemple, ouvrez les yeux, c'est une évidence, j'ai d'ailleurs l'impression désagréable d'enfoncer une porte ouverte en écrivant ce billet. Jusqu'aux titres des films traduits directement des différentes langues dont la planète peut s'enorgueillir en anglo-américain, par exemple du colombien (Inside), du coréen (The day he arrives), du japonais (Guilty of romance), de l'israélien (The exchange) et comble du ridicule, de l'américain (The secret, traduction de The tall man, My best men qui francise A Few Best Men -- subtile différence --, sans oublier Rock forever, titre français de Rock of Ages et surtout, un très joli film, The Dynamiter, traduit par Summertime).
Toujours au chapitre du cinéma, pourquoi avoir privilégié la langue anglaise pour l'adaptation bling bling de La confession d'un enfant du siècle ? La musique n'est pas en reste et la sortie prochaine d'un album de la délicieuse Lou Doillon, fille de Jacques, totalement en anglais, me chagrine. Alors que l'abandon du français par la plupart des groupes du rock hexagonal (du médiocre Revolver au ridicule Shaka Ponk) semble signer un abandon de l'écriture au motif crétin que le français serait une langue qui, bien sûr, ne sonne pas. Parles-en donc à Bashung.
Et puis tous ces mots empruntés à une autre langue qui n'apportent rien : prequel, vintage, coach, stop motion, hipster, lo-fi , jetlag , ces traînées qui traînassent sur les trottoirs, les blogs et les magazines chic ... Et puis, ce débat ridicule via Libé et Les inrocks (ma presse, par ailleurs, préférée), à propos de la meilleure façon de traduire Dark horse : faut-il traduire par outsider ou loser ? Heum.
Non, ce qui m'a frappé cet été, c'est les t-shirts.
Quelqu'un peut-il me donner une bonne raison pour laquelle les inscriptions qui ornent (?) les t-shirts en France sont systématiquement (ou presque) rédigées en anglo-américain ? J'imagine que ça fait mieux, sur soi, mais j'imagine aussi que les porteurs de maximes anglophones souvent incompréhensibles n'ont pas vraiment le choix. Sauf à s'imaginer, que c'est tellement cool de porter un vêtement qui fait américain. Même s'il est fabriqué en Chine. Au fait, pourquoi pas des inscriptions chinoises ? Au moins, ce serait original. Et puis tous ces petits mecs, ces petites nanas qui s'emmerdernt en cours d'anglais et s'affichent dans la rue en lointains héritiers des Fruits of the loom...
Poursuite aujourd'hui de la balade estivale dans Paris, en photos. De la Place des Vosges à Beaubourg, en passant par la rue du Temple où mon passé m'attendait au Comptoir Général Parisien (ma mère y a travaillé quarante ans, mais ça a changé). Enfin, un tour de manège au soleil des Tuileries.
Avec une chanson en tête, Paris est encore plus parisienne. Je poursuis avec Barbara, qui savait si bien faire sonner la langue et l'album Le mal de vivre enregistré en 1964, un des plus beaux. C'est la chanson-titre que je dédie à toutes et tous celles et ceux qui en ont chié récemment, qu'ils aillent mieux ou pas mieux, en leur disant : écoute jusqu'à la fin, cet espoir est pour toi.
Place des Vosges, en plein milieu, pousse l'herbe aux enfants et aux amoureux. On peut s'y étendre et attendre un temps plus clément. Puis flâner, un chapeau sur la tête, le coeur rayonnant du soleil d'été.
Cette dernière pour se rappeler le Bleu du ciel.
Puis nous sommes partis faire la fête aux Tuileries.
Ce jour-là nous sommes rentrés par les quais puis, dans le Marais, recherchant les graffiti obscènes charbonnés à la porte des appartements observés en son temps par Marcel P. et nous sommes revenus, en pensée, vers la librairie de la rue Saint-Maur, la Libralire, des envies de liberté en tête. Le ciel de Paris, comme le Jardin des Tuileries, était en fête.
A suivre dans quelques jours.
Rien à voir,
mais à voir.
La Septième livraison d'Edwarda
La plus classe des revues de cul avait sorti son n° 7 en avril
(pour mon anniversaire ?) et j'avais omis de la saluer ici.
C'est donc chose faite. Je ne taris pas d'éloge sur cette revue
chique et choque, littéraire, vulgaire et raffinée,
très belle et très chère, comme une vraie femme fatale de cinéma.
(Evidemment, cette publicité n'est pas sponsorisée.
Il est des domaines où rien n'égale l'acte gratuit).