La route du rock 2012 – live report

Publié le 31 août 2012 par Acrossthedays @AcrossTheDays

Vendredi 10 août – interviews, fun et concerts

Arrivée au fort avec l’impression d’avoir pris une douche de sueur. Avec ma pote Marie du blog TEA, on plante notre tente et on enfile nos shorts, steady ready.

Il faut savoir que je ne dormais plus depuis trois jours : je rêvais à l’interview d’Alt-J, prévu à 17h50. Je me pointe à l’espace press avec mon pass – je me sens un peu puissante là – et on m’annonce après un peu d’attente que mon interview va être annulée parce que le groupe a pris trop de retard. Ah mon dieu, tous mes rêves torpillés, tous les films dans ma tête balayés, bref je suis extrêmement dépitée. Jusqu’à ce que je me dirige vers la scène pour voir leur concert et croise une bonne étoile : Nico Prat, journaliste au Mouv’. Je lui explique pourquoi j’ai du chagrin. « Ah mais si tu veux, ils sont en interview avec moi après leur concert, viens et puis on essaye d’arranger un truc ». Je souris à nouveau à la vie.

La performance d’Alt-J est bien. Une horde de fans en frontrow crie « LET’S TESSELATE ! » en faisant une forme de triangle avec leur main. C’est cool même s’ils chantent un peu faux. Je suis très sensible à leurs mélodies, au jeu délicat des guitaristes, aux harmonies de voix, mais il m’a manqué quelque chose.  Les rythmes de batterie qui ont ce groove si particulier n’étaient pas mis en valeur par le son, alors que je n’attendais qu’une chose : sentir tout mon corps vibrer. En outre, je pense que leur musique ne se prête pas tellement au plein de soleil de festival. Elle nécessite un espace plus intimiste, de la pénombre, une salle. Idéalement, j’aurais aimé les voir vers 22h, au coucher du soleil. Ça reste un de mes concerts préférés, même si j’en attendais plus.

Ma grande victoire de la soirée a été de pouvoir négocier dix minutes d’interview avec le bassiste – on remarquera sa performance aux castagnettes pendant le concert – et le batteur. On bavarde un peu, ils sont plein d’humilité et de gentillesse, et moi je les écoute, un sourire niais collé au visage.

Alt-J  

Je n’étais pas mécontente de louper Dominique A à cause d’une interview délire avec les Civil Civic, qui sont absolument à bloc pour le concert du soir. Ils sont australiens, ils sont funs et ils font des métaphores qui parlent de McDonald pour parler de leur musique ; bref, vous en saurez plus bientôt (quand j’aurai retranscrit ces 20 minutes de n’importe quoi).

J’enchaîne avec le concert de Spiritualized. Je n’étais ni excitée, ni mécontente de les voir, simplement curieuse, vu que tout le monde autour de moi me criait que c’était génial. En effet, c’est sympa. Je ne suis pas transcendée pour autant, mais j’ai apprécié la nonchalance classieuse du chanteur. Je connaissais « Hey Jane » qu’ils ont joué en ouverture du set et il y a vraiment eu de beaux moments. Bon, je reconnais que c’est un peu trop progressif pour moi. Parfois les chansons n’en finissent pas et ça me donne l’impression d’être hypnotisée, un peu comme quand tu prends de la drogue. Mais j’ai beaucoup aimé le détail qui tue dans ce groupe de rock prog aux teintes nineties : deux choristes blacks aux voix magnifiques. Le contraste était génial, entre le son crade des instruments, et leurs voix de sirènes qui venaient se poser par dessus. C’était beau.

Civil Civic

Pas de temps mort, tout le monde s’amasse autour de la petite scène de la tour car c’est l’heure du concert de Civil Civic ! Le duo trash des australiens transforme instantanément le fort en boîte de nuit géante (oui, mais une boîte de nuit indé, faut pas déconner) et Ben, le bassiste, fait son petit effet dès son entrée sur scène en balançant un « SALUT LES MECS ET LES MEUFS ! » bien senti. On se prend beaucoup trop de décibels dans la tronche, le son est sale, la guitare crie, mais c’est ça qui est trop bon. Toute la fosse est hystérique, on jump au rythme de leur boîte à rythme faite maison (oui, une vraie boîte au milieu de la scène !) qui s’illumine au son de la caisse claire, du kick, des cymbales. Très beau concept. En fin de set, c’est l’explosion quand ils lâchent le riff de leur tube, Airspray. Je ne sais pas si j’écouterais leur album pour me détendre en buvant un Earl Grey, mais je sais qu’en concert c’est une expérience qui ne laisse pas indifférent. Personnellement j’ai été transportée.

The Soft Moon

Du coup j’étais tellement enthousiasmée par le concert de Civil Civic que j’ai un peu badé pendant The Soft Moon. J’étais toute seule à errer sur le site avec un gros coup de mou (le moment où tu te demandes si tu vas rentrer à ta tente pour retrouver les bras de Morphée), j’arrivais pas à me mettre dans le concert, et les cris du chanteur ne m’ont pas tellement plu. À la limite ils auraient pu faire comme Civil Civic : s’abstenir de chanter. Je garde un vague souvenir d’un son assez new wave… mais bon je ne vais pas m’aventurer plus loin parce que c’est un peu le black out, et pourtant j’avais rien bu.

Ensuite, on a un peu essayé Squarepusher, un gars tout seul qui fait de l’electro violente et parfois déconstruite. Il a un visuel cool, avec un énorme écran derrière lui qui projette des formes géométriques, et la même chose en miniature sur un casque qu’il a sur la tête. J’ai beaucoup aimé la première chanson, je me suis dit « oh, chouette, ça va me sortir de ma torpeur post-soft moon ! », mais en fait à la deuxième et troisième chanson, c’est devenu insupportable. C’était trop abstrait, les sons étaient trop piquants, et de toute manière j’étais beaucoup trop fatiguée pour être tolérante. Donc on est allé se pieuter. Après deux concerts mortels dans la soirée, c’est déjà pas mal.

Samedi 11 août – plage, galettes, The XX

Après avoir mangé une galette à Saint Malo et fait un peu de glande sur la plage, je rentre assez tôt histoire de voir un des premiers concerts de la soirée, et pas des moindres : Veronica Falls. Ils remplaçaient My Best Fiend : merci à eux d’avoir annulé ! Roxanne Clifford, singer songwriter du groupe, est une jolie brune avec une coupe au carré. L’image romantique de la belle en jupe et chemisier est pimentée par des chansons  pop spontanées à l’énergie brute. Les guitares cavalent, tranchantes, et la voix de Roxanne est impeccablement juste. C’est une de mes chanteuses préférées du moment. Surtout quand on se remémore son featuring magnifique sur « Everything Goes My Way«  du dernier Metronomy.

Le seul problème de ce concert agréable, c’est qu’on se rend compte, aux deux-tiers du set, que les chansons se ressemblent. Les lignes de voix sont vraiment chouettes, mais le batteur nous sert toujours le même rythme, et le jeu de guitare finit par manquer de richesse. Tout de même, j’ai beaucoup aimé leur performance malgré ce bémol (mon cœur bat pour « My Heart Beats« ).

Ensuite, je dois dire que je me suis un peu ennuyée  jusqu’aux XX tant attendus. Savages, à écouter avant le festival, m’était apparu comme un girl band qui fait beaucoup de bruit pour pas grand chose. Et j’avais raison. Musicalement, il y a eu des passages intéressants – dans mon souvenir – mais la chanteuse m’a vraiment déplu: mélodies vides, voix criarde… pas trop ma tasse de thé. Lower Dens m’a laissé une impression sympathique, même si j’ai été un peu surprise par la voix de la chanteuse (décidément !). Cependant, à ce moment là, je pense avoir répondu à l’appel de la pizza, des copains assis dans l’herbe…


The XX

Le temps de gober un bout de pizza au thon, et je me retrouve devant l’énorme « X » suspendu dans les airs, tel un totem présageant l’arrivée des Dieux. Oui, les divinités de la soirée, c’était eux : The XX.
Oh, joie, bonheur, volupté, douceur ; après un début de soirée un peu faible, le niveau est remonté en flèche. Le duo de voix est magnifique ; Romy et Oliver donneraient la chair de poule à n’importe qui et je me laisse transporter par leurs timbres veloutés.

Jamie est lui aussi très en forme, entre ses machines, un clavier et même du steel drum pour un morceau (là, il me prend par les sentiments).
Les projections vidéos en fond de scène sont absolument bluffantes : des textures entre eaux sombres et essence aux reflets irisés hypnotisants, un peu comme la vidéo d’ »Angels » Du grand art, mais qui reste abstrait et laisse de la place aux artistes sur scène. Soudain, le public ouvre de grands yeux lorsque le « X » géant se remplit de fumée blanche. Les nouveaux titres ont pas mal de succès, et on découvre des versions alternatives de leurs précédents singles (Crystalised en version lente, par exemple). Leur show est calibré au millimètre, mais leur attitude n’en est pas moins naturelle. La guitariste et le bassiste s’échangent des pas de danse, ils occupent parfaitement l’espace scénique. The XX, un des plus beaux moments du festival.

The XX

Au programme pour la suite : Breton. Véritable phénomène en France, symbole du renouveau en musique indé, j’en attendais beaucoup des anglais et de leur fameux «Breton Labs ».
Sincèrement, ils nous ont fait un concert honnête, portés par le charisme du front man Roman Rappak, et ses chansons qui ont un je-ne-sais-quoi entre la pop et le hip-hop. Mais, comme dirait une copine, « je n’ai pas été saucée » par leur performance. Je m’attendais à une véritable claque et j’ai été un peu déçue, à force d’entendre trop d’éloges à leur sujet. Plusieurs choses : premièrement, le chant me fait un peu trop penser à un certain Yannis du groupe Foals. C’est fatal. Il faut arrêter avec Foals les mecs, la moitié des nouveaux groupes indés essayent de les imiter, ça devient insupportable. Deuxièmement, leurs projections vidéos ne sont pas si classes que ça alors qu’on parle toujours du fait qu’ils sont autant vidéastes que musiciens. Ils pourraient faire un effort. Pour finir, le trop de blabla de la part du chanteur m’a un peu énervée : « Et faites du bruit pour machin à la batterie ! Est-ce que vous êtes chauds maintenant ? » Oui, bon, vous pouviez vous contenter de rester un groupe mystérieux au lieu de jouer les chauffeurs de salle.


Breton – Roman

J’ai quand même été très impressionnée par le niveau de français de Roman (quel accent, my god !), et j’ai beaucoup aimé quand il a commencé par parler anglais pour basculer ensuite vers la langue locale histoire de nous surprendre « mais en fait ça serait bête de ne pas parler français, en plus on est en Bretagne ! » ou un truc comme ça. Grosse classe, ce moment. Je pars me coucher, mi-rêveuse, mi-déçue.

Dimanche 12 août – peu de concerts mais beaucoup d’émotion

« Oh, c’est déjà le dernier jour » est la première pensée qui traverse mon cerveau au petit matin, alors que mes yeux sont encore un peu collés. Une dernière halte à la plage, une glace parfum « caramel d’épices » et on rentre prendre l’apéro puis voir le projet du leader de Pavement, Stephen Malkmus and The Jicks. Honte à moi, l’apéro à coup de tartine de St Morêt a un peu trainé, et le temps de bavarder un peu avec des gens cools à l’espace presse : je n’ai pu voir que le fin d’une chanson. Le seul vrai concert que j’ai vu dans la soirée est celui de Chromatics. Grosse surprise. J’avais trouvé le groupe américain un peu mou sur CD, mais en live ça m’a vraiment enchantée ! Les chansons prennent vie avec la voix magnifique de Ruth, une belle suédoise à l’air nonchalant. Les mélodies sont catchy, les arrangements tendent vers le clubbing sans être de mauvais goût… J’ai vraiment aimé leur prestation. La cerise sur le gâteau a été leur reprise de Neil Young « Into The Black » pour clore le set, chanson qui ouvre leur dernier album « Kill For Love ».

Je ne saurais expliquer pourquoi, mais j’ai été bouleversée, peut-être parce que j’ai souvent entendu cette chanson sur la platine de mes parents étant petite. C’est comme si elle prenait vie devant moi à travers des artistes contemporains. De toute beauté.

Chromatics – Johnny Jewel

Conquise, je décide de filer à la conférence de presse qu’ils donnent après leur live. Johnny Jewel (aux machines dans Chromatics) est encore suant et a l’air légèrement perché : il s’empresse de répondre aux questions avec enthousiasme et passion. Je n’avais pas tellement fait de recherches sur le groupe étant donné qu’ils ne faisaient aucune promo excepté la conférence ; et je découvre avec étonnement que ce mec mystérieux est le pilier de Chromatics, qu’il fait partie du groupe Glass Candy, a contribué à la Bande Originale de Drive, et a même créé son propre label (Italians do it better)… Wow ! C’est le coup de foudre, j’adore la façon dont mister Jewel appréhende la musique qu’il fait, sa vision du live, sa manière de parler… Je tente donc d’engager la conversation juste après la conférence, on ne sait jamais. Trente seconde de blabla sympathique et je lui dit :

« J’avais demandé une interview, mais bon vous êtes tellement occupés… »
« Si tu veux on peut faire une interview maintenant, je me sens bien là. »

Oh my god ! Une interview avec le producteur/songwriter de Chromatics à improviser tout de suite ? C’est parti. Et voilà comment mon téléphone a enregistré cinquante minutes de conversation avec ce cher Johnny, à discuter de musique (of course !), de voyage, de langage, de rêve… Bien sûr, vous en saurez plus dans un prochain article.

Hanni El Khatib

C’est aussi comme ça que j’ai loupé tous les autres concerts de la soirée, entre la conférence et cette entretien : Mazzy Star, Colin Stetson, The Walkmen… Je suis réapparue pour Hanni El Khatib, le beau tatoué . La première chanson m’a enthousiasmée ; « Ah, du bon rock’n’roll qui tache ! », me suis-je dis. Mais en fait, je me suis pas mal ennuyée après trois titres, je n’accrochais pas aux mélodies, et puis j’avais trouvé le concert de Chromatics tellement mieux… Big up à la batteuse avec ses tresses, vraiment jolie avec une très bonne gestuelle. Je suis partie me coucher avant la fin pour éviter le mouvement de foule vers le camping, du coup je pense que j’ai loupé le single « Dead Wrong » que j’aime beaucoup. Dommage.

Hanni El Khatib 

La Route Du Rock ne m’a pas déçue cette année, j’y ai fait mes premières expériences d’interview et j’ai vraiment adoré. La programmation n’est pas toujours très accessible, mais il y a vraiment des groupes/concerts que j’ai apprécié durant cette édition, notamment Alt-J, Civil Civic, Veronica Falls, The XX, Chromatics…

J’ai plus qu’hâte de découvrir le prochain line-up et j’espère être de la partie en 2013 !

Crédit photo : Route Du Rock 2012 Lucie Rox – www.lucierox.com