La dernière idée de Nicolas Sarkozy en matière de réforme semble être passée relativement inaperçue : sous prétexte de redonner du pouvoir d'achat aux Français, Nicolas Sarkozy souhaite transformer les mécanismes actuels d'intéressement et de participation en "prime annuelle" et en profiter aux passage pour les soumettres aux cotisations retraite. Pour faire passer la pilule, les sommes ainsi taxées seraient prises en compte pour le calcul des droits à la retraite.
Un tel projet mériterait pourtant un large retentissement tant il est révélateur des faux-semblants de la rupture, de l'absence totale de cohérence de la politique élyséenne et du cynisme clientéliste de son principal insparateur en passe de se transformer en un détonant mélange des Présidents Queuille et Chirac. En voici quelques illustrations :
1/ Le gain de pouvoir d'achat est un prétexte illusoire
Il faut rappeler que, dans le régime actuel, si la participation ne peut être débloquée avant 5 ans que dans un nombre de cas limité de cas (acquisition de la résidence principale, mariage etc), l'intéressement peut en revanche déjà faire l'objet d'un versement immédiat en faveur du salarié (mais devient alors imposable à l'impôt sur le revenu alors qu'il est soumis aux seuls prélèvements sociaux si le salarié fait le choix du blocage pendant 5 ans).
Dans le régime envisagé par notre champion du pouvoir d'achat, les salariés qui perçoivent déjà immédiatement leur intéressement ne gagneront rien en termes de pouvoir d'achat, mais au contraire en perdront, puisque la somme qui leur sera versée sera désormains amputée du montant des cotisations-vieillesse. Du coup, ils devraient payer un peu moins d'impôt sur le revenu. Maigre consolation... Quant à ceux qui bloquaient leur intéressement, ils perdront un quart des sommes perçues avec un décalage de 5 ans.
La seule motivation du projet de réforme élyséen se résume donc en fait à tenter de taxer les quelques milliards qui échappaient encore au Moloch des charges sociales.
2/ Faut-il relever qu'un tel projet va totalement à l'encontre de l'objectif affiché de réduire de quatre points le taux de prélèvements obligatoires ?
Ce dont l'économie française a besoin, c'est d'une réforme de sa sphère publique soit pour en améliorer l'efficacité à coût constant, soit pour en diminuer le coût à prestations constantes. C'est la seule voie possible pour restaurer l'investissement des entreprises et espérer voir disparaître le chômage structurel. On n'en prend pas le chemin avec de telles mesures.
3/ Nicolas Sarkozy joue cyniquement de la faible capacité de mobilisation des salariés
Alors que le champion de la rupture a consenti aux cheminots et autres bénéficiaires de régimes spéciaux de retraite d'échanger des gains financiers immédiats contre des efforts lointains et incertains, Nicolas Sarkozy veut imposer aux salariés des efforts financiers immédiats en échange de gains lointains et incertains en tablant sur le fait qu'ils n'ont pas la capacité de bloquer le pays.
Dans un grand numéro de foutage de gueule, Nicolas Sarkozy nous déclare qu'il souhaite que "les salariés ne puissent pas dire, on s'est moqué de moi, on me donne du pouvoir d'achat mais ça ne compte pas pour la retraite". Cela ne risque pas. Lors du premier versement d'interessement auquel s'appliquera le nouveau projet, ils pourront se dire : "On s'est bien foutu de ma gueule, on m'a piqué du pouvoir d'achat et en plus, je ne suis pas sûr d'en profiter pour ma retraite".